Chapitre 34

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Les circonstances dans lesquelles je le rencontrai, ainsi que tout ce que je vécus avec lui, avaient forgé de Layth, dans mon esprit et dans mon cœur, une image indépendante de celle que mes yeux m'en renvoyaient. C'était lors de ce repas, et après avoir remarqué le jeu d'attirance entre Kaméa et lui, que je décidai de prêter vraiment attention au physique de mon plus cher ami.

Ce qui attire le regard chez Layth c'est la robustesse de son corps. Il était grand, mais sans être un géant. Il était plus grand que Gayth et moi, qui étions loin d'être petits. Il était fort, mais sans avoir des muscles saillants. Je n'avais jamais vu d'hommes qui avaient la force de ses bras, malgré son jeune âge. Qu'il marchât ou qu'il s'assît, il avait toujours le dos droit. Il était presque capable de voir derrière sa tête, pourtant on ne le voyait guère regarder autour de lui, ou même de côté. Il avait toujours l'air de regarder droit devant, la tête droite. Il ne marchait ni très vite ni lentement. Sa démarche était sobre et jamais surfaite. Par contre, quand il était présent, sauf quand il ne le voulait pas, on ne pouvait ne pas le remarquer, même s'il ne disait mot. Quand il parlait, ce qui ne lui arrivait pas souvent, à mon grand regret, on buvait ses paroles, sans jamais en être rassasié.

Quand je fixai son visage, il me jeta un regard si profond que j'en étais certain qu'il devina mes pensées. Il m'impressionnait certes, mais j'étais résolu à accomplir la tâche que je m'étais donnée.

On ne pouvait croiser son regard, d'un noir profond, sans en avoir la sensation de chute libre. Ses yeux étaient en forme d'amende, mais des amendes bien plus grandes que ce que vous connaissez. Les sourcils étaient si parfaitement dessinés qu'on ne pouvait les voir que formant avec ses yeux un tout des plus harmonieux.

Ses cheveux eux aussi étaient noirs, mais à reflet châtain. Ils étaient toujours attachés en queue de cheval, qui lui arrivait aux épaules.

Les traits de son visage étaient fins, sans que ce dernier en parût osseux. Ses pommettes étaient teintés d'un léger rose, qui s'accentuait légèrement en seul et unique signe d'une quelconque émotion.

Son nez droit et assez fin dominait des lèvres charnues légèrement saillantes, qui surmontaient à leur tour un menton affirmé. Des oreilles discrètes et des fossettes naissantes donnaient à son visage d'adolescent un attrait indéniable, dont on devinait aisément l'effet sur le sexe opposé.

– Kalen, ton ami est toujours aussi silencieux ou a-t-il besoin que tu l'encourages un peu pour vaincre quelque timidité qui l'accablerait ?

La voix de May, qui n'avait rien perdu de sa douceur depuis le temps où je ne me lassais pas de l'entendre, me tira de ma contemplation du visage de Layth, au grand soulagement de ce dernier.

Je n'eus pas le temps de réfléchir à la question de May que Layth lui-même lui répondait.

– Rien ne me contrarie plus que de vous donner tort Madame. Toutefois, la vérité ne se formalise pas des convenances, hélas, ou heureusement peut-être.  Je ne suis point timide et n'ai besoin d'aucun encouragement, ni de personne, lorsque le devoir me dicte la parole. Cependant, en l'absence de toute obligation, sinon celle de vous remercier de votre hospitalité, et ce dont je n'allais pas manquer de m'acquitter, le plaisir de vous écouter me parut bien supérieur à tout autre que j'aurais pu tirer en prononçant quel que discours que ce soit.

(Encore une fois, j'aimerais votre avis sur la description)

ÎLE DE L'AIGLE (TOME I)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant