Chapitre 29

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CALLISTO

C'est le jour J.

Aujourd'hui, c'est le procès d'Eden.

Je n'ai pas fermé l'œil de la nuit. Une bulle d'angoisse s'est emparée de moi au moment même où j'ai tenté de sombrer dans le sommeil et ensuite je n'ai plus été capable de me laisser aller. J'ai regretté de ne pas avoir insisté quand Eden a décliné ma proposition de venir dormir chez lui. Même si, au final, je comprends qu'il ait voulu rester seul. Je n'ose même pas imaginer dans quel état il doit être en ce moment.

En me réveillant, j'ai soudain réalisé qu'il fallait que je m'habille correctement si je voulais bel et bien assister à ce foutu procès. J'ai hésité pendant tellement longtemps devant mon armoire que j'ai fini par vérifier sur Google s'il n'existait pas un dress-code dans les tribunaux.

Bonne nouvelle : non.

Mauvaise nouvelle : ça n'a éliminé aucune de mes options, et j'étais encore plus paumée.

Heureusement, Camélia est venue à la rescousse et a choisi un pantalon droit blanc et un blazer bleu marine. J'ai failli me mettre à pleurer quand je l'ai remerciée avec un gros câlin. Je crois que tout cela me rend bien trop émotive.

Maintenant que nous sommes sur le chemin du tribunal, je n'arrive plus à prononcer un seul mot. J'ai l'impression que je vais renvoyer le pain au chocolat que j'ai avalé ce matin dès que j'ouvrirai la bouche et tout mon corps me fait mal. J'ai peur de me briser en morceaux avant d'avoir pu entendre le verdict final.

Au volant, Clément a mis sa playlist la plus joyeuse pour essayer de me donner le sourire – en vain, j'ai bien trop mal au ventre pour ça. Il a insisté pour nous déposer, moi et Cam, devant la cour de justice avant de partir faire un tour dans Paris. Il a promis de venir nous chercher ce soir. Il ne le dit pas, mais intérieurement je suis sûre qu'il est terrifié de l'état dans lequel il va nous retrouver.

À sa droite, Camélia ne cesse de me jeter des petits regards en biais. Elle s'inquiète énormément pour moi, et son soutien m'est très précieux. Quand je lui ai demandé de m'accompagner, elle n'a pas hésité une seconde à annuler tous ses plans pour me soutenir.

Dehors, le paysage parisien défile à une vitesse folle. Les températures sont étonnamment hautes pour une fin de mois de mars et le soleil tape sur les pavés, à la plus grande joie des restaurateurs et des enfants, qui font de la trottinette dans les rues sinueuses. Chaque fois que j'aperçois le moindre détail, je le mémorise aussitôt et essaie de le graver dans ma mémoire.

J'ai peur qu'à la fin de ce procès, rien ne soit plus comme avant. Et si c'est le cas, je veux me souvenir de la beauté que je trouvais à ces rues.

J'ai peur que ce soir, ce paysage ne soit plus à mes yeux qu'un mélange de voitures bruyantes et de sans-domiciles-fixes qui font la manche. C'est aussi ça, le monde réel.

En fait, je suis profondément terrifiée à l'idée de ne voir plus que ça.

Quand la voiture s'immobilise, je suis obligée de réprimer un haut-le-cœur, sachant pertinemment que nous sommes arrivés. J'ai l'impression que je vais mourir sur le champ. Je préférerais presque.

Clément coupe le contact et se tourne alors vers moi, les yeux pourtant rivés sur Cam :

— Envoyez-moi un message quand c'est fini, et je passe vous chercher. Interdiction de faire la fiesta sans moi, hein ?

Il plaisante pour détendre l'atmosphère, mais ça ne fonctionne pas vraiment. Il se gratte la tête en constatant que je n'ai même pas forcé un sourire et presse la main de Camélia dans la sienne avant que celle-ci ne quitte la voiture en premier. De mon côté, je détache lentement ma ceinture et prends de grandes inspirations.

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