Chapitre 35

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Technicolour Beat - Oh Wonder
***

Isaiah

Suite aux événements qui se sont passés dans le bus, tous les élèves étaient choqués et ne parlaient que de ça. Désormais des rumeurs courent disant que Yaëlle est mêlée à des histoires de gangs et j'en passe. Mais seule Kristen connait la vérité et je sais bien que ce n'est en aucun cas des histoires dangereuses de ce genre. Elle se fait battre, c'est sûr, mais par qui ? Je passerais à l'hôpital après la pause-déjeuner pour aller la voir. Je raterais les cours de l'après-midi, de toute façon trois heures de maths ne vont pas m'apporter grand-chose. Madame Lewis n'y verra que du feu.

— Mec, t'es avec moi ? m'appelle Scott.

Je reviens à moi et hoche la tête.

— Ouais, ouais.

Le bus s'immobilise devant le bahut et nous descendons. J'attrape une clope et la glisse entre mes lèvres pour ensuite l'allumer avec nonchalance. Je laisse la nicotine envahir mes poumons et détendre mes muscles. Fermant les yeux, j'expire le restant de tabac et reprends une bouffée rien que pour le plaisir. Scott se poste à mes côtés et soupire.

— Donc tes vieux se chargent de mon problème de fric ? Mais pourquoi ?

Je hausse les épaules et lui fais face. Scott louche sur ma clope et déglutit. Il n'a pas touché à un joint depuis notre conflit avec les gars. Peut-être que ça l'a secoué un peu et qu'il s'est enfin rendu compte qu'il s'était mis dans un beau merdier, qui sait. Par contre le manque de drogue dans son système le détruit à petit feu. On dirait un putain de cadavre : son teint est blafard, ses yeux sont rougis et ses mains tremblent. De plus, il a maigri et ne mange presque plus rien. Il m'inquiète ce con.

— Parce que je leur ai dit de le faire. Je t'aime, vieux. Je pouvais pas te laisser dans la merde comme ça.

Reconnaissant, Scott s'approche de moi et me fait une petite accolade. Son corps devenu frêle et malade heurte le mien et me fait de la peine. Puis la sonnerie retentit, mon meilleur ami s'écarte, j'écrase ma cigarette à moitié consumée sous ma semelle puis nous nous dirigeons vers l'entrée du lycée, cet enfer. Plusieurs filles me sourient et m'adressent des regards aguicheurs sur mon chemin. Bien évidemment, je les ignore royalement. Je n'ai plus la tête à faire ce genre de chose depuis qu'un ange a déboulé dans ma vie. Les premiers cours commencent, je pose mon cul sur une chaise peu confortable, écoute que d'une oreille un prof pendant une heure et manque m'endormir sur ma table.

Dans la classe, deux places sont libres : celles de Yaëlle et Kristen. J'espère de tout cœur que Yaëlle va s'en sortir. Elle est venue dans le bus pour que l'on puisse s'occuper d'elle, comme pour venir se réfugier auprès de personnes qui la chérissent et lui veulent du bien. Yaëlle est tombée sur un ange déchu qui comprend les atrocités et la cruauté de la vie. C'est terrible mais vrai.

Les heures passent, la pause-déjeuner arrive enfin et l'envie de me barrer d'ici me démange lorsque j'aperçois Jessica et sa bande d'écervelées ricaner bruyamment en dévisageant une pauvre fille qui porte des couettes de chaque côté de son crâne et des lunettes rondes dans les couloirs. Elle semble intimidée et sur le point de pleurer. Avant même que je n'aille la voir, Scott me devance et entame une conversation avec la harcelée. Étonnant, c'est nouveau ça. Je suis fier de lui. Jessica et ses sbires arrêtent de rire et fixent mon ami, médusées par son action soudaine. Je le retrouve peu à peu, mais il y a encore un long chemin à parcourir. Je souris légèrement et file dehors pour attraper un vélo pour pouvoir aller à l'hôpital.

Sur mon chemin, le soleil californien tape et réchauffe ma peau d'ores et déjà hâlée. Le trafic est assez chargé à midi, heureusement pour moi, je suis en vélo donc je ne suis pas si embêté que ça. Je pédale aussi vite que possible et me concentre sur mon souffle pour ne pas me retrouver épuisé en arrivant. Je connais le trajet par cœur. Petit, j'allais voir ma mère au travail avec mon père et on lui apportait à manger entre ses gardes. Bon sang, ces moments me manquent presque. En voyant l'immense bâtiment de l'hôpital, je ralentis et mets le vélo devant l'entrée avec appréhension : j'espère qu'il ne se fera pas voler. Je touche du bois.

Lose Me To Find YouOù les histoires vivent. Découvrez maintenant