Kiwi ex Machina

21. nope

/!\ TW: Ce chapitre aborde un sujet choquant. Soyez prudents /!\

21. Nope

(by Victor Carmin)

Suite à ce grand moment, je penchais côté Sartrouville Ninja avec un bon 95%. S'il le fallait, j'accepterais de trahir Santorga. Ça m'a enlevé un poids de me dire ça, et suis rentré à la maison tout content, même si au fond je savais que j'avais de quoi m'inquiéter. Mon patron et Diak apprécieraient pas que je passe à l'ennemi, et Kiwi lui‑même risquait de mal le prendre quand je lui avouerai que je courrais pour Santorga depuis le début. Mais tout ce à quoi j'arrivais à réfléchir c'était : si je ne livre pas Kiwi à mon patron, qu'est‑ce qui m'empêche de le baiser ?

Voilà donc ce que je planifiais dans ma tête au lieu de penser à comment annoncer ma vraie identité à mon leader, et comment j'allais assumer de trahir mon patron.

— Où est‑ce qu'on te dépose, FdB ? m'a demandé Noisette qui ramenait tout le monde.

— Au premier souterrain que tu vois, je prendrai le RER.

— Tu vas retrouver Plan‑Cul ? m'a demandé Chibi Kiwi d'un ton qui n'était, accrochez‑vous, même pas sarcastique.

— Euuh non, ai-je rigolé. Plan‑Cul se lève tôt demain.

— Pourquoi tu l'as pas invité à venir manger avec nous ?

Il a fallu que j'explique à Chibi Kiwi, sous les oreilles attentives de Litchi et Noisette, que malgré notre amour inconditionnel, Plan‑Cul n'était pas au courant de mon activité chez S-Nin. Comme mon manque de sincérité envers mon cher et tendre avait l'air de choquer l'innocent Chibi, j'ai calmé tout le monde en lâchant que ce cher Plan‑Cul travaillait chez Santorga. Noisette a failli emboutir la voiture de devant quand il a entendu ça. Au ménage ! ai‑je rassuré. Il récure les chiottes dans la partie administrative. J'ai machinalement tourné ma boucle d'oreille que j'avais fait bien gaffe à ne pas oublier chez Kiwi. Diak n'écoute jamais quand je me fous de lui, c'est nul.

Ma soudaine révélation peut vous paraître maladroite, mais admirez plutôt : maintenant que Noisette et Litchi sont au courant de ce détail, la prochaine fois que je dérape et lâche des infos sur Santorga, je pourrais dire que je les tiens de mon plan cul. Et même, si Sartrouville Ninja me demande de me servir de lui pour obtenir des infos, et ben je pourrais leur donner des infos en faisant croire que je les lui ai soutirés. Et surtout, Diak et moi étions maintenant les Roméo et Juliette du conflit idéologique autour du clonage ! Qui l'eut cru ? Sûrement pas moi.

Une fois de retour au chaud dans mon appart, je me suis repassé dans la tête toute l'histoire que j'avais apprise au diner. Kiwi et Litchi. Le premier clone de Sartrouville Ninja, sorti bâillonné dans une valise au nez de tout l'accueil d'un hôpital. Ces gens n'avaient rien de criminel. Ils s'étaient engagés dans cette voie presque par hasard, un concours de circonstances, sans le faire exprès. Sartrouville Ninja n'existait que parce que trois malheureux s'étaient retrouvés hospitalisés en même temps. Si Litchi avait échappé au cancer, si Grenade n'avait pas été brûlé... comment il s'était brûlé d'ailleurs, je le sais toujours pas ça. Et Kiwi alors ? J'ai l'impression de ne pas avoir tout compris, il me manque des trucs.

J'ai attrapé mon termi qui trainait sur mon lit et j'ai tapé dans le moteur de recherche « infection nosocomiale » parce que j'avoue, j'étais pas certain de ce que c'était. Google m'a appris que c'était une infection qui se chope dans les hôpitaux. Ok. Et donc, pourquoi Kiwi était entré dans cet hôpital dans lequel il avait chopé la merde qui allait lui coûter ses bras et ses jambes ? Ça on ne me l'avait pas dit.

Je couche avec le king des terminaux en personne, du coup j'ai pas trop le réflexe de mener des enquêtes sur internet, je préfère pleurnicher un coup et laisser Plan‑Cul s'en charger. Mais impossible de lui raconter tout ça, il trouverait l'identité de Kiwi, Grenade et Litchi à coup sûr. Alors je me suis débrouillé tout seul comme un grand garçon. Un clone volé la veille de la greffe d'un gosse amputé, ça avait dû faire du bruit. J'ai tapé "2027 clone volé hôpital Sartrouville". Je me sentais trop comme un hacker de la nuit. Driss Diak, bientôt je te surpasserai.