Les voix étaient celles des deux femmes de service. Deux braves dames dont l'une paraissait soulagée, alors que l'autre avait l'air de trouver nécessaire de rattraper toutes les lamentations de circonstance, que ses ravisseurs ne lui avaient pas permis en temps et heure.
Maya était apparemment retenue avec ses deux employées. Je l'entendis appeler Kaméa puis Gayth et moi, qui la rassurâmes en disant que tout allait bien.
Je la vis ensuite se diriger vers les fenêtres et les ouvrir une à une, augmentant à chaque fois la lumière du salon, pour finir par l'en inonder.
Au fur et à mesure que la clarté revenait, le salon dévoilait les actes de la tragédie dont il venait d'être le théâtre.
Il n'y avait pas moins de cinq cadavres sur le sol, dont celui de notre prisonnier. Des couteaux et des espèces de disques fins et dentés étaient plantés un peu partout dans les murs et les meubles. Le cadavre de notre pauvre prisonnier n'avait dans le corps pas moins de trois de ces étranges projectiles, en plus d'un couteau planté à même la gorge. Les quatre autres hommes étaient manifestement morts de la main de Layth, une hache et trois couteaux, tous plantés dans la tête de leur victime.
À la vue de cette scène, tout bruit cessa. Tout le monde regardaient autour de soi, sauf Layth qui était déjà en train de retirer ses couteaux des corps de leurs victimes. On entendait presque la respiration de chacun.
Kaméa, qui avait tellement grandi et changé en deux ans que je la reconnus à peine, descendit l'escalier, embrassa sa mère et son père puis s'adressa à moi :
- Cousin Kalen, tu m'as beaucoup manqué. J'aurais aimé que nous nous soyons retrouvés dans de meilleures circonstances.
Elle fit une petite pause comme si elle hésitait, puis elle reprit :
- Me permets-tu de t'embrasser comme j'avais habitude de le faire ?
À part ma drôle d'embrassade avec Gayth quelques minutes auparavant, je n'avais plus embrassé un être humain depuis si longtemps que j'en avais oublié ce que c'était. J'étais même incapable de dire quelle était la dernière personne que j'avais embrassée.
Bien que Kaméa fût devenue une femme en apparence, pour moi elle était restée la petite fille d'il y a deux ans, et que j'espérais prendre dans mes bras en arrivant à Gala. Je n'allais donc pas faire la fine bouche face à une proposition qui embrassait déjà mon cœur.
J'ouvris mes bras en même temps que mes lèvres, qui montrèrent un sourire des plus francs et des plus avenants. Elle se jeta contre moi comme elle le faisait quand elle était petite, et je sentis une part d'humanité revenir dans mon pauvre cœur.
Il n'y a pas plus pur ni plus noble que l'amour qu'on ressent pour un proche. Ce sont des amours désintéressées, qui résistent à toutes sortes d'obstacles et triomphent de toutes sortes d'épreuves. Toutefois ces amours-là ne restent nobles et pures que si elles sont profondes et sincères. Un amour profond et sincère se doit d'inspirer le véritable intérêt de son sujet, parfois même contre le propre avis de celui-ci, lorsque ses bas instincts dominent sa raison et sa dignité. Aimer une personne c'est la soutenir même contre ses propres démons, quitte à l'empêcher de céder face à ces derniers, même de son propre gré.
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ÎLE DE L'AIGLE (TOME I)
Teen FictionLayth est un jeune homme qui a certes à peine 16 ans, mais sa valeur n'a pas attendu le compte de ses années. Suivez-le dans cette épopée qui changera sa destinée, ainsi que celle de tout son monde. Les pires moments d'un monde, comme les plus merve...