Troisième partie ~ Parce que la confrontation est inévitable

8 2 0
                                    

Bonjour tout le monde ! Nouveau chapitre ! J'espère qu'il vous plaira !

Bonne lecture !

**********

Chapitre 27 ~ Prends ma vie, mais j'anéantirai la tienne

    Le voile noir flottait sur son visage, le soleil se levait et sa robe lui donnait chaud, l'unique touche de couleur de sa tenue résidait en l'imposante couronne déposée sur sa tête. Elle entra dans le cimetière juste derrière le cercueil, avant Adrien et sa mère, le bras du prince passé sur ses épaules en un signe de possession mal vu dans ce genre de situations. On ne pouvait pas voir ce geste comme un signe de soutien, son visage restait impassible, comme si rien de grave n'était arrivé, comme si le royaume n'était pas en deuil.

    A vrai dire, la mort du Roi ne l'atteignait plus, elle était focalisée sur ce qu'il se passerait plus tard dans la journée, sur cette vie qu'elle s'apprêtait à lui donner. Elle ne devait pas seulement être forte, elle devait être inatteignable. Et ça, elle savait le faire.

    Les invités n'échangèrent que des regards, parfois perplexes, embués de larmes ou curieux, mais jamais un mot ne parvint aux oreilles d'Anya. Ils s'arrêtèrent devant le caveau familial aux nombreuses gravures dans le marbre, le prêtre parla un court instant du mérite qu'avait le majestueux défunt puis des hommes firent entrer le cercueil dans le mausolée sous les sanglots étouffés de sa veuve. Adrien, lui, ne pleurait pas. Il ne voulait pas donner ce plaisir à ce prince de malheur, mais son cœur se serra une énième fois en pensant qu'ils ne partageraient plus jamais le moindre instant de bonheur. Il allait chérir ses souvenirs, il se le promettait.

« Prends-lui la main, souffla le prince à Anya.

Elle lui lança un regard inexpressif, mais au fond d'elle, elle bouillait de le voir mort. Ne pouvait-il pas les laisser vivre ce moment sans intervenir ? Ne pouvait-il pas rester froid au lieu de forcer Anya à jouer à la famille soudée ? Parce que même si elle en mourrait d'envie, même si elle souhaitait soutenir Adrien, ce geste, c'était lui qui le lui dictait.

    Pourtant, elle le fit. Par obligation, et par amour. Pour le jeu, et pour Adrien. Sa main prit la sienne avec douceur et bienveillance, il ne détourna pas les yeux pour la regarder mais la serra en retour. Et même si le prince croyait qu'elle se moquait de lui, lui savait que ce n'était pas le cas. Elle était sincère, elle partageait sa douleur et voulait soulager la sienne, elle pensait à lui redonner un peu de chaleur, le sortir de cette infernale tempête de chagrin, l'épauler, tout simplement.

    On vint présenter ses condoléances à la famille royale, à laquelle s'était greffé le prince. Son attitude était grossière, sa nonchalance exécrait chacun des invités. Anya elle-même se détestait de ne pas pouvoir l'en empêcher, il avait l'air d'un enfant incontrôlable accroché à son jouet préféré. La veuve, d'ailleurs, finit par partir en plein milieu d'une conversation que l'on voulait banale, le regard vide.

    On félicita les futurs époux, posa une main amicale sur l'épaule d'Adrien, les masques reprirent de plus belle, comme chacun s'y attendait. Ils étaient face à trois têtes qui ceignaient une couronne, deux princes et une Princesse, deux futurs roi et Reine – à vrai dire, ils l'étaient déjà – et un qui perdrait bientôt officiellement tous ses pouvoirs. L'hypocrisie était de mise, elle s'invitait dans chaque parole, sur chaque visage, dans chaque geste, elle définissait ce monde que rien n'arrêtait : un cercueil royal venait de serpenter à travers la ville entière, accompagné des pleurs des enfants de Vikachev ? C'était dramatique, certes, mais il fallait les comprendre, après tout. Il n'y avait que la place qui comptait, qu'importait sous quel règne on l'obtenait ou bien la gardait-on, qu'importait à qui on devait servir ces sourires construits de toutes pièces ou sur qui on devait cracher, qu'importait en-dessous de quelle fenêtre il fallait chanter les louanges d'un dieu ou d'un diable, tout ce qu'on voyait et qu'on ne verrait toujours, c'était cette place, ces cercles et cette influence.

Anya Nina Letsov [en cours de réécriture]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant