5. L'amour de l'art

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5. L'amour de l'art
(by Victor Soumis des bois)

Ce putain de Driss Diak. Il ne m'a pas calculé de la semaine, vous vous rendez compte ? Je suis son espion, oh ! Il est censé me tracer jour et nuit pour s'assurer que je sois pas en danger ! Bon, c'est vrai qu'il n'y a rien eu de nouveau avec S-Nin depuis mon rendez‑vous mais justement ! Je m'emmerde ! C'est quand que je trahis et que je tabasse des gens, moi ?

J'avais envie d'appeler Diak mais si j'avais pas de nouvelles informations je pouvais pas, question de fierté. Comme il me l'avait si poliment fait remarquer : on n'est pas amis.

Un autre que j'avais bien envie d'appeler, c'était le beau Kiwi, qui ne me donnait pas de nouvelles non plus. J'arrêtais pas de penser à sa frimousse. J'avais grave envie de l'inviter à aller boire un verre puis de le tringler derrière les poubelles. Ça se tente, non ?

J'ai tenté.

— Allô ? m'a fait une grosse voix méfiante.

— C'est pas Kiwi, ça.

— C'est Grenade. Kiwi n'a pas ses bras sur lui. Qu'est‑ce que tu veux Fraise des Bois ?

Beurk, Grenade. Qu'est‑ce qu'ils foutaient ensemble ?

— Rien, laisse tomber.

— T'as bien dû appeler pour une raison ?

Il avait une voix légèrement moqueuse, comme s'il savait très bien que j'appelais pour pécho Kiwi et que j'allais me faire rembarrer. Quel con. J'entendais Kiwi en fond qui réclamait son téléphone en rigolant. Je l'ai imaginé sans ses bras. Il les enlève souvent comme ça ? Pourquoi ? Et ses jambes, il les enlève aussi ? Brrr.

— Fraise des Bois ? C'est Kiwi, désolé. Je t'écoute.

Grenade devait lui tenir le téléphone contre l'oreille ou pire, j'étais en haut‑parleur. Je me suis rappelé comme ce casse‑couilles était intervenu pour m'empêcher de flirter avec son chef, et comme ce dernier s'était laissé faire. Si je proposais un verre à Kiwi sous le nez de Grenade, il refuserait. J'ai dit :

— Nan c'est rien, j'appelle juste pour savoir quand vous aurez besoin de moi, je m'emmerde un peu.

— Impatient de libérer des clones ?

— Ouais.

Impatient de te revoir, plutôt. C'est ce que j'aurais dit si l'affreux n'était pas dans les parages.

— On a un coup de prévu mais je sais pas trop, c'est un peu dangereux pour un débutant, on voulait te faire commencer avec plus facile. Après, si tu t'emmerdes... Grenade, t'en penses quoi ? On rajoute FdB sur le coup de vendredi ?

FdB ? C'est mon nouveau surnom ? J'aime moyen, ça ressemble un peu trop à fdp. Cela dit, question pseudos de merde, je ne suis plus à ça près.

— Allez testez‑moi ! les ai‑je interrompus alors qu'ils débattaient entre eux. Je vous décevrai pas, promis.

— Bon d'accord. On passera te chercher en voiture vendredi. Prends un masque à gaz.

Wouuh ! À moi la gloire et le pognon ! Mais vendredi c'était dans deux jours, alors quand ils ont raccroché, ça m'a ramené à mon état d'emmerdement maximal. Ils ont l'air vachement proches, les salauds. Ils me font me sentir un peu seul.

La bonne nouvelle, c'est que maintenant j'avais des infos à transmettre à mon collègue. Je n'utilise plus la boucle d'oreille pour parler à Diak : il n'établit la communication dessus que quand je suis avec Sartrouville Ninja : « Il y a un concept que tu n'as pas l'air de saisir », m'avait‑il dit en prenant ses grands airs « Ça s'appelle la vie privée. Je sais bien que tu n'as strictement aucune pudeur, mais je t'assure que personne n'a envie de t'entendre 24 heures sur 24 ». J'en ai déduit que ma branlette de l'autre jour ne passerait pas à la postérité. Quel gâchis.

Kiwi ex MachinaOù les histoires vivent. Découvrez maintenant