Chapitre 6

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Comme la veille, je m'étais un minimum préparé pour retrouver Ben. Cette fois-ci, j'avais beaucoup moins hésité quant à mes intentions. Nous allions nous afficher en public, ensemble, et tout n'allait être qu'une question d'apparence. Nous allions tous les deux mentir et prétendre filer le parfait amour.

Plus j'y repensais, plus je me disais que c'était un bien étrange rencard. Et jamais je n'aurais cru vivre ce genre de rendez-vous dans ma vie.

Sans que je ne sache pourquoi, j'avais le cœur serré en sortant de mon appartement. Peut-être bien parce que cette situation était toujours aussi déroutante et nouvelle. Mais bon, je ne pouvais m'en prendre qu'à moi-même. Après tout, je m'étais fourguée dans cette situation de moi-même.

Je retrouvai Ben devant l'immeuble, le regard plongé sur son portable. Il avait la même expression que lorsqu'on avait fait quelques courses ensemble. Quelque chose troublait son calme. Puis il leva son regard et son visage s'adoucit immédiatement.

Je m'approchai de lui, légèrement tremblante, tout en me demandant comment cette journée allait se passer.

— Est-ce qu'on commence tout de suite à agir comme un faux couple ou on attend d'être sur place ? me demanda-t-il assez brusquement.

J'eus un moment d'hésitation et ma bouche resta entrouverte quelque instant, juste le temps de trouver mes mots.

— Si on commence maintenant, on fait quoi là ?

— On s'embrasse ? On se fait un câlin ? On trouve une manière de se saluer pour être assez proche ?

— On va se passer de ça, refusai-je aussitôt.

— Tu sais qu'il y a plusieurs baisers différents au moins ? Une simple bise, un baiser rapide, une bonne grosse pelle... ou encore un baise-main.

— On est censé être un couple, alors on va éviter de se disputer, tentai-je de l'arrêter du mieux que je pouvais.

— Très bien. Je vais te conduire jusqu'à ma voiture, ma dulcinée.

C'était tout aussi étrange, mais je ne relevais pas, pour cette fois-ci.

Il me conduisit jusqu'à sa voiture garée à une centaine de mètres de notre immeuble. Une berline, toute noire, mais qui devait lui avoir coûté un bras. Il m'invita à monter et je fus assez surprise par l'intérieur en cuir noir. En fait, c'était presque du grand luxe.

— Je t'ai déjà demandé dans quoi tu travaillais ? m'enquis-je, peut-être un peu trop spontanément.

— Non. Mais c'est vrai qu'on devrait pouvoir parler travail... Après tout, en dehors de nos passe-temps, on est censé savoir ce genre de choses sur l'autre. Mais je ne peux pas vraiment détailler tout ce que je fais... Je n'ai pas vraiment le droit d'en parler en dehors du travail. Et ça va paraître extrêmement large, parce que je n'ai pas d'autres choix, mais c'est dans l'informatique. Un peu de programmation entre autres choses.

— Moi aussi, je travaille dans l'informatique. Et je pourrais probablement en dire de même au final.

— Le secret professionnel, une belle invention pour ne pas trop s'attarder sur le travail de l'autre, surtout dans un faux couple.

Il semblait un peu fier de lui, un peu comme toujours.

— Et sinon, tu vas me dire où est-ce qu'on va ? Parce que j'ai aucune idée de ce qu'on va faire aujourd'hui et je t'ai fait confiance. Mais maintenant, je commence un peu à regretter de ne pas avoir demandé plus d'informations.

— On va aller à une exposition. C'est d'un artiste assez indépendant et pas si connu que ça. Autant dire qu'à moins de s'y intéresser vraiment, on ne trouvera personne de notre entourage a priori.

Comment (ne pas) se faire oublier | TOME 1 & 2Où les histoires vivent. Découvrez maintenant