Leo est resté chez moi jusque vers une heure du matin. Il a exploré ma chambre, me découvrant lentement. Nous avons passé des heures à parler de tout et de rien. J'ai ri. Un rire sincère, comme il s'en élève rarement de ma gorge. Je l'ai laissé retirer les voiles du mystère qui m'entourent toujours. Et, peu à peu, au fil de la nuit, il a découvert celle que j'étais vraiment. Loin de le faire fuir, cela l'a, au contraire, fait sourire. Il était heureux de me voir, pour une fois, sans les artifices psychologiques de la popularité.
Après minuit, il s'est enfui en catastrophe, car mes parents venaient de rentrer. Se métamorphosant en loup au milieu de la pièce, il a fait un bond spectaculaire à travers le trou béant qui était autrefois une vitre de verre et a disparu dans la nuit.
Un problème se pose à présent : mes parents vont monter, vérifier si je dors et l'état de mon ex-fenêtre ne pourra pas leur échapper, ne serait-ce que par la fraîcheur qui se déverse dans la pièce. Il me faut une explication qu'ils accepteront. Je me suis énervée et que j'ai frappé la vitre ? Pourquoi pas, mais mon poing est dépourvue de blessure, et même si j'avais utilisé un objet, l'on voit bien qu'elle a été brisée de l'extérieur. Le gamin d'en face qui a jeté des pierres ? À moins qu'il s'appelle Hercule, c'est peu probable qu'il y parvienne. Un cambrioleur ? Il y aurait TROP à inventer pour que ce soit crédible. Prétendre l'ignorance ? Vu le bruit que cela a produit, même avec le sommeil lourd, c'était immanquable.
LEO SÉRIEUX LA PROCHAINE FOIS TOQUE À LA PORTE ! Vite ! Une idée !
J'entends des pas dans les escaliers puis la poignée de ma porte. Je fais volte-face. J'ai un plan, mais ça ne sera pas évident. Espérons seulement qu'il ne foire pas.
Mes deux parents entrent dans la pièce. Il remarque immédiatement la catastrophe. Il me cherche du regard, paniqués. Assise sur la chaise de bureau, j'établie le contacte visuel. Ensuite... je les hypnotise.
Je n'ai jamais fait cela auparavant. Mes pouvoirs de vampires font effet puisqu'ils ne posent aucune question, affichent un sourire béat en promettant d'appeler le magasin demain pour la remplacer et retournent dans leur propre chambre main dans la main.
Eh bien, je trouve que je m'en suis plutôt bien sortie ! Être vampire, ça a dû bon ! Je m'affale sur mon lit et attends l'aube.
J'arrive au lycée en courant. Je prends une vitesse humaine peu avant d'arriver et me précipite dans le garage à vélos. C'est à peine si je ne me jette pas sur Leo.
- LEO SAENE JE T'INTERDIS D'UN JOUR RETOUCHER À MES FENÊTRES !
Il se tourne vers moi, à deux doigts d'exploser de rire. Les gens autour de nous nous dévisagent, cherchant le scoop et le début de cette histoire croustillante.
- T'as fait comment ? me chuchote le lycan.
- J'ai dû les hypnotiser figure-toi !
- Une vraie vampire dis donc.
Nous parlons à voix basse pour que personne n'intercepte ces propos compromettants.
- Je te jure que si tu recommences je...
Il s'éloigne en souriant, faisant fi de mes menaces. Je le rattrape.
- Non mais tu m'écoutes au moins ? Je te reparle que c'est toi qui a explosé ma fenêtre quand même !
- Évidemment que je vous écoute, Votre Altesse.
Je lui donne un coup de poing ridicule dans l'épaule alors que je comprends qu'il se moque de moi. Il fait semblant d'être blessé et nous entrons dans le bâtiment principal en nous chamaillant comme des enfants.
En plein cours, Leo (assis juste à côté de moi suite à quelques échanges de place que j'ai ordonné) se met à gigoter sur sa chaise. Je l'interroge du regard.
- La lune. C'est la nouvelle lune cette nuit. Nouvelle lune qui achève la décroissance de la lune. Elle va maintenant être croissante. La croissance de la lune conduit à la pleine lune : nuit des lycans par excellence.
- La nouvelle lune, c'est quand on ne la voit pas ?
- Oui. C'est le contraire de la pleine lune, me répond-il.
- Tu dois vraiment suivre toutes ces histoires de cycles lunaires ?
Il hoche la tête.
- Malheureusement, oui.
- Et moi qui me plaignais d'avoir mes règles...
Il étouffe un rire.
- Ce n'est pas vraiment pareil.
- Ce sont des cycles menstruels qui font royalement chier. Ça me suffit pour faire la comparaison.
Nous échangeons un regard et nous mettons à rire. La prof nous foudroie du regard, mais nous ne pouvons nous arrêter. Un fou rire comme j'en ai rarement eu. Bientôt, elle ramasse nos carnets sous les regards surpris des autres élèves.
Nous essuyons nos larmes. Et ça fait du bien de rire autant.
À midi, nous échappons discrètement à la cantine. Mes amis remarqueront bien notre absence, mais je m'en moque. Ils croient déjà que nous avons couché ensemble et que c'est ainsi que Leo a cassé ma fenêtre, alors une fois de plus ou de moins...
Réellement, nous sommes actuellement sur le toit... en train de comparer le cycle des règles et celui de la lune. Les différentes étapes étalées sur du papier, Leo a été obligé d'admettre qu'il y a des similitudes. Bon, il se peut qu'ensuite, il ai sorti un briquet pour effacer les preuves. D'une, pour que personne ne tombe sur des vérités sur les créatures surnaturelles qui hantent le monde et de deux parce qu'il en avait marre de me voir établir des théories qui l'humiliait profondément dans sa virilité.Sauf que dans la précipitation, il a aussi brûlé sa veste posée par terre. Nous avons éteint le feu, mais au vu du trou qu'arbore son vêtement, il peut le jeter.
Je me moque encore de lui lorsque nous redescendons.
- C'est le karma qui agit ! T'as défoncé ma fenêtre, ta veste en a payé le prix !
Il souffle, exaspéré.
Au bas de l'échelle, il se laisse tomber par terre puis m'invite à en faire de même en me tendant la main. Je saute dans ses bras et nos visages se retrouvent tout à coup très proches. Il replace un de mes mèches derrière mon oreille et... DRIIIIIIIIIIIIING ! La sonnerie nous interrompt. Nous nous écartons et courons rejoindre notre cours.
Je ne peux m'empêcher de me demander « Et si la sonnerie n'avait pas retenti ? ». Nous serions nous embrasser ? Je ne l'aurais certes pas empêché...

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Moi, Ombre
ParanormalLe monde de l'Ombre. Toute une civilisation cachée sur la même planète que les humains. Les créatures surnaturelles que l'on croit imaginaires ont leur propre société. Un lieu où règne cruellement la loi du plus fort. Iris n'a que 17 ans. Elle vient...