CHAPITRE 9

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Le blond touillait sa cuillère dans le chocolat chaud qui était présenté à lui. Il tremblait encore un peu, secoué de sa nuit. En face de lui, Samaël lisait tranquillement sur son téléphone. Parfois, les regards se croisaient, mais ne s'accrochaient pas plus que quelques secondes. Il n'y avait ni jugement, ni honte. Le métis n'avait pas encore posé la question. Celle qu'Andy repoussait le plus longtemps possible.

— Tu dois être à l'école dans combien de temps ? demanda le cuisinier.

— Neuf heure. Le cours a été déplacé hier soir par un souci d'emplois du temps.

— Tu veux que je t'emmène ? C'est sur le chemin.

— Pourquoi pas, merci, marmonna Andy en essayant de caler son attention sur lui.

Depuis qu'il s'était réveillé dans les bras de son colocataire, il peinait à se concentrer sur ce qui l'entourait. Il n'arrivait pas à garder ses pensées et sa concentration à portée de main. Il la voyait presque s'envoler dans les volutes que formaient sa tasse. Ses yeux verts accrochaient un point et semblaient se fondre dedans tant il le fixait.

Sam le surveillait du coin de l'œil. Il connaissait ces matins, malheureusement. Ceux où Andy se refermait complétement sur lui-même, ne laissant pas l'extérieur percer la carapace qu'il s'était forgé durant la nuit. Il lui faisait presque l'effet d'un pantin qu'on articulait selon les envies, selon les opportunités. Andy ne s'en plaignait jamais. Sam le laissait seul, pour qu'il arrive à émerger de ces cauchemars. Mais cette fois ci, le cuisinier voulait l'aider en lui montrant que ce n'était pas si grave. Seulement, il n'avait aucune idée de comment faire. Il devrait sans doute mener ses recherches afin de savoir.

Une fois le mug terminé, le blondinet se leva. Les jambes tremblantes, il se stabilisa avec l'aide du bord de la table. Son mouvement avait été trop brusque, si bien que la pièce tournait un peu autour de lui.

— Tu ne vas manger que ça ? demanda Sam, inquiet. Enfin, manger est relatif...

— Rien d'autre ne pourra passer, je me connais. Excuse-moi, répliqua le blond.

« Tu n'as pas à t'excuser » voulait dire Samaël, mais Andy le savait déjà. Il le regarda alors se diriger dans le couloir, lui et sa chemise trop grande qui tombait bas sur sa clavicule.

Le blond passa rapidement à la salle de bain. Il ne voulait pas prendre sa douche, ce matin, car il allait y rester de longues minutes et faire grimper en flèche la facture d'eau. Il troqua alors la chemise contre un épais pull en laine et glissa ses jambes dans un jean foncé. Il n'avait pas la tête à trouver d'autres vêtements que ceux qui se présentaient devant lui, a moitié en train de se casser la figure du placard. Il sortit une paire de Dr Martens à semelles double pour chausser ses pieds. C'était le seul cadeau qu'il s'était fait avec sa paye, depuis qu'il avait commencé à travailler au Elio's. Il adorait ce contraste de son physique avec ces imposantes chaussures. De plus, il grattait quelques centimètres. Il noua ses cheveux en une longue queue de cheval. Ils commençaient à devenir secs et gras, alors il préférait cacher la misère par une astuce plus vieille que le monde.

— Andy ! appela Sam du pas de la porte en vérifiant qu'il avait ses papiers.

Le blondinet sortit du couloir avant d'enfiler son manteau. Le métis enroula une de ses grosses écharpes autour de son cou. Il ne voulait pas que son colocataire soit malade par une telle négligence. Les deux s'engagèrent dans le couloir, juste après que le plus jeune ai pris son sac à dos. Un vieux troué sur le bas, avec des fils qui faisaient leur vie. Ils descendirent les volées de marches, car leur immeuble était ancien. Le bois glissait un peu à cause des allers et venues de leurs voisins. Ils s'engouffrèrent dans la petite porte qui menait directement sur l'extérieur. Les places de parking étaient dans la cour, à l'abri des regards et des potentiels vols.

CaméléonOù les histoires vivent. Découvrez maintenant