Rosario

Chapitre 20

Le lendemain après-midi, de retour de ma séance quotidienne de torture, un homme vêtu d'un costume marron mâchouillant énergiquement son chewing-gum entra dans la chambre après avoir toquer discrètement à la porte.

- «Bonjour monsieur Pereira, ravi de voir que vous allez mieux.

Je suis l'inspecteur Gonzalez»

- «Bonjour inspecteur, oui ma femme m'a parlé de vous et de cet individu au parc mais je ne m'en rappelle vraiment pas, je suis désolé»

- «Aucun problème, affaire classée, tranquillisez vous. N'y pensez plus. Et pour l'accident des souvenirs?»

Bien sûr, l'image du petit garçon assis à côté de moi et la sortie de route. Mais je répondis:

- «Non inspecteur le trou noir, je n'ai aucun souvenirs de l'accident»

- «Très bien Monsieur Pereira, je vais vous laisser vous reposer, je ne viendrais plus vous embêter sauf sur votre demande. Si des souvenirs de l'accident vous reviennent pouvant faire avancer l'enquête, n'hésitez pas»

- «Concernant l'accident inspecteur, avez-vous des explications?»

- «Vous étiez parfaitement sobre, aucun traitement médical, aucune substance illicite dans votre organisme, vous n'étiez pas au téléphone, pas de texto non plus. Aucune voiture n'a provoqué votre sortie de route. Un témoin qui vous suivait a prétendu avoir vu votre véhicule faire une brusque embardée sur la gauche pour percuter l'îlot séparateur du terre plein central. Certainement, un malaise de votre part»

- «Sans doute, nous ne le saurons jamais, c'est bien frustrant»

- «Vous vous en êtes sorti, c'est le plus important. Vous êtes le troisième miraculé en quelques jours dans cet hôpital»

- «Que voulez-vous dire inspecteur?»

- «Oui un petit garçon de 7 ans dans le coma artificiel après une tentative de meurtre s'en est miraculeusement sorti d'un coup de baguette magique. Selon les médecins, il était pourtant cliniquement décédé.

De même pour un nourrisson qui a été violemment agité par sa nounou souffrant d'un oedeme cérébral incurable qui disparaît subitement. La magie de Noël a encore opérée»

J'avais du mal à croire ce que je venais d'entendre. Il ne pouvait pas parler de Victor et du nourrisson que j'avais visiter durant mes escapades comateuses.

- «Inspecteur, le petit garçon et le bébé dont vous parlez sont toujours à l'hôpital ?»

- «Non non, ils sont sortis rapidement, ils sont restés quelques jours en surveillance puis ont rejoints leurs proches»

J'étais déboussolé, je ne pouvais pas me confier à cet inspecteur de police que je voyais pour la première fois d'après mes souvenirs. Je décida de ne rien dire.

«Quelle merveilleuse nouvelle pour ces enfants et leurs familles. Comment s'appellent ces petits anges?»

J'appréhendais la réaction de l'inspecteur à cette question indiscrète mais il répondit calmement:

- «Victor pour le petit garçon et Clara pour le bébé»

Victor...aucune coïncidence possible...

Je vis l'inspecteur se perdre soudainement dans ses pensées et ses yeux devinrent d'un rouge vif remplis de larmes.

- «Tout va bien inspecteur?»

- «Je voudrais tellement moi aussi qu'un miracle me ramène mon petit fils Rosario»

Sa voix se cassa en terminant sa phrase sur le coup de l'émotion. Il regardait son téléphone portable, j'en conclus qu'il devait regarder son petit fils en photo.

- «Je suis vraiment désolé inspecteur»

Je n'osais pas lui demander ce qui s'était passé.

Je continua:

- «C'est votre Rosario que vous regardez sur votre téléphone?»

- «Oui, une ordure me la prit à tout jamais. Depuis sa disparition, je consacre tout mon temps à trouver sa trace et celle de son ravisseur. Cela fait plus d'un an qu'il a disparu, j'ai tellement mal. Regardez comme il est beau, le plus gentil et merveilleux de tous les petits garçons»

Il me tendit le téléphone. La photo me mit un coup de poignard dans la poitrine. Je me sentis perdre connaissance. Je le reconnus immédiatement.

Rosario était assis près de moi lors de mon accident de voiture.