Chapitre 8

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Il est bien tard et la buée sur sous le verre du cadran de ma montre montre bien que le climat est très changeant en cette période et que les variations de température sont fréquentes - tout ça ne m'aidant pas à me repérer temporellement. Je suis bien et mon excitation frénétique se calme peu à peu de sorte que je ne ressente plus qu'un plaisir singulier et très silencieux m'envahir de tous mes pores. 

Je descends le boulevard vers le Trocadéro et je me prends à être ému devant ce spectacle. En passant le pont reliant ces deux grands monuments de Paris je suis en totale admiration devant le soleil qui se lève doucement sous mes yeux m'offrant ainsi une vision magique presque féerique dont je pense ne jamais pouvoir me lasser. J'aimerais avoir le temps de rester. Je voudrais poser mes valises, camper ici, de sorte que ce spectacle me soit offert tous les jours et ainsi me rappeler à quel point les principales sources de bonheur sont celles qu'on auraient pu ne jamais réellement soupçonner. 

Je continue vers le Trocadéro et cet édifice que j'ai toujours trouvé banal semble soudain différent. Il n'est pas plus grand ni réellement plus joli. Il est juste là, devant moi et je ressens bien la sensation de changement en moi. C'est une renaissance qui se voit en ce moment marquée par ce magnifique soleil levant. 

Arrivé à un carrefour je tourne à gauche et descends sur les rives. C'est vide, il n'y a personne et cela aurait pu être quelque chose de presque idéal à mes yeux si je pensais encore que tous les gens sont des salops or ce n'est plus le cas. Je décide en ce nouveau jour de m'approprier un peu plus le temps de me poser moi-même, parmi les autres pour pouvoir ainsi ne pas me baser sur mon opinion négatif que j'aurais peut-être pu garder plus longtemps si toute cette nuit n'avait pas été aussi révélatrice. 

Il n'y a que moi et Paris. Paris la magnifique, Paris la corrompue, Paris la sale. J'ai envie de profiter du moment et comme je l'avais prévu j'aurais besoin d'immortaliser ce moment pour que plus tard je puisse me le rappeler et savoir d'où je viens et comprendre où je vais si tant est que je puisse réellement voir un sens à ma vie. Je remonte mon jean jusqu'au genoux, enlève mes chaussures et mes chaussettes et jette un coup d'oeil autour de moi pour voir si quelqu'un ne serait pas allé caché à me juger de loin ruinant ainsi mes grands yeux d'utopie du monde et de sa bonté à laquelle je vais essayer de croire à nouveau. 

Je m'assois sur le bord et les pavés me paraissent très peu confortables. Il n'y aurait pas longtemps je serais parti juste à cause de cela car j'aurais jugé ça comme intolérable comme étant à la continuelle recherche de la perfection dans quoi que ce soit. Il faut se satisfaire de ce qu'on a et on se rend toujours compte que c'est mieux que de n'avoir rien et un voile sur les yeux nous empêchant de voir le monde comme on le devrait. Je pose mes chaussures à côté de moi ainsi que mon sac à dos. J'ai hâte de m'y remettre, cela fait si longtemps. 

Je l'ouvre et sors un calepin en canson mais aussi un fagot de stylos que j'ai pris le soin de d'emporter avec moi en allant tout à l'heure chez moi. Cela fait si longtemps que je n'ai pas dessiné. J'étais bon, il paraît. C'est ce que l'on disait. 

J'ai toujours laissé mon matériel sur mon bureau pour que Morgane croit que je vis une vie normale et que je n'ai jamais laissé mes passions de côté. Or ce stylo, ces feutres, ce calepin et tout ce fouillis comme j'aime à l'appeler n'était qu'une illusion qui a finalement bien opérée. Elle ne s'est rendue de rien. J'aimerais l'insulter pour ça et je remarque vite en y pensant que cet être joyeux et positif ne sera jamais moi. Certes je vais faire des efforts mais je n'oublierai jamais ce que la face du monde a essayé de caché et que j'ai percé à jour à force d'analyser, de voir, de comprendre mais surtout de douter. 

Je doute que les hommes puissent changer. Je doute que la crise s'inverse. Je doute que tous les problèmes se résolvent car le monde ne se résout qu'avec des problèmes. Je doute de pouvoir aussi bien dessiner qu'avant et pourtant c'est que je m'apprête à faire. Ma tête est remplie d'idée et je me sens comme pouvant avoir le courage de m'y remettre, de m'acharner dessus, d'être meilleur, encore et chaque jour, si bien que je pourrais ouvrir une exposition et devenir célèbre. Or je me dois de combattre ces illusions qui trop longtemps m'ont fait faire des choix que je regrette. Je me dois d'être calme pour ne pas me blesser tout seul. 

Et la vérité s'envolera avec moiOù les histoires vivent. Découvrez maintenant