parcelle privée (4)

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Je suis actuellement en train de laver mes couverts. Je me sens un peu coupable car je n'ai rien amener à partager ce matin ni ce midi. En même temps je n'ai pas de moyen de locomotion puisque j'aurai 18 ans en octobre. Mais Armel a une voiture, donc quand il viendra me chercher mercredi, je lui dirai de m'emmener d'urgence faire des courses. Rodolphe m'avait dit qu'au domaine ils s'occuperaient de tout pour moi, alors je suis venue les mains dans les poches. J'aurai du appeler moi même Vaneck et lui demander de quoi je devais m'occuper (comme les draps...).

- Tiens ma belle, tu cherches le torchon ?

Aymée m'a fait sursauter. J'étais perdue dans mes pensées alors je n'avais pas vu que je lavais ma fourchette depuis un quart d'heure. Après avoir tout essuyer, je sors dehors pour reprendre ma place dans le camion. Au moment de monter, j'entends une voix dans mon dos.

- Maelle, j'ai besoin de toi au domaine cette après-midi. dit Loïs d'un ton neutre.

Je croise le regard d'Aymée – qui fronce les sourcils – avant de me retourner vers la fille du patron.

- Tu peux y aller Seb. ordonne t-elle.

Seb démarre et les autres camions quittent à sa suite la propriété.

- Sans vouloir t'offenser, vu dans l'état que je suis ; je ne vais pas t'être très utile... dis-je en concentrant toutes mes forces dans mes jambes pour ne pas m'écrouler par terre.

Veut-elle me punir d'avoir un peu merdé ce matin ? Et l'indulgence envers les débutants elle connaît ? Je peux à peine tenir debout tant j'ai mal partout. Cette fille commence à m'agacer.

- Je suis sûre que tu seras parfaite pour cette mission.

Elle me regarde avec son petit air amusé. Sauf que moi je ne m'amuse pas du tout en ce moment même !

- Suis moi.

Tout comme hier soir, je la suis en silence. On contourne la maison pour arriver au jardin privé. Je n'avais pas vu qu'il y avait cette grande piscine... J'ai comme un pressentiment. On contourne le potager et un espace d'herbe pour arriver devant la petite parcelle privée. Oh nan...

- Ce sont les vignes qui servent à faire nos bouteilles personnelles. Et tu vas les effeuiller.

Je ne réponds rien,regardant ce à quoi je vais devoir consacrer mes derniers efforts avant de mourir, littéralement. Les grands crus ce matin, le jardin privé du patron cet après-midi. Quelqu'un leur dit que je suis une débutante, ou je le fais ?!

- Fais pas cette tête. Ces vignes ont besoin d'être chouchoutées ; et avec tes p'tites mains douces ce sera impeccable. dit-elle en me regardant intensément.

Je m'avance vers la première rangée.

- Côté gauche des rangées si tu commences par là.

Loïs semble lire dans mon esprit ou quoi ! Je me mets en position, prête à démarrer.

- C'est ta bouteille ? demande t-elle avec ma gourde dans les mains.

- Oui.

Elle en boit deux gorgées avant de me la lancer.

- Bois, sinon tu vas pas faire long feu vu la chaleur. me prévient-elle avec un clin d'œil.

Je bois puis repose ma bouteille à l'ombre d'une rangée. Elle est sacrément pas gênée cette fille !

- Courage. lance t-elle avant de s'en aller.

Génial, je suis seule au monde. Dans le domaine du boss, qui plus est, peut voir à tout moment ce que je fais. J'enfonce mes écouteurs dans mes oreilles et lance une playlist d'Angèle sur Spotify. Loïs ne méprise pas les employés, elle se croit juste tout permis par moment.

Au bout de deux heures je m'arrête pour boire de l'eau et manger ma barre de céréale. J'entends des éclats de rire et de l'eau qui gicle. Ma maudite curiosité m'entraîne à me hisser sur la pointe des pieds pour regarder ce qu'il se passe au loin. Dans la piscine je vois Loïs et un gars (pas Barthe) chahuter et s'éclabousser d'eau. Puis ils commencent à s'embrasser ; le gars pose ses mains sur les cuisses de Loïs et il la hisse sur les siennes. Ils vont vraiment faire ça là ?! Je détourne le regard et me replonge dans mes occupations. Loïs aime bien jouer avec les gens on dirait...

A17h je me redresse. Je n'ai pas fini ma rangée mais tant pis, je continuerai demain. Je sors de la parcelle, shootant sur les feuilles que j'ai arraché. Loïs est en maillot de bain, près de sa piscine, mais je continue sans m'arrêter. Pourquoi je m'arrêterai de toute façon ? Quand j'arrive dans la cour, juste devant l'entrée de la maison, Aymée vient s'affaler contre moi.

- Ça a été ? J'en peux plus moi. gémit-elle.

- Pas terrible non plus. je réponds en m'écartant d'elle.

Elle est gentille mais elle dégouline de sueur. Accompagnées des gars, on entre dans le camp. Quand on arrive dans notre chambre, on a une drôle de surprise... Le vieux et gros chat est paisiblement allongé sur mon lit.

- Mousse, va t'en d'ici ! gronde Aymée en poussant doucement le chat hors de la chambre.

La phrase de ce matin me revient en mémoire...

- Le bon dieu t'a puni pêcheuse ! rit ma colocataire.

- Pourquoi tu dis ça ? demandé-je, paniquée.

- Sens les draps tout propre que t'a gentiment amené Carole.

Je me penche sur mon lit et constate avec horreur qu'ils sentent la pisse de chat.

- Merde ! m'écrie-je.

- Ce vieux mousse est incontinent quand il se pose sur quelque chose de mou. D'où le fait que je t'ai dit de toujours fermer la porte.

Bon sang ! J'enchaîne les conneries moi ! Tant pis, je ferai face à mes responsabilités ce soir. Pour le moment, la tribu m'emmène dans un bar.

Au domaine d'amourOù les histoires vivent. Découvrez maintenant