Moi, Ombre

Chapitre Dix-Huit

Le lendemain matin, Leo et moi descendons, confiants, main dans la main, au rez-de-chaussée de l'auberge, quelques minutes avant l'aube.

Le propriétaire des lieux est déjà derrière le comptoir, en train de préparer je-ne-sais-trop-quoi dans une petite marmite. Il relève la tête et nous sourit lorsqu'il nous sent arriver.

- Je vous en prie jeunes gens, asseyez-vous, nous invite-t-il en nous désignant deux tabourets devant lui. J'aimerais vous donnez quelques conseils avant que vous ne partiez.

Puisque nous avons un peu d'avance, nous acceptons. De plus, aussi récents que nous sommes, nous ne pouvons laisser passer une occasion d'en apprendre plus. Il nous faut connaître notre nouveau monde au maximum si nous souhaitons y survivre.

Nous prenons place au bar, face à lui, attentifs à ses paroles. C'est généreux de sa part de nous conseiller. Les créatures de l'Ombre ont plutôt mauvaise réputation, rares sont ceux qui accepterons de nous aider dans ce monde.

- Nous n'avons pas beaucoup de temps, je ne pourrais vous transmettre toute mon expérience, mais j'espère vous en dire suffisamment pour vous éviter quelques malheurs. Tout d'abord, je veux vous mettre en garde contre les bâtiments privés en ville. Je ne sais pas comment c'est dans les autres parties du globe - j'imagine que ce n'est pas très différent d'ici - en tout cas à Hok-Loa, les habitants ont pour habitude d'user de leur pouvoir pour attirer les voyageurs chez eux afin de les faire tomber sous leur contrôle. 

Je hausse un sourcil, intriguée. Les gens sont donc fourbe à ce point là-bas ? Décidément, je ne suis pas rassurée à l'idée d'y aller. Je compte trouver mes réponses rapidement puis fuir au plus vite. Nous vivrons en dehors des villes Leo et moi : nous y serons plus à l'aise.

- Une fois que vous êtes entrés, ils utilisent des méthodes très variées pour vous  retenir prisonniers... Les uns ont piégés leur demeure, faisant disparaître la sortie aussitôt que vous êtes entrés. D'autres sont passés maîtres dans l'art de vous charmer, ou vous hypnotiser. Certains encore tenteront de vous empoisonner. Et j'ai même eu vent qu'un yéti dans le centre avait trouver le moyen de se téléporter avec vous, contre vote gré. Il emmène ses victimes au sommet d'une montagne, où il a aménagé son antre dans une grotte. Il s'en sert comme garde-manger : après vous avoir emprisonner dans la glace, il repart, attendant d'avoir un creux pour revenir vous dévorer. 

Il cherche clairement à nous effrayer. Il n'en est pas moins sincère pour autant.

- La plupart des gens se faisant piéger sont en réalité vulnérables car ils sont blessés et cherchent à tout prix un abri pour se régénérer en sécurité. Si cela devait vous arriver, préférez aller vous cacher à l'extérieur des villes de l'Ombre. Le mieux, en cas de dommages sévères, c'est de se réfugier dans un endroit isolé.

J'acquiesce, enregistrant un maximum d'informations. Le moindre détail pourrait un jour nous être utile. 

- Comment se fait-il que vous nous aidiez ? Se méfie Leo, me coupant dans ma réflexion.

Le sorcier soupire, sûrement lassé qu'on doute toujours de sa bonté. Mais je ne peux en vouloir à Leo d'avoir posé la question : l'Ombre alimente son âme.

- Je fais partie d'une association mondiale visant à aider les récents comme vous. Un jour, en Inde, je me suis retrouvé dans une fâcheuse position et ma seule chance de survie était de jurer allégeance à Hapshata. On m'a fait promettre sur mon sang et mon Ombre qu'une fois de retour chez moi, j'ouvrirais un établissement pour aider les récents et que je rejoindrais le collectif. Je n'avais pas le choix. Je suis membre de l'organisation depuis 60 ans maintenant et j'ai sauvé un paquet de monde.