Je suis descendu au rez-de-chaussée dans les environs de dix heures, rejoignant la famille au complet, assise dans le salon, entourée d'autres inconnus et de gardes. Ils parlaient ensemble bruyamment, des cigares en main. Teresa se tenait là, appuyée contre le dossier du canapé, les yeux rivés sur son téléphone, curieusement concentrée. Nekor n'était pas là, lui, ce qui ne m'étonna qu'à moitié. Sa cousine finit par détacher son regard de son occupation, pour voir qui était entré dans la pièce, et en me reconnaissant, elle me jeta un regard froid et poursuivit sa tâche comme si je n'avais jamais existé. Après tout, c'était peut-être mieux ainsi pour elle et sa vie.
Je pris une pomme, dans le grand panier de fruit posé sur la table à manger, et le père de Nekor me scruta froidement. Il ne m'avait toujours pas adressé directement la parole depuis mon arrivée ici et à vrai dire, c'était lui qui me faisait le plus peur dans cette maison, détrônant son fils de sa fameuse réputation. On aurait dit que le père détestait ma présence ici et qu'il allait se débarrasser de moi sans prévenir personne.
Il détourna le regard, se concentrant de nouveau sur la conversation en cours avec ses hommes. Je poussai un long soupir par le nez et j'ai croqué dans la pomme, attirant encore plus l'attention sur moi. Je m'avançai dans le couloir désert, m'approchant de la porte des toilettes, et l'ouvris toute grande, le visage blasé.
Je me suis figé sur place, les dents à moitié plantés dans la pomme, et mon coeur sembla s'être arrêté.
▬ Qui est-ce ? Demanda un homme de la cinquantaine d'années, en se retournant vers moi.
Il était assis face à un bureau, entouré de cinq gardes surarmés, et Nekor se tenait derrière, dans un grand fauteuil de cuir, le manche de sa machette dépassant de son dos. Ce dernier était également encadré d'une dizaine d'hommes qui portaient tous un énorme fusil d'assaut. Il me jeta un regard noir et plein de mépris. Je me mis à respirer de plus en plus vite, me rendant compte de ma bêtise. Je jetai un oeil à ma droite et je me rendis compte que la porte des toilettes se trouvait juste à côté. Je venais d'ouvrir celle du bureau de Nekor, en pleine réunion, embué par la fumée blanche de leurs cigarettes.
▬ Hiro, dégage. Grogna mon maître en aspirant une bouffée.
Je voulus refermer la porte à la va-vite, le visage rouge comme une pivoine, mais l'invité m'interpela :
▬ Mais non, Nekor, voyons ! Laisse-le entrer. Qui est-ce donc ? Ton nouveau marqué ?
Mon maître parut perplexe, hésitant, mais il finit par acquiescer. Un garde vint m'ouvrir la porte, m'empêchant de la fermer et d'ainsi fuir à cette situation embarrassante. Il me fit signe d'entrer et je m'exécutai, le pas lent et prudent, les doigts serrés autour de ma pomme. Au secours ... Au secours ... L'invité tendit la main vers moi pour que je la prenne, le visage attendri.
▬ Tu t'es dégotté un fameux beau garçon, Nekor. Hiro, c'est ça ?
J'acquiesçai vaguement, les mouvements saccadés par des tremblements incontrôlables. Mon regard se dirigea machinalement vers mon maître qui resserra ses doigts autour de sa cigarette, ses yeux de tueur rivés vers l'invité qui me souriait.
▬ Viens donc t'asseoir sur moi. Il n'y a plus de chaises libres. Cela ne te dérange pas, Nekor ?
▬ Pas le moins du monde. A-t-il souri, le ton amer.
Quoi ? Il me laissait entre les mains de ce vieux pervers sans aucune hésitation ? Je fronçai les sourcils, le regard chargé d'incompréhension, tandis que l'homme m'attirait contre lui. Je posai ma pomme à peine entamée sur le bord du bureau et m'assis sur un des genoux de mon interlocuteur.

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Nekor
Romance◣ Lorsque son père se fait assassiner sous ses propres yeux par un mafieux, Hiro développe en lui une forme d'obsession envers le tueur, lui qui avait toujours profondément détesté son unique parent. Il tentera par tous les moyens de retrouver l'ass...