44. Ethan

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On vient d'atterrir, la ville de Miami a été si petite sous l'avion. Et lorsque j'ai regardé autour de moi pendant l'atterrissage, je me suis sentie petit. Miami, ce n'est pas Charlotte. C'est totalement différent, il y a moins de végétations et plus de voitures et de hauts immeubles. C'est perturbant ce genre de changement, j'espère - même si j'ai un bon sens de l'orientation - ne pas me perdre et arriver au bon endroit. Si un jour on m'avait dit que j'aurai aussi ce genre de pensée, je n'en aurai pas cru un mot.

Lorsque je descends de l'avion, je pars récupérer mon bagage qui met une heure à arriver. Une fois en main, je sors de l'aéroport et appelle un taxi en levant la main en l'air. À chaque fois qu'un taxi s'arrête et que je ne m'approche pas assez vite, quelqu'un me prend la place. Ce qui m'agace au bout d'un moment. Je crois que j'attends encore une demi-heure avant que je puisse enfin en choper un. Je lui donne l'adresse de l'immeuble de Lana et nous roulons, je ne sais pas pendant combien de temps. Je m'en fous, à dire vrai. Les embouteillages ne sont pas rares, ils sont bien présents et embêtent les automobilistes qui commencent à klaxonner. Même mon taxi klaxonne et jure entre sa barbe, il a fallu que je tombe sur un impatient de la route. Dit celui qui klaxonne la plupart du temps ! Lorsque nous arrivons près de l'immeuble de Lana, je ne me dirige pas vers l'entrée, je vais vers la plage. Je sais que si elle est rentrée chez elle, elle ne doit certainement pas être dans son appartement : elle doit apprécier la vue, réfléchir aux conseils qu'elle a reçus et bien les appliquer.

Je la connais, je sais comment elle fonctionne.

Et en effet, quand je m'approche du bord de la plage, c'est la silhouette assises de Lana qui attire mon regard. Je ne m'approche pas, pas tout de suite du moins parce que je veux apprécier ce moment. Ce moment si tendre et silencieux, où le corps et l'âme ne font qu'un. Où je peux réfléchir moi aussi à ce que je vais lui dire. Quand je me rends comte que ça fait bien trop que je reste planter à la regarder, je m'avance dans le sable jusqu'à sa silhouette.

- J'aurais aimé que tu me réveilles, dis-je en me postant derrière elle, le regard rivé sur l'océan bien calme, les mains dans les poches et mon sac posé sur le sable.

- J'aurais dû me douter que tu me rejoindrais, me répond-elle sans se retourner vers moi.

- Tu savais, tu le voulais.

- Oui, souffle-t-elle en me regardant enfin.

Nos yeux s'ancrent, ne se lâchent pas et se disent beaucoup de chose. Ils se font des promesses, se parlent et se comprennent. Et puis, ce sont nos gestes qui s'expriment. Je m'assieds à ses côtés, mon bras passe autour de ses épaules naturellement et viennent coller Lana tout contre moi. Mes lèvres déposent un léger baiser sur le haut de son crâne, sa main vient trouver la mienne, celle qui est posée tout naturellement contre son épaule. Et nous restons comme ça, nos respirations calmes et apaisantes comblent le silence et le bruit des vagues nous apaisent. Nos regards rivés sur la vue qui s'offre à nous.

- Au départ, je voulais tout changer en allant vivre dans un autre état. Je voulais mener une autre vie, me faire de nouveaux amis, avoir une autre façon de voir les choses mais je me suis rendue compte que ce n'est pas en fuyant que les problèmes se règlent.

J'écoute Lana, d'une oreille attentive et complètement dévolue. Je suis là pour elle, pour l'écouter se confier à moi et s'exprimer comme elle aurait peut-être voulu s'exprimer lorsque nous étions ensemble. Enfin, nous sommes toujours ensemble - je l'espère, du moins - mais je veux dire, quand nous étions ensemble, à Charlotte. Je la laisse se confier sans la juger, sans lui exprimer mon ressenti et sans lui dire qu'elle aurait dû faire ça au lieu de faire ça. Parce que dans un couple, le droit à la parole est cruciale et mène à de magnifiques retrouvailles. Enfin, le droit à la parole est importante pour tous. Dans le monde, on ne devrait pas nous dire : « Exprime-toi, dis-nous ce qui ne va pas et ensemble, nous trouverons une solution. Si tu nous expliques, nous ne te jugerons pas et nous essayerons de te comprendre et de t'aider. » On ne devrait pas nous dire ça parce qu'en quelque sorte, on nous ment. Parce que ça ne se passe pas comme ça, parce que - quand on a fini de raconter - on nous juge et on nous dit de changer notre façon de penser et de voir les choses.

An endless fightOù les histoires vivent. Découvrez maintenant