⚜ Chapitre 55 : Céleste de Ligueux ⚜

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Duché de Ligueux, mois de juillet

Céleste

- Asseyez-vous donc. Voulez-vous un petit rafraîchissement ? proposa Margot de Ligueux en se tournant vers une table.

- Avec plaisir, acquiesça Milady en s'avançant vers elle. Il fait si chaud ici !

- Plus qu'à Paris ? s'étonna notre hôtesse en servant trois verres de vins, comme si de rien n'était. Il me semblait que les canicules de la capitale était terribles, mais peut-être cela a-t-il changé ? Après tout, cela fait bien longtemps que je n'y suis pas allée...

- Pas depuis que vous m'y avez abandonné, vous voulez dire ? laissai-je tomber.

Milady et la duchesse se figèrent. Finalement, ce fut cette dernière qui se reprit le plus rapidement en tendant un verre à ma compagne, et en se tournant vers moi avec deux autres dans les mains.

- Exact, fit-elle. Je n'y suis pas retourné depuis.

- Si ça avait été le cas, aurais-je eus le plaisir de votre visite ? assenai-je, d'un air froid et d'un ton encore plus glacial.

Elle me tendit un verre, mais je la fixai dans les yeux, attendant sa réponse.

- J'avais demandé à ma sœur de ne pas me révéler l'endroit où elle vous avait laissé, finit-elle par dire. Je ne voulais pas être tentée d'aller vous récupérer...

Milady but son verre d'une traite, et le reposa un peu violemment sur la table, nous faisant tourner la tête vers elle.

- Je vais mieux, je vais vous laisser. Il fait presque froid, ici, maintenant... dit-elle stoïquement.

Elle se dirigea vers la porte, qu'elle referma derrière elle, me laissant seule avec cette femme. Ma mère. Je me tournai vers elle. Elle me regardait avec attention, cherchant je ne sais quoi en moi, sur mon visage.

- Pourquoi ? soufflai-je doucement.

- Pourquoi quoi ? Pourquoi vous ai-je abandonné ou pourquoi n'ai-je pas voulu retourner vous cherchez ?

- Expliquez-moi tout ! ordonnai-je.

Margot de Ligueux me jaugea du regard en hochant doucement la tête. Je l'observai alors avec plus d'attention. Ses cheveux parsemés de mèches grises étaient regroupés en un chignon serré, lui donnant un air sévère, que ses traits fins ne faisaient qu'accentuer. Ses grands yeux verts laissaient transparaître une âme dure, implacable, mais pure et juste.

- Vous devriez boire un peu, me conseilla-t-elle.

- Cela ne servirait à rien, fis-je en m'asseyant à la table à côté de nous, je tiens particulièrement bien l'alcool.

Margot eut une moue aigre en posant les deux verres en face de nous.

- Vous ne tenez pas cela de votre père, alors, gronda-t-elle.

Elle hésita peu, et s'assit finalement en face de moi, étalant sa simple robe pourpre autour d'elle, me regardant dans les yeux. Je lui tendis la lettre de sa sœur, dont elle brisa le sceau et qu'elle commença à lire. Elle la posa ensuite soigneusement à côté d'elle, et j'avisai que ses mains, bien que fines et pâles, étaient abimées. Margot de Ligueux travaillait-elle donc la terre et la vigne avec ses gens ? 

- J'avais vingt ans, lâcha-t-elle. Je venais de me marier, car mon dernier frère était mort. Le duché était à moi. C'était moi qui le dirigeais, mon père m'ayant tout appris. J'avais espéré, avec ma dot, faire un bon mariage : un noble méritant réellement son titre...

L'Espionne du Cardinal - Livre IOù les histoires vivent. Découvrez maintenant