Je regardais le paysage défiler depuis une trentaine de minutes. La nuit était tombée et n'empêchait pas les passants de déambuler dans les rues de Séoul. Les élèves sortaient de leur cours du soir, quelques couples mangeaient au restaurant, des bandes d'amis faisaient les magasins, certains rentraient simplement du travail après une journée chargée. Cette population active se retrouvait dehors à la même heure et créait une marée humaine dans tous les quartiers par lequel mon taxi avait roulé. Le trajet depuis la gare n'était pas censé être long, mais à cette heure les bouchons proliféraient.
L'attente s'éternisait. Le siège de la Kia avait beau être confortable, je n'étais pas patient de nature. À mesure que les secondes défilaient sur ma montre, les battements de mon cœur s'accentuaient. L'excitation mêlée à l'appréhension ne m'aidait en rien, et si j'avais pu contrôler mes émotions jusque-là, je devinais atteindre mes limites.
Mon chauffeur ne semblait pas le moins du monde dérangé par le trafic. Le compteur tournait toujours à son plus grand bonheur, satisfait de me tirer un peu plus de billets que prévu. Ce n'était pas ce qui me dérangeait à proprement parler, il faisait son travail après tout.
Le problème, c'est que je n'allais certainement pas rester ici pendant une heure alors que ma destination se trouvait à quelques pâtés de maison.
Par chance, nous étions sur la file de droite. Le nez collé contre la vitre, je repérai une place qui s'était libérée et demandai au chauffeur s'il pouvait s'y garer. Il m'assura que nous étions bientôt arrivés, mais je lui tins tête en lui lançant que je me débrouillerais, mes paroles accompagnées par un énorme sourire. Il m'observa d'un air réprobateur tout en grommelant et activa le clignotant.
Je lui tendis rapidement les billets nécessaires et n'attendis guère qu'il me rende la monnaie. J'attrapai l'étui de ma guitare, posé sur la banquette, et sortis du véhicule. Je patientais en face du coffre et le chauffeur secoua la tête en notant que je trépignais sur place tel un enfant. Si cela ne tenait qu'à moi, j'aurais sorti mes bagages, mais ce n'était pas très poli de lui faire comprendre qu'il était un peu lent.
J'ajustai nerveusement les bretelles de mon étui et remerciai vivement le chauffeur lorsqu'il me tendit mes deux sacs de voyage, me penchant en avant. Un léger sourire apparut sur son visage en me voyant faire, puis il s'installa dans sa Kia grise après m'avoir salué. Je la fixai un long moment, redémarrant et se fondant dans la masse compacte d'autres centaines de voitures.
Je me tournai vers les passants. La foule ne diminuait pas, au contraire. Je fronçai les sourcils à l'idée de m'y jeter, bien qu'obligé pour rejoindre une rue adjacente. Je serrai fermement l'anse de mes deux sacs et rejoignis sans grande peine l'autre partie du trottoir.
Je parvins à dépasser l'angle de l'avenue et tournai à droite. J'aurais bien voulu en apprendre plus sur Séoul, en observant ses habitants, ses quartiers, ses temples, ses commerces, mais cela serait pour une autre fois.
J'avais déjà perdu assez de temps.
Je n'avais jamais marché le long de ces maisons traditionnelles, néanmoins, c'était tout comme. Hoseok m'avait indiqué le chemin à plusieurs reprises et je me rendais enfin compte à quel point il pouvait être précis dans ses descriptions. Je reconnus l'épicerie installée aux côtés d'un fleuriste ainsi que le parc situé sur la place d'en face. Les vieilles bâtisses tenaient tête aux immeubles resplendissants, qui avaient immergé à Séoul suite au ravage de la guerre. Elle faisait partie de mon histoire puisqu'elle avait poussé ma famille à quitter le pays pour un autre, et encore plus dans celle des résidents de Séoul. Je n'avais jamais cherché à savoir à quoi ressemblait la capitale, je me l'imaginais comme une ville quelconque, mais ce n'était pas le cas. La modernité réparait les méandres du passé et la tradition subsistait pour ne pas l'oublier.
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ROSE PERLE ✧ JIKOOK (TOME 2)
FanfictionEn retournant en Corée du Sud, je ne m'attendais clairement pas à être si réceptif au choc culturel que je m'apprêtais à vivre. Je me noyais peu à peu dans mille et une pensées, de néfastes illusions qui me brouillaient l'esprit, nourries par les re...