Chapitre 67 - L'autre monde

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Deux jours sont passés sans qu'il n'arrive beaucoup de choses. La tension grimpe un peu, tout le monde a peur de quand arrivera le prochain meurtre. Je ne peux pas m'empêcher de regarder derrière moi au moindre bruit, comme si j'étais suivie. J'imagine que c'est idiot, personne n'a l'air de vouloir s'en prendre à moi de nouveau. Du moins, pas pour me tuer.

Je suis assise sur la scène, jambes se balançant dans le vide. Ma casquette est à côté de moi avec mon gilet, la chaleur des derniers jours m'empêchant de rester avec plus que ma chemise sur le dos. Même celle-ci est remontée sur mes avant-bras. Je passe lentement une main sur la cicatrice du couteau de Hiroko-san. Ce n'est pas encore complètement soigné à vrai dire, mais je n'ai plus besoin de bandages à présent. J'ai l'impression que ça fait une éternité.

Je soupire un peu et m'allonge sur le bois de la scène, mes jambes toujours dans le vide. Si j'avais un maillot de bain, peut-être serais-je allée me baigner un peu. Ou pas. Qui sait.

Je ferme les yeux et laisse mes pensées être portées par le bruit des vagues qui s'écrasent sur la coque du navire. Le soleil qui tape mon visage que ma frange ne cache pas, allongée ainsi. La chaleur qui ne fait qu'empirer avec les jours. La sueur qui colle à mon front. La lumière qui tape sur mes yeux et m'empêche de m'endormir.

J'entends des bruits de pas plus bruyants que nécessaire se rapprocher de moi et je vois vite Bôkyaku se poser contre le rebord, tête tournée vers le sol. Il a abandonné son espèce de manche sur son bras gauche, laissant visibles plusieurs cicatrices qui ont de quoi inquiéter n'importe qui. Sa peau est presque plus cicatrices que normal sur son biceps.

«Je peux rester ici ?

- Vous n'avez pas besoin de me demander la permission.»

Il hoche la tête et il m'est impossible de voir ses yeux correctement ainsi, mais d'une certaine manière je sais qu'il me fait confiance. Il a toujours un air gardé, mais il a l'air de se détendre peu à peu en ma compagnie. Je n'arrive pas à savoir ce que je suis censée ressentir pour cet homme, honnêtement.

Ma logique n'a de cesse de me dire que cet homme ne mérite aucune compassion, après avoir tué autant de gens. Mais je ne peux pas m'empêcher de penser qu'il n'est pas le monstre que la police donne l'impression qu'il est. Qu'il est et reste avant tout un humain, avec ses cheveux qui passent devant ses yeux quand il se penche un peu en avant, son grain de beauté sur la joue et sa manière de légèrement bouder quand il pense que je ne le regarde pas. Sa petite cicatrice sous l'oeil gauche et les plus visibles sur le reste de son corps, son nez un peu de travers... Il est humain, et rien ne peut me permettre de l'oublier.

Je repense à l'homme dont il avait parlé. Je me demande si mon grand-père ou mon père en aurait su plus que moi à ce sujet si je leur avait demandé. J'aimerai poser des questions à Bôkyaku, mais je ne veux pas lui faire vivre une crise d'angoisse de nouveau. Cet homme semble être la source de bien des problèmes pour lui.

Il relève sa tête et plante ses yeux dans les miens. J'ai l'impression d'être un livre ouvert pendant une seconde, avec ma frange sur le côté, mais je comprends vite qu'il ne cherche rien et ne fait que regarder. Observer. Pas d'une manière mauvaise ou dangereuse, non, juste... Curieuse. Je lui souris et il tourne de nouveau la tête vers le sol.

«Pourquoi tu caches ton oeil, d'habitude ?

- J'ai simplement commencé à faire ça au collège, quand mes cheveux étaient trop longs. Et j'ai continué avec le temps.» il hoche la tête, doucement «Pourquoi cette question ?

- ... T'es yeux sont expressifs. Je me demandais juste pourquoi tu le cachais, du coup.

- Je vois... Vous avez aussi des yeux expressifs, vous savez ?» il retourne la tête vers moi «Pas tout le temps, si ça peut vous rassurer. Mais je peux voir que vous êtes plutôt calme et curieux, aujourd'hui. Un peu comme un chat.

Danganronpa : Disrupt [Fancast]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant