Chapitre 12 : Hécate

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Sur le chemin du retour, je marchais la tête baissée, abattue. Mes pensées restaient fixées sur la froideur de ses paroles qui m'avait complètement désarmé. Pour ne rien arranger, ses pas résonnaient à quelques mètres ne faisant qu'augmenter mon angoisse.


Je ne savais pas quoi penser, je ne savais pas comment réagir : c'était bien la première fois que j'éprouvais tant de difficulté à mettre des mots sur mes sentiments. Mon cœur battait violemment dans ma poitrine ; les bras croisés autour de ma taille, je trébuchais plus d'une fois sur les pavés mal entretenus de la belle Stohess. Le chemin principalement éclairé par la lueur de la lune me semblait interminable, j'espérais comme prise d'une folie passagère, qu'il me ramenait à la maison.

Mais qu'était « la maison » ? Je ne l'ai jamais su. Etait-ce la maison que Sasha et moi avions quitté beaucoup trop tôt, où nos rires d'enfants innocents résonnaient encore entre les murs ? Etait-ce l'appartement que j'occupais à la capitale, là où toutes les nuits étaient emplies d'espérance et les matinées d'une solitude agonisante. Était-ce au quartier général du bataillon où je pouvais m'endormir chaque nuit aux côtés de ma sœur étouffée par la culpabilité d'être sur le point de détruire ses rêves à elle ?

Je ne le savais pas. Je ne savais pas ce qu'était mon endroit à moi, mais je voulais y être. J'étais prête à y ramper, même si je devais ravaler ma fierté. Rien qu'une fois, rien qu'une nuit, je voulais m'ôter ce poids de mes épaules et ces questions de ma tête. Sortir de cette spirale infernale dans laquelle j'étais entrée en quittant le domaine familial ou avait-elle commencé le jour où–

La vue de l'entrée de l'auberge me coupa dans mes réflexions nocturnes. Je poussai la porte pour entrer et voir le visage chaleureux de la femme qui se trouvait à l'accueil.


Je m'approchai du bureau en la saluant, le Caporal-Chef entra juste après moi :


- Nous avons une chambre au deuxième étage, la 202, fit le Caporal en s'approchant à son tour de l'accueil.

- Veuillez signer le registre, s'il vous plaît, demanda la femme en lui tendant un stylo.

Elle me regardait tendrement alors qu'il apposait sa signature.

- Votre femme à l'air bien triste, une mine aussi sombre ne suit pas un aussi joli visage. Dit-elle en tournant les yeux vers Levi, vous avez intérêt à vous faire pardonner cette nuit. Poursuivit-elle, en lui tendant les clés.

Je sentais le rouge me monter aux joues alors qu'elle me faisait un clin d'œil. Il ne prit pas la peine de répondre et nous montâmes vers la chambre. Je me dégageai rapidement de mon manteau, j'avais l'impression d'étouffer. Je pris le petit couteau en pierre de Mirage que je gardais précieusement pour couper les lacets de mon corset.


- Prends le grand lit, fit Levi, alors qu'il sortait ses affaires sur le simple qui longeait l'un des murs de la chambre.

Je pris de quoi me changer et partis dans l'une des petite salle de bain. Je restais quelques minutes sous l'eau chaude avant de me frotter le corps et le visage. Je pensais que ce moment serait le meilleur moment pour moi pour me laisser aller, mais je n'arrivais même pas à pleurer. Qu'est-ce qui clochait chez moi ? Qu'est-ce qui m'arrivait ?


Je sortis de la salle de bain dans ma nuisette en soie bleue. J'entrais dans la chambre, je pensais y voir Levi endormi, mais il était assis au bureau au bout de son lit occupé à écrire. Il me dévisagea pendant quelques secondes avant de détourner le regard.

Je m'écrasais dans le lit en soupirant comme un phacochère épuisé. Alors que je me sentais partir dans les bras de Morphée, sa voix grave coupa court mon voyage prématuré vers le sommeil.


La Princesse des Rues  - LEVI X READEROù les histoires vivent. Découvrez maintenant