Chapitre 31

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Chapitre 31 : « La dernière des libertés. »

|Soudain, June fit irruption, passant la tête dans l'encadrement de la porte : -Dites, y'a une blonde qui demande à vous voir. Elle dit qu'elle s'appelle Charlie.

Et leurs deux cœurs ratèrent un battement.|

Libres.

Nous étions libres.

Luke, moi. Libres.

J'entendais mon cœur battre comme si ma main l'enserrait. Je sentais plus que jamais le pouvoir de la vie, sa façon de nous faire vivre à travers les sentiments les plus puissants qui soient.

Pour moi, les plus puissants, c'était l'amour et la liberté.

L'envie d'hurler me saisit soudain, alors que je voyais June disparaitre derrière une lourde porte. C'aurait été un hurlement de joie, de soulagement.

Lorsque la porte se rouvrit, j'eus à peine le temps d'entrevoir Luke. J'étais déjà dans ses bras. Il me serra si fort que je manquai finalement d'air. Dans ses yeux, je vis s'envoler la peur noire de ne plus me revoir.

Je jetai un regard derrière Luke et vit Ethan, hésitant. Il souriait mais ses lèvres étaient pâles, comme si son sourire menaçait de se faner à tout moment. Je le pris dans mes bras, plus brièvement, mais avec autant de soulagement.

Parce que moi aussi, j'avais cru ne jamais les revoir. Pendant un court moment, du moins.

Personne n'avait prononcé un mot avant de se retrouver dans le salon.

-Qu'est-ce que tu nous as fait peur, Charlie Malefoy-Granger, dit Luke avec un sourire.

-Vraiment ? dis-je ironiquement.

Alors que je m'apprêtais à m'asseoir sur un fauteuil dans le salon, June me fixa longuement :

-Est-ce qu'on se connait ?

La réalité me frappa : elle ne se souvenait pas. Qu'est-ce que ça faisait, de ne rien savoir d'un monde qui l'entourait ? Est-ce que c'était frustrant, ou soulageant ? Je pensai soudain à tout ce qu'elle ne savait pas, et qu'il valait mieux qu'elle ne connaisse pas : la douleur, les explosions, la mort, la fuite. Elle avait oublié les bons comme les mauvais moments, mais ce qu'elle ne savait plus ne pouvait plus lui faire de mal. Elle allait bien. Tout allait bien pour elle, comme ça irait bientôt bien pour moi aussi.

Elle ne méritait pas d'être sortie d'un bonheur qui lui semblait réel, parce qu'au fond, qu'est-ce qui est réel et qu'est-ce qui ne l'est pas ? Ses souvenirs n'étaient pas ma réalité, mais c'était la sienne.

-Non, je ne crois pas, répondis-je. Je suis Charlie, une amie d'Ethan.

Je tendis une main qu'elle serra avec son habituelle joie naturelle.

-June, je suis la demi-sœur d'Ethan.

-J'ai beaucoup entendu parler de toi.

Ethan, à ma gauche, se racla la gorge et désigna le jardin, séparé de nous par une porte-fenêtre.

-Tu as peut-être certaines... choses à dire... des trucs à partager avec Luke ? Des nouvelles anglaises ?

Il utilisait des périphrases devant June, mais signifiait également qu'il resterait là, en retrait, parce qu'il pensait que ça ne le regardait pas. C'était vrai, en réalité : c'était notre monde.

J'hochai la tête, et dans ses yeux je vis le sourire triste qu'il tentait de tenir éloigné de ses lèvres. J'aurais tant voulu lui dire qu'il faisait partie de mon monde, parce que je l'aimais, mais j'aurais pu l'aimer aussi fort que Roméo aimait Juliette, qu'Augustus aimait Hazel, que ça n'aurait rien changé. M'en voulait-il pour lui avoir effacé la mémoire ? Pour être partie, même si j'avais une excuse plutôt bonne ?

CHARLIEOù les histoires vivent. Découvrez maintenant