Chapitre 5 : Convoquée

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                                 PDV Lisbeth

-Attends... Donc en plus d'un contrôle... On avait un devoir à rendre pour aujourd'hui ?! me suis-je écriée.
-Je te l'ai dit 200 fois en messages, j'ai même essayé de te joindre tout le weekend. dit Henry.
-Oui, c'est bon, me fait pas la morale. Ma mère s'en est déjà chargée ce matin. Encore heureuse que ma migraine soit partie.
-T'en as pas marre de faire la fête 24h sur 24 ? me demanda-t-il.
-Jamais. Faut vivre la vie à fond, affronter toutes ses peurs, prendre un maximum de risques. C'est comme ça qu'on se débarrasse de tout type de frayeur.
-C'est si mal que ça, d'avoir un peu peur ? demanda Henry.
J'eus un frisson, me rappelant soudainement la mission désastreuse à Oseron, la solitude face à Deus dans ce monde sombre, la mort d'Euthania. Mes muscles se contracterent. Je me suis fait violence :
-La peur paralyse. Et dans la vie, quand tu ne peux pas bouger, c'est la mort assurée. Dans toutes les situations.
Il a compris que j'étais sérieuse.
Henry et moi, c'est une amitié qui dure depuis plus de 8 ans. Il a toujours été une victime, en vrai. Un peu chétif, avec de bonnes notes et un style vestimentaire approximatif, on aurait dit qu’il criait « harcèle-moi ». La seule barrière à ce cri, c’est moi. Lui, 1m67, 16 ans, QI de 151, 18 de moyenne et 48 kilos, constamment protégé de ses bourreaux par moi, 1m 82, géante de la classe, 16 ans, au QI que j’ai la flemme de calculer, 11 de moyenne à tout casser, 72 kilos, bientôt 73.
-Tu veux copier sur moi ? me demanda-t-il.
-Non, flemme, je dirai juste à Richie que je n’avais pas la foi de le faire, en plus de réviser.
-Tu devrais éviter d’appeler les profs par leur prénom.
-Ca va, on est entre nous.
-Tu le fais meme en face d’eux.
-Ils ont des prénoms, c’est pour qu’on les utilise.
-Sérieusement, Lisbeth, tu es au bord du renvoi définitif.
-Je ne me ferai jamais renvoyer définitivement. Tu as oublié qui était mon frère ?
-Oui, mais…
Soudain, la voix du proviseur a retenti dans les hauts parleurs du couloir : « Lisbeth Campbell, vous êtes priée de venir dans mon bureau séance tenante ». J’ai regardé Henry en me levant :
-Tiens, voila une occasion de te rappeler pourquoi je ne serai surement jamais virée de cet endroit. Viens avec moi.
-Je suis pas sur que j’aie le droit…
Je lui ai lancé un regard ennuyé et lassé :
-Même s’il ne voulait pas, dès que Blake se pointera, il ne dira plus rien.
-Qu’est-ce qui te rend si sure que ton frère a été convoqué ? me demanda Henry.
Sa naïveté me fit légèrement sourire. Je l’ai pris par le bras et je l’ai amené avec moi dans le bureau du proviseur.
-Parce que c’est Blake. Ai-je dit, ça me semblait tellement évident.
Et donc on était en train de se précipiter vers le dit bureau quand on est tombé sur des étudiantes, et des étudiants, qui avaient l'air sous le choc. Complètement émerveillés.
-Apparemment il est déjà là. ai-je dit en levant les yeux au ciel.
L'atmosphère devint bizarre, elle se réchauffa, tout devint plus lumineux. L'effet Blake. Totalement l'inverse de l'image qu'il donnait il y a cinq ans. J'ai croisé ma prof d'espagnol, elle avait des étoiles dans les yeux :
-Mademoiselle Campbell, votre frère est la... Il est... Il est...
Mon prof de russe, lui aussi totalement hagard, s'arrêta à notre niveau et finit sa phrase :
-Il est... Waouh. Vraiment Waouh.
-Oui, merci, je sais. ai-je dit
Et nous sommes arrivés devant le bureau, j'ai frappé à la porte parce que j'avais encore une once de courtoisie et de politesse en moj, et je suis entrée directement. Pour tomber sur monsieur Higgins, le proviseur, tout sourire face à mon frère.

Il faut dire que l'apparence de Blake avait changé au fil des années. Il avait perdu du muscle, était plus élancé, ses traits plus fins, il portait un costume blanc, ses cheveux noirs étaient coiffés, ses yeux noirs de jais brillaient d'une lueur chaleureuse, sa peau avait perdu de son bronzage, mais restait quand même légèrement tannée, il avait des petites fossettes. Il était lumineux. Constamment lumineux. À côté de lui, on ressentait une douce chaleur nous envelopper, un élan d'affection et de  bienveillance impossible à refréner. Il a appris à complètement dissimuler ses instincts de berserker, de même que ses marques, en apparaissant constamment en costume en public. Après tout, il était Blake Campbell, 23 ans, PDG de Beyond Industries, un conglomérat qui valait bien une quarantaine de milliards de dollars.

Le Blake Campbell qui a créé son entreprise et était devenu milliardaire à peine 20 ans. Celui qui fait constamment la couverture du magazine Forbes, qui est invité à toutes les soirées huppées, tous les dîners, les galas, celui qui découvre toutes les avancées scientifiques, technologiques, qui devrait bientôt dépasser tous les records selon les pronostics. Un jeune homme influent, qui a tout Minneapolis dans sa poche, charismatique et bienveillant avec une telle aura. Normal que personne ne puisse lui résister. Et honnêtement, je trouve ça extrêmement énervant. Il passe tout son temps à travailler, à travailler, que ce soit en tant que Chaos ou en tant que Blake, nous n'avons plus que notre déjeuner du mercredi à nous. Et ça me frustre.
-Oh, mais voici donc notre exquise invitée. Quelle était votre raison de la convoquer déjà, monsieur le proviseur ? dit Blake.
-Une broutille concernant son professeur de sport, concernant un comportement insolent. Mais ce n'est rien, monsieur Campbell. Continuez donc de parler de ce nouveau country club, c'était très intéressant. dit Monsieur Higgins en balayant le sujet de la main, signifiant que notre présence à Henry et à moi n'était plus nécessaire.

Donc on est sortis et là j'ai regardé Henry de rendre compte. Voilà le résumé de ma vie lycéenne. Dans ma classe, à cause de ma taille et de mon apparence, j'étais une ovni. Exclue de tous les groupes, habituée à sortir et faire la fête avec des universitaires, défendant Henry contre ses bourreaux, et faisant tout pour ne pas remarquer qu'il est complètement à fond sur moi. Je ne pourrais lui apporter que de la douleur, et des ennuis de toute façon. Et tout ça en jonglant avec mon petit boulot à Athanatos. Dire que je m'ennuie serait faux. Mais j'étais juste un peu lasse. Parce que même si mon quotidien semble trépidant, rien n'était vraiment palpitant. Et à force de toujours faire les mêmes choses, de ne plus trop avoir le contrôle sur mes gestes à part sur les endroits où je fais la fête, j'ai fini par avoir un sentiment constant de lassitude.









Les Immortels : La malédiction originelle, Tome FinalOù les histoires vivent. Découvrez maintenant