chardons (19)

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dimanche,11h39, maison de Mika


- Ça te pose pas de soucis que Mika dorme avec moi certains soirs ? demande Armel en me tendant une tasse de café.

- Bien sûr que si, vos cochonneries vous les fêtes dehors ! rétorqué-je d'un ton faussement contrarié.

- Super, je savais qu'on pouvait compter sur toi, rie Armel.

- Évidemment Mika, que tu peux t'incruster dans notre appart' qui est à la base le tien. C'est tordu comme histoire ?! pouffé-je.

Armel me fait un câlin puis va se rasseoir à côté de son copain sur le canapé. J'avais peur qu'il me lâche pour s'installer avec Mika ailleurs, mais il m'a rassuré sur le fait que ce dernier étant étudiant en médecine, cela lui arrive de dormir à l'hôpital, et que dans ces moments là notamment, il voulait que je sois avec lui. Y'a juste un truc qui m'échappe.

- Mais du coup, cette maison est la tienne ? demandé-je à Mika.

- Oui et non... En fait, avec mon ex, on l'a, en quelques sortes, racheté à ma famille puisque ma grande tante était décédée. Mais comme je ne suis plus avec lui, je vais la rendre à ma famille.

- Ah je vois, pouffé-je.

J'adore Mika, il est super drôle. Et en plus c'est un grand fan de sport, comme moi. Armel a vraiment eu de la chance. Mika dit qu'il sait qu'il est gay depuis qu'il a trois ans, et qu'il voulait se marier avec le prince dans Cendrillon à la place de Cendrillon elle-même. Pourtant j'ai encore du mal à croire qu'on puisse le savoir si tôt... Pour moi, on le découvre en même temps que la puberté.


Armel nous raccompagne, Aymée et moi, jusqu'au domaine. Il m'a annoncé qu'il travaillera encore mercredi et sûrement ce week-end s'il ne trouve personne pour le remplacer. Ça m'arrangerait de quitter le domaine un maximum possible. Bon, même si Aymée m'a promis qu'elle y resterait mercredi et qu'elle m'hébergerait ce week-end si je me retrouve seule. Mes parents devraient venir dans le coin si les affaires marchent bien.


lundi, 9h02, vignes


Plus que deux semaines et je suis libérée de cet enfer ! Enfer utile, toutefois. Grâce à ce job d'été je me rends compte ce que représente l'argent. Il faut suer, se casser le dos et discuter avec des gens géniaux pour mériter un salaire. Avec ma petite paye, qui s'élève quand même à plus de 1000 euros, je promets de ne faire que des choses qui me rendent heureuse ou d'acheter que des trucs qui en valent la peine. Tout en restant raisonnable bien sûr ! Et en économisant pour l'avenir... Bon en gros je vais pouvoir me faire quelques sorties et quelques achats sans compter mais ça n'ira pas au delà. A l'année prochaine de recommencer un mois de travail pareil. Il faut bien que je rêve un peu de cette liberté que je vais retrouver dans 12 jours, sinon je m'ennuie... Arracher feuilles des deux mains, vérifier pas de chardons ni de plantes grimpantes, passer au pied suivant, arracher feuilles d'une main car l'autre supporte ma fatigue en s'appuyant sur ma cuisse, arracher mauvaises herbes et continuer pendant encore 3 heures. A la vue d'un chardon,en apparence inoffensif, une métaphore est apparue dans mon esprit.Ce jeune chardon avait l'air dépourvu d'aiguilles, alors j'ai approché ma main. Je sais bien qu'il faut les arracher par leurs racines et pourtant j'ai pris le risque de tirer sur le haut de la plante comme il m'apparaissait pas dangereux. Résultat, ses épines ont transpercé mon gant et m'ont piquées la peau. Malgré qu'on m'ait prévenue et ce que je me suis dit, j'ai quand même tenté de l'arraché par le haut, et je me suis fait mal. Alors pour ne plus souffrir je dois le déraciner par le bas et le laisser se décomposer sur le sol. Ensuite, j'aurai encore un petit peu mal à la main, mais le temps me guérira. Ce chardon a des piquants, alors à chaque fois que j'essaierai de le toucher, je me ferai mal. Cette histoire me fait penser à une autre histoire... Le chardon est Loïs, les épines sont ses actions et ma douleur à la main est ma peine de cœur. Je me suis attachée à elle sans me méfier et j'ai fini blessée ; car ces gens là agissent telles des épines pour leurs victimes et ne changent pas à moins qu'on les leur enlève une par une.

Au domaine d'amourOù les histoires vivent. Découvrez maintenant