Chapitre 27

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CALLISTO

— Tu es sûre de vouloir y aller ?

Je fais volte-face en me mordant la lèvre. Camélia est assise à l'envers sur une chaise, les bras posés sur le dossier. Sa frange, désormais un peu trop longue, cache partiellement son regard mais j'arrive tout de même à voir la lueur d'inquiétude qui y brille.

— Il le faut, non ?

Elle hausse une épaule sans se départir de son air concerné.

— Non. Si tu ne le sens pas, reste ici. Après tout Eden peut très bien y aller tout seul, non ?

Je me rapproche d'elle et pose mes mains sur ses joues rebondies. Elles sont glacées, alors qu'il fait presque vingt-trois degrés dans l'appartement. Je remarque au passage qu'elle porte un maillot de corps et un t-shirt épais sous son pull. Visiblement, elle devient encore plus frileuse que moi. C'est drôle, elle qui se moquais de moi quand je me baladais avec mon plaid sur les épaules en plein mois de juin...

— Il m'a demandé de venir, alors je viens.

Quand elle prend un air déçu, les coins de sa bouche retombent et ses joues avec, tout contre mes mains. Je les retire doucement, me forçant à sourire pour la rassurer.

— Mais tu en as envie ? insiste-t-elle.

Je me passe une main dans les cheveux en soupirant.

— J'en sais trop rien, mais il a besoin de moi. C'est son dernier rendez-vous avec son avocat avant le procès.

Camélia hoche la tête, compréhensive malgré tout. Je crois que ça ne lui plaît pas trop que je me mêle de cette histoire et d'ailleurs, je crois qu'Eden non plus n'aime pas ça du tout. Seulement, je ne lui ai pas laissé le choix que de me laisser l'accompagner quand j'ai vu son alerte calendaire s'afficher sur son téléphone alors que je mangeais chez lui hier soir – on a mangé des gaufres en guise de repas, autant vous dire que j'étais ravie. Après un débat animé, il a fini par céder et a accepté que je l'y accompagne. Mais je ne suis pas dupe : même s'il a tout fait pour ne pas que je le ressente, je sais pertinemment qu'il est soulagé que je l'y accompagne. Je crois qu'il crains encore que son avocat change d'avis au dernier moment et lui demande de plaider coupable. Il ne s'en remettrait pas.

— Si son avocat est une plaie ou que tu te sens mal, appelle-moi : je viendrai te chercher immédiatement.

Je souris et l'embrasse sur le front dans un geste protecteur.

— Ça va aller.

Elle acquiesce, mais je sens qu'elle n'est pas très à l'aise.

Hier soir, j'ai également demandé à Eden s'il acceptait que je raconte son histoire à Camélia dans les grandes lignes. Ça me tuait de ne pas pouvoir en parler à ma petite sœur et il a dû le sentir car il a accepté, en me faisant toutefois promettre de ne pas lui raconter l'épisode de sa fouille dans le sac à main de Lilia. Je crois qu'il en a encore honte.

Quand Cam l'a su, elle a plaqué une main horrifiée sur sa bouche, les yeux humides. Elle s'est ensuite empressée de me demander comment je me sentais, si j'étais persuadée qu'il me disait la vérité et d'autres choses dans le genre, comme si ma réaction face à tout ça était plus importante que le traumatisme d'Eden. J'ai d'ailleurs passé tellement de temps à la rassurer qu'elle a fini par s'endormir dans mon lit – où nous discutions –, sa tête posée sur ma poitrine.

Quand elle remarque que je vais maintenant réellement partir d'une minute à l'autre, elle se lève de sa chaise d'un seul bond et me suit jusque dans l'entrée. Amusée, je fais mine de ne pas remarquer son regard insistant quand j'enfile ma veste en jean et mes Converse rose pâle. J'espère qu'elles vont nous porter chance, à Eden et moi.

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