Chapitre 21 ~ Servitude éternelle

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Bonjour tout le monde ! Nouveau chapitre ! J'espère qu'il vous plaira !

Bonne lecture !

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    Même si l'extérieur du palais revêtait un style plutôt ancien, l'intérieur, lui, n'était que modernité. Oubliés, les lustres de cristaux, les bougeoirs en or, les tapisseries brodées, les fauteuils de velours, place au verre, à de nouvelles formes, à un nouveau code vestimentaire : plus de lourdes robes beaucoup trop serrées, plus d'énormes chapeaux, de parures démesurées, de maquillage épais.

    Comme une bouffée d'air pur, Anya respira l'air sans odeur, elle qui était pourtant habituée à celle des livres anciens et des portes de bois. Accrochée au bras du prince, le regard se posant partout, du haut plafond de miroirs gravés d'arabesques argentés au sol comme translucide, elle ne pouvait s'empêcher de se dire que Vikachev avait besoin d'évoluer.

    De ne pas rester figée au temps des Deus.

    Elle avait beau aimer l'ancien, elle avait beau rester bouche bée devant une bibliothèque de chêne, une comme Vikachev, haute de plusieurs mètres, qui occupait toute la pièce, avec une lourde table trônant au centre, elle se disait que c'était, justement, peut-être trop lourd. Peut-être trop, tout court.

    On pouvait très bien étaler ses richesses autrement que dans des moulures, des fresques ou de l'or. Pourquoi ne pas préférer la finesse à l'élégance massive ? Pourquoi éblouir comme si rien n'avait changé depuis des années, pourquoi vouloir se démarquer par toujours plus, alors qu'on pouvait tout simplement faire autrement ?

    Elle, Reine de Vikachev, elle instaurerait la modernité.

    A côté du prince, l'Empereur les guidait à travers le lumineux palais, mais Anya n'écoutait pas ; elle l'avait déjà visité, ce palais, elle le connaissait. Mais il lui semblait différent, encore plus beau, encore plus baigné de lumière. Peut-être était-ce ça, qui l'attirait tant ? Ici, il n'y avait pas d'épais rideaux, seulement un voile fin d'un blanc sans défaut. Ici, elle se croyait hors du temps, extirpée de toutes ces révélations, de tous ces problèmes.

    Pourtant, à chaque fois que la main d'Adrien frôlait la sienne, elle se répétait que bientôt, tout finirait. Bientôt, une fois qu'elle serait mariée, une fois qu'elle serait Reine de Vikachev comme d'Abratchev, il n'y aurait plus que ce monstrueux prince à tuer. Un jour, il serait vulnérable. Un jour, il se détacherait de ces myriades de reliques. Un jour, elle pourrait l'approcher sans craindre d'en souffrir. Et là, à ce moment précis, elle le tuerait.

    Mais avant, elle devait attendre qu'il lui fasse assez confiance pour baisser sa garde. Epouse parfaite, Reine exemplaire, arme obéissante. Cerveau brillant mais dédié à la gloire de son époux, tête couronnée mais à l'écoute du moindre de ses murmures, descendante des Deus mais guidée par la seule voix d'un homme fou à lier. Corps et âme, elle lui montrerait à quel point elle lui était fidèle, à quel point elle le suivrait jusqu'au bout du monde, pour qu'il ne voie pas le poignard empoisonné qu'elle tenait dans sa main. Elle serait plus belle, toujours plus belle, pour ne penser plus qu'à son meurtre.

    Combien de temps cela prendrait-il ? Elle voulait se convaincre de pouvoir tenir une vie entière, de jouer sans limite, mais elle avait peur de se confondre avec son personnage, de ne plus pouvoir distinguer les sentiments feints des véritables. Et puis, il y avait Adrien. Que lui arriverait-il, une fois qu'il ne serait plus personne ? Le prince le tuerait-il ? Ou bien le garderait-il enfermé ? Qu'importait la solution qu'il pourrait envisager, la torture, la mort, l'exil, et bien d'autres encore, Anya avait l'impression de ne jamais pouvoir la surmonter. Mais comment le protéger en devenant une Reine de Vikachev mariée à un roi d'Abratchev ? Quoi faire sans qu'elle ne se trahisse ?

Anya Nina Letsov [en cours de réécriture]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant