Paris, mois de mars
Céleste
Plusieurs jours avaient passés. Je gagnais la confiance de la reine un peu plus chaque jour, mais pas encore assez pour qu'elle puisse tout me confier. J'avais revu les mousquetaires, et je commençais peu à peu à cerner leurs caractères. Athos semblait toujours mélancolique, d'Artagnan était fougueux comme un cheval, Porthos riait toujours mais avait une petite étincelle triste au fond du regard. Et Aramis... Aramis me faisait beaucoup d'avances. Je m'en amusais, lui répondais parfois, mais il ne m'avait pas encore embrassé, et encore moins touché !
J'avais aussi fait la rencontre des trois autres dames de compagnie de la reine. La première, Charlotte, n'aimait ni la reine, ni Constance, mais avait pourtant été polie avec moi, appuyant bien sur mon appellation de « comtesse » quand elle me parlait. La seconde, Diane, se taisait, et obéissait. Elle ne donnait jamais son avis sur rien, mais regardait toujours Constance avec un air agacé ou craintif. Enfin, la troisième, Louise, m'avait gentiment sourit, et parlait avec beaucoup de douceur à Anne et Constance. Elle m'avait paru la plus sympathique des trois.
Quelques jours plus tôt, le roi avait annoncé qu'il organisera une grande fête et un bal pour fêter l'équinoxe de printemps. La reine avait froncé les sourcils en recevant cette nouvelle, pensant peut-être aux pauvres gens qui mourraient de froid dehors, mais n'avait dit un mot. Elle s'était au contraire empressée de nous commander des robes, à Constance, elle et moi. Le grand soir était arrivé, et nous étions en train d'aider la reine à essayer sa robe d'or et de nacre quand elle nous désigna deux sublimes tenues qui attendaient non loin.
- Constance, fit-elle, je pensais que le vert vous conviendrait. Quand à vous, Colombe, je ne connaissais pas vos choix, alors j'ai pris une simple robe bleue nuit...
Une simple robe ? Celle que me présentai la reine était bien plus belle que n'importe de mes anciennes robes au palais-Cardinal. Constance devait apparemment penser la même chose, car elle ne quittait pas des yeux la sublime robe vert mousse qui s'étalait devant elle. Nous nous habillâmes, puis Constance me coiffa distraitement. Soudain, au milieu de nos discutions nonchalantes sur les tissus, la reine changea de sujet :
- Savez-vous si les mousquetaires seront là ? demanda-t-elle d'un ton de celle qui ne pose cette question que par politesse.
Mais je voyais que dans ses yeux, elle brûlait d'envie de connaître la réponse. Pourquoi donc ? Décidément, ces deux femmes qui m'entouraient avaient encore bien des secrets qu'elles refusaient de me confier... Les fins doigts de Constance se crispèrent dans mes cheveux, m'arrachant une petite grimace. Mais que leur prenaient-elles ?
- Oui, comme représentants des armés, murmura notre amie. Il y aura Tréville, Athos, Porthos, Aramis et d'Artagnan.
La reine frémit, puis releva les mains vers sa coiffure déjà parfaite. Je fronçai les sourcils, et Anne intercepta mon regard par son miroir.
- Notre sécurité sera donc assurée, fit-elle, comme si elle se cherchait des excuses pour expliquer son intérêt envers les mousquetaires.
Richelieu et moi-même n'en avions peut être pas encore conscience, mais j'avais déjà l'impression que je venais de me plonger dans un nid de vipères, où chaque reptile n'était en réalité que mensonges et secrets.
- Assurément, Votre Majesté, fit Constance en finissant de mettre des perles dans mes cheveux.
Nous entendions déjà de la musique venir de la salle de bal. Cet hiver avait été particulièrement rude, peut que les gens profitaient de cette fête pour prier pour des jours meilleurs... Même si tous les invités ici n'étaient que des nobles ayant passé l'hiver bien à l'abri.
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L'Espionne du Cardinal - Livre I
Fiksi Penggemar« Faîtes attention. C'est quand on commence à vouloir des choses, ou à les refuser, qu'on se met en danger, ici. » Paris, XVIIème siècle Céleste n'est pas une jeune femme comme les autres. Et pour cause... Du haut de ses vingt-cinq ans, elle est la...