Chapitre 5 : PROMOTION

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« Promotion »

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Qui aurait cru que quelqu'un comme moi aurait un jour la chance d'obtenir un poste si élevé au sein d'une entreprise comme ARES ? Je n'aurai jamais pu l'imaginer et pourtant, c'était bien réel.

Le mois suivant, je me rendais donc sur mon nouveau lieu de travail. Cette annexe était certes beaucoup plus petite que le laboratoire de la capitale, mais elle possédait tous les équipements nécessaires pour nos études. Pouvoir travailler ici était une chance incroyable, mais je dois avouer qu'en arrivant je ne pouvais pas m'empêcher de me sentir angoissé à l'idée de commencer ce nouveau job. En théorie, je devais avoir bien plus de liberté ici, mais j'avais tout de même peur que la cohabitation avec ma nouvelle équipe ne se passe mal. Je savais que mes collègues étaient tous deux plus âgés et donc plus expérimentés que moi. Je me retrouvai encore une fois à être le plus jeune et je craignais qu'à cause de mon âge, ils ne puissent pas prendre mes recherches au sérieux.


J'étais arrivé au laboratoire aux alentours de vingt heures. Après avoir rencontré mes collègues, Dan et Isaac, et partagé mon premier repas avec eux, nous avions décidé de visiter les locaux. Les espaces de vie étaient corrects, et nous disposions chacun d'un bureau et d'une salle d'expérience attitrée. Cette découverte me rassura un peu, il serait plus facile d'organiser nos temps de travail ainsi. 

Après cette brève visite, mes collègues décidèrent de rejoindre leur chambre pour s'installer et défaire leur valise. Seulement il manquait d'après moi, un élément important que nous n'avions pas encore vu.

Lorsque je leur avais demandé s'ils comptaient aller voir les démons, ils m'avaient répondu que ça pouvait attendre jusqu'au lendemain. En effet, nous n'avions pour le moment aucun intérêt à aller voir les enfant-maudits. Pourtant, moi, j'étais bien trop impatient pour pouvoir attendre jusqu'au matin. Je les avais donc salués et j'étais parti de mon côté.


Dans ce laboratoire, les démons étaient installés au sous-sol. Il s'agissait de l'endroit le plus éloigné de la sortie et c'était de toute évidence d'une mesure de sécurité pour éviter qu'ils ne s'échappent, mais je ne pouvais pas m'empêcher de trouver l'idée quelque peu lugubre.

Surtout que cet endroit était extrêmement sombre. La moitié des néons qui éclairaient le couloir clignotaient sans relâche ou ne fonctionnaient tout simplement plus. Les chambres des démons étaient donc à peine éclairées. Enfin, si on pouvait réellement appeler ça des chambres. A mes yeux, il s'agissait plutôt de cellules accolées les unes aux autres. Délimitées par d'épais barreaux, elles étaient minuscules et, hormis un fin matelas que jonchait le sol, il n'y avait aucun confort. J'avais l'impression de me trouver face à des animaux en cage. Contrairement à la capitale, cet endroit était sale, poussiéreux et mal entretenu. En l'état, il serait difficile de rester ici suffisamment longtemps pour faire des observations. Même pour moi.

Un peu refroidi par cette découverte, je m'avançai tout de même sous la faible lumière des néons. Comme tous les autres démons que j'avais croisés jusque-là, aucun d'eux ne me regardait. Ils ressemblaient toujours autant à de simples coquilles vides. Comme quoi, peu importe le confort qu'on leur offrait, ils agissaient toujours de la même façon.

En traversant le couloir, je remarquai qu'il n'y avait quasiment que de jeunes démons âgés de cinq à huit ans environ. Ce n'était pas forcément une bonne chose puisqu'en règle générale, leur santé étant fragile, il est plus difficile de travailler avec de jeunes démons. Enfin, ARES-A n'était qu'une petite annexe de campagne, je ne m'attendais forcément pas à mieux.

Il y avait cependant quelque chose d'assez intéressant. Parmi les enfant-maudits se trouvaient deux démons identiques. Deux jumelles. Mon âme de scientifique ne put s'empêcher de penser à toutes les observations qu'il serait intéressant de faire avec elles. Enfin, à condition bien sûr que je parvienne à négocier leur garde auprès mes collègues et connaissant mes talents de négociateur, ce n'était pas gagné.

On avait dû juger que ces deux démons étaient plus dangereux en étant réunis. Aussi, pour éviter tout contact, le laboratoire avait pris soin de les séparer en plaçant un autre enfant-maudits entre elles. Le démon qui se trouvait dans la cellule qui les séparait était un garçon légèrement plus âgé que les autres.


Ce n'est qu'en m'approchant un peu plus de lui que je remarquai qu'il me regardait. Il me fixait droit dans les yeux, l'air mauvais. Je dois reconnaître que croiser son regard m'avait surpris. C'était le seul démon qui réagissait à ma présence. Il montrait clairement que je n'étais pas le bienvenu et qu'il me tuerai s'il le pouvait. C'était une réaction assez inhabituelle, mais il avait au moins le mérite d'être honnête.

A première vue, ce démon semblait en bonne santé et son âge plus avancé faisait de lui bon sujet. En toute logique, sa place aurait dû être à la capitale ou dans une meilleure annexe. S'il se retrouvait là, il devait avoir une raison. Intrigué par ce démon, je m'étais approché un peu plus pour l'observer. A cause du manque de lumière, je remarquai seulement maintenant qu'une épaisse corde entourait ses poignets. Les démons des laboratoires sont bien souvent trop faibles pour pouvoir bouger alors les attacher n'avait strictement aucun intérêt. Mais je compris finalement assez vite la raison d'une telle mesure.

En me voyant approcher, le démon avait rassemblé ses forces pour se hisser sur ses jambes. Il me fixait en poussant de faibles grognements. Il pensait sûrement que ça le rendrait plus impressionnant et qu'il pourrait me faire peur. Pourtant, peu importe le mal qu'il se donnait, il était loin d'être effrayant. Son cinéma dura encore quelques secondes avant qu'il ne perde l'équilibre et ne s'écroule à cause du poids de la corde. Pourtant, malgré sa chute et son manque évident de force, la seconde suivante, il s'était déjà relevé et grognait de nouveau.


" D'accord, c'est bon. Je te laisse tranquille, arrête ça. "

Face à son agitation, je renonçai et reculai. Ce n'était bien évidemment pas par peur, mais je préférais seulement éviter qu'il ne se blesse par ma faute dès le premier jour.

Jugeant que j'en avais suffisamment vu pour aujourd'hui, je remontai rejoindre les autres. Je devais m'assurer d'être en forme le lendemain afin de négocier la garde des meilleurs enfant-maudits. Mon choix était déjà fait. J'espérai pouvoir travailler avec les jumelles ou, au moins éviter la garde du garçon que je venais de croiser.  

Me connaissant, je serais incapable de gérer.

N°1203Où les histoires vivent. Découvrez maintenant