Et la vérité s'envolera avec moi

Chapitre 17

Je la vois pâlir et fermer les yeux de manière à cacher ses larmes qui commencent sans qu'elle ne le veuille, à lui couler le long des joues. Elle est triste et en colère. Je viens de la déshabiller, devant tout le monde, devant tous ceux qui étaient censés la respecter pendant toutes ces années. Elle ne comprend pas ce qui lui arrive et aucun sanglot ne pourra changer cela si tant est qu'elle le croit en ce moment. Elle se sent faible et cette partie d'elle que je viens d'exposer au monde, sans lui demander son avis, sans scrupules, lui donne des excès de rage qu'elle ne peut laisser sortir. 

Il n'y aura pas d'excuses. En vérité j'en veux beaucoup à ceux qui l'ont laissé dirigé un tel centre et je ne m'étonne plus vraiment d'ailleurs de voir à quel point cet endroit m'a paru miteux et effroyable dès le premier regard. Je n'accepterai plus de paroles d'elles et elle ne sera maintenant plus que cobaye pour quelque expérience. Je ne sais pas lesquelles et il me faut concerter avec ma nouvelle troupe pour savoir de quoi définir même si de nombreuses idées cruelles me viennent à présent à l'esprit. Il n'y aura plus de douceur ou de pacifisme. 

Je reprends la parole et l'assemblée devant moi semble soudain m'écouter comme un évangile porteur de la bonne parole :

"Je ne vais pas continuer à lire tout ce dossier qui regroupe aspect juridique et psychologique pour le sommeil de tous car nous n'en aurions pas fini avant la nuit. Ce dossier m'emmerde. Tout y est recensé et vous ne voulez pas avoir à subir tout cela. Je me promets de le lire en entier pour vous, pour vous venger. Je le garde sous la main et sachez qu'un jour il ressortira, rien n'est plus sûr. 

Il est vrai que j'aurais voulu pouvoir la défendre dans ses pratiques. J'aurais aimé me dire que tout cela n'était que dû à une mauvaise gestion et de remettre tout sur le dos de l'erreur humaine mais comment prétendre à cela quand tout a été mis en place par un ex-nazi. Comment peut-on faire cela ? On dit que tueur, autre tueur tuera et il me vient bon nombres d'idées pour mettre cela en place. (Je me tourne vers la femme que je suis en train de tuer une seconde fois.) Ne pense pas que je vais te déculpabiliser pour ce que tu as fait. Ne crois pas que je vais plaindre ta position que de ton statut de reine tu as déjà bien trop profité. Tu ne vaux pas plus qu'une autre et il m'est dur de penser que pire que toi puisse exister. J'aimerais te dire de ne jamais revenir ici mais ce serait mentir. (Je ris.) Il faudrait que tu sortes d'ici pour pouvoir revenir et si tu es aussi intelligente que tu as toujours prétendu être il ne t'aura pas fallu longtemps pour comprendre que ton heure avait sonné. Tu peux toujours croire que tu mourras dignement aujourd'hui mais il n'en est pas moins le cas. Tu es honteuse de tes actes et je le comprends mais sache que la honte n'est pas, comme tu pourrais le penser, symbole de bon esprit. Tu as honte, c'est très bien. Mais... honte pourquoi ? Repense à tout ça. Repense à tous ces gens que tu as tués. Repense à tous ces gens que tu as tués indignement. Repense à tous ces gens que tu as tués indignement sans penser aux actes que tu étais en train de commettre et pose toi la vraie question. "Est-ce que je mérite de vivre ?" Pour t'aider dans ce grand débat qu'avec toi-même tu aura bien le temps de faire plus tard, je te propose ma réponse. Non. Non tu ne mérites plus grand chose si ce n'est une mort plus que douloureuse."

Elle me regarde et tente désormais quelques mimiques pour m'attendrir. Que nenni. J'ai le cœur aussi dur que de la pierre et elle n'arrange pas son cas. Elle mourra et aujourd'hui. Je me tourne vers Alexander et lui fais un signe que seul lui comprend. 

"Qui veut qu'elle meure ?, demandé-je.

- Moi, je le veux. 

- Evidemment que je le veux aussi. Je veux qu'elle meure, cette pourriture !, lance une voix dont je ne saurais localiser l'orateur.

- Qu'elle crève ! 

- Oui, qu'elle crève, reprennent d'autres en chœur. 

- Je vous trouve bien dur et je ne vous ai jamais dit que je vous écouterais. Vous faites confiance bien trop vite et l'excès est le pire des défauts. Soyez discrets, ne vous laissez pas emporter, sinon mourrez. Je n'ai pas besoin de bruit autour de moi, j'en fais déjà assez à ce qu'il paraît."