Les bruits des couverts se fracassant sur les assiettes et les coupelles recommencent à se faire entendre et je dois m'obliger à garder mon calme. Ce n'est pas réellement une chose qui m'énerve mais en fait je trouve le fait de s'énerver pour rien contre eux rendrait le côté domination un peu plus présent et c'est exactement ce que je veux. Je confie mon pistolet à Alex qui continue de le maintenir de manière à ce que la vie de la directrice de ce centre reste toujours en équilibre instable et commence à parler :
"EN SILENCE ! Je ne veux plus vous entendre. Le prochain qui parlera, qui remuera trop ou dont j'entendrais le simple gargouillement de ventre sera abattu si tant est que la balle arrive à bonne destination."
Plus personne, désormais, ne bougea et c'est devant une assemblée de petits soldats que j'ai l'impression d'être. Je suis un tyran et je n'en ai que peu à faire. Il ne m'est pas dur de comprendre la situation qu'ils vivent mais il m'est encore plus facile de faire régner la terreur. L'homme est plus animal qu'humain et ce malgré tous les efforts qu'on a fait pour le cacher.
Leur figures commencent à se pâlir et je sens que certains vont bientôt éclater en sanglots. La tension est palpable et il reste peu de temps avant que des tirs fusent dans la salle. Je décide de descendre de l'estrade et passe à côté d'une première rangée de table. Avec un air que je veux le plus supérieur possible je les regarde, posant parfois ma tête sur leurs épaules.
Je continue mon petit jeu pendant quelques minutes et je m'amuse plutôt bien. Lorsque je regarde mon coéquipier armé je le vois sourire aussi et d'une certaine manière nous prenons notre pied. J'admire ceux qui ont su rester impassibles à mon approche mais je sens que ce ne sera pas possible pour tout le monde.
Mon chemin ne s'arrête jamais et je passe désormais de l'autre côté de la longue table à côté de laquelle je viens de passer. Cette fois je décide de pousser le vice un peu plus loin et m'assois entre certains.
"Tu veux du sucre ?," proposé-je à l'un. "Encore quelques toasts ?", demandé-je à un autre.
Ils restent muets et je commence à croire que je les ai peut-être sous-estimés. Je reste sur la lancée de ma croisade et ressens une envie dévastatrice en moi, une envie de tuer. Alors que je m'apprête à m'asseoir à côté d'un patient dont je n'avais pas remarqué la présence auparavant j'entends une voix disant d'arrêter ce que je fais.
"Je ne supporte pas ça ! Je ne veux pas que vous nous fassiez du mal. Arrêtez votre massacre," s'exclame une femme d'une quarantaine d'année ayant toujours beaucoup de charme, s'étant relevée.
Je suis soudainement épaté. Je ne croyais pas que quelqu'un aurait le courage de faire ce qu'elle a fait et je me prends à vouloir l'épargner. Je m'approche quand même d'elle, en courant et en feignant l'impatience tout comme je me force à plisser les yeux pour essayer de marquer une certaine colère que je n'ai étonnamment pas.
Une fois à son niveau je me place devant elle et je soutiens son regard. Je m'étonne qu'elle soutienne le mien. Quel culot ! Nous restons ainsi plantés plusieurs minutes et tous les regards convergent désormais vers nous. J'ai l'impression qu'ils attendent que je la tue et que d'une certaine manière ils espèrent que je le fasse en pensant peut-être que cela m'empêchera d'en tuer d'autres, rongé par la culpabilité. Le jeu reste dans la surprise, dans les rebondissements et je trouverais cela vraiment trop simple d'aller dans leur sens. Je préfère largement les perdre totalement et commence à chuchoter un mot à l'oreille de cette femme :
"Comment t'appelles-tu ?
- Je suis Stéfany.
- Et bien Stéfany, peux-tu me dire comment tu vas ?

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Et la vérité s'envolera avec moi
Mystère / ThrillerJe m'en vais, je pars loin de tout ce que je connais. Je refuse de dire que je fuis mais c'est ce que je fais. C'est décidé, je n'ai plus ma place ici et c'est bien ailleurs que je vais espérer la trouver. Je n'emporte que très peu de choses, j'ai...