Chapitre 23 : Adieu

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27ème jour de Yavië (30 septembre), de l'an 1936

Helwa attendit une heure, immobile, dans le lit, pour être sûre qu'Elladan ne se réveillerait pas quand elle partirait. Pour passer le temps et occuper son esprit elle avait dressé mentalement la liste des affaires qu'elle devrait prendre avec elle.

Helwa ne voulait surtout pas penser à ce qu'elle ressentait à l'idée de quitter Fondcombe. Elle s'efforçait de toutes ses forces de repousser ses émotions loin au fond d'elle-même. La jeune femme réfléchissait à sa destination. Elle n'en avait pas, pas encore. Helwa pensait descendre dans le sud vers le royaume du Gondor, grand royaume des Hommes. Elle avait eu vent de tensions aux frontières Sud et Sud-Est avec les Haradrims du Harad, plus encore au sud et quelques autres peuplades. Cela ne l'effrayait pas pour autant. Elle savait se défendre désormais.

Quand Helwa jugea qu'il était temps pour elle de se lever, elle s'extirpa le plus doucement possible des draps et de l'étreinte d'Elladan. L'air plus froid de la chambre vint caresser sa peau nue alors qu'elle se dirigeait vers la salle de bain.

Devant le miroir, elle jeta un œil à sa silhouette pâle et mince. La jeune femme était entièrement nue, excepté son cou où trônait désormais un magnifique collier. Une chaîne d'or blanc, retenait une larme de cristal taillée avec un grand talent. Ce pendentif était celui d'Elladan. Le prince lui avait passée autour du coup pendant la nuit, lui en faisant cadeau. Il lui avait affirmée le trouver plus beau sur elle et égoïstement Helwa avait décidé que ce serait la seule chose qu'elle garderait de sa vie ici. Ce serait son seul souvenir tangible de lui.

Dans la salle de bain, la jeune femme s'habilla rapidement, prit quelques affaires de toilette, des tenues de rechange dans sa penderie et les mit dans son ancien sac avec lequel elle était venue de Bree. La boucle était bouclée. Elle chaussa ses bottes en cuir montantes et se dirigea vers la porte. Pendant tout ce temps, Elladan n'avait pas esquissé un seul mouvement, Helwa s'étant préparée en silence.

Alors qu'elle allait passer la porte, la jeune femme se retourna et, prise d'une affreuse douleur agrémentée de regrets, elle se rapprocha de l'Elfe endormi dans son lit. Helwa voulut poser sa main sur ses cheveux mais laissa son geste en suspens, les larmes aux yeux. Si elle le réveillait maintenant, elle savait qu'elle ne pourrait plus partir.

Tout son être lui criait de rester, de se blottir dans les bras de celui qu'elle aimait plus que de raison et de ne jamais le quitter. Mais c'était finalement cet amour inconditionnel et irrationnel qui la poussait à s'en aller. Elle devait le sauver de ses propres sentiments sinon Elladan courrait à sa perte. Helwa partait pour lui, pour lui sauver la vie. Elle tentait de s'en convaincre pour trouver la force de le faire.

Pour qu'il continue à avancer, il fallait qu'Elladan l'oublie. Cet avenir lui mettait le cœur en pièce mais Helwa se persuada qu'elle avait elle-même précipité sa chute en tombant amoureuse de lui, prince Elfe immortel, en le lui avouant et en ayant accepté cette nuit guidée par la passion de leur corps et de leur âme, au mépris de toute décence et de toute raison.

Helwa laissa retomber sa main le long de son corps en serrant son poing, la tête baissée.

Il ne fallait pas s'écouter. Ne rien ressentir. Pas avant d'être parti. Après elle pourrait. Après elle crierait, pendant des heures. Elle pleurerait, pendant des jours. Elle regretterait, pendant des mois. Elle souffrirait, pendant des années. A ce moment il lui fallait être forte. 

Helwa releva la tête et murmura un « Adieu Elladan » chargé de ressentiment en se retournant vers la porte.

Elle aurait voulu dire autre chose.

Helwa Isil, lune bleue - [Terre du Milieu] - TerminéOù les histoires vivent. Découvrez maintenant