Chapitre 22

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Je ne sais pas depuis combien de temps je dors mais cela me paraît etre le sommeil le plus reposant que j'ai jamais eu à vivre depuis de longues années même s'il ne me paraît pas comme ayant été bien long. Je sens une certaine agitation autour de moi mais là je n'ai vraiment pas envie d'y prendre part. Faites comme si je n'étais pas là. Je frôle l'overdose de beaucoup de choses y compris de moi-même. C'était tellement intense ces derniers jours que je m'imagine mal revenir à une certaine banalité de la vie. Je comrpendrais pas vraiment si rien ne m'arrivait plus. Je veux plus de tout ça et pourtant j'en ai une si grande envie. Je veux de l'action mais pas trop et ce paradoxe est ce qui m'empêche de vouloir me réveiller. Je ne veux pas y penser, là, tout de suite, maintenant et je préfère laisser filer ma vie tout comme le train file de la ville. 

Je repose ma tête contre la vitre et le froid qui m'empare tout d'un coup ne me dérange étonnemment pas. J'ai l'impression que je vais exploser à tout moment tant je ne me sens pas capable de supporter la moindre petite discussion avec quelqu'un. Je peux juste plus là et c'est comme si j'étais fatigué de vivre. J'ai besoin de repos, tant physiquement qu'émotionnellement et j'espère que les passagers de ce train comprendront qu'il faut me laisser tranquille. 

La position que j'ai adoptée ne me convient pas et je me lève d'un bond, à l'instar d'un zombie, en quête de quelque chose de confortable à me caler sous la tête. Je parcours quelques wagons et ne fais pas attention aux autres personnes présentes ici bien que je les observe toutes attentivement afin d'essayer de les comprendre. Je traîne les pieds et je pense qu'ils pourraient se dérober d'un moment à l'autre sous mon poids. J'ouvre chaque tiroir que je trouve ainsi chaque armoire et le personnel ne semble pas choqué par mon comportement. Ils sont remplis de diverses choses mais rien ne me paraît satisfaisant. 

Je m'approche alors d'une vieille dame emmitouflée dans une grande couverture en moleton et jalousement, lui prend des mains. Je le fais sans gêne parce que j'ai le légère impression que j'en ai plus besoin qu'elle. Elle sursaute et se réveille un peu brumeuse. Je la regarde, elle me regarde et mes yeux ne pouvant trahir plus ma fatigue extrême lui prouve que c'était un besoin vital que de lui faire subir ça. Elle hoche la tête et se rendort tout simplement, dans la même position, sans couverture. 

Tout ne semble pas vrai ici et j'ai l'impression que cette véritable compréhension des autres est en fait un cruel mensonge. Je ne suis tellement pas habitué à cela que je commence à douter de la réelle identité de tous ces gens qui s'affairent à diverses occupations autour de moi. Si elle avait été une des Autres alors elle se serait énervée et on aurait pu en avoir jusqu'aux mains et ça aurait été moche mais là, elle ne réagit pas et cela sonne louche. C'est exactement ça que j'aurais voulu éviter. J'aurais voulu pouvoir vivre dans un monde où le mensonge n'aurait pas pris une place si importante. Je me sens coupable de m'être fait endoctriné si facilement, en quelque sorte. Même sans le vouloir, je me suis habitué à certains codes, à certaines réactions et maintenant c'est moi qui ne sais plus comment réagir devant cette bonté, cette gentilesse et cette réelle sagesse de coeur et d'esprit. Je suis totalement bouleversé par le geste de cette dame alors que je ne le devrais pas et c'est pensif que je retourne jusqu'à ma place, sous les regards compréhensifs et à la fois étonnés des autres voyageurs. 

Je me rasseois et m'enveloppe de ce qui semble être la plus chose à mes yeux en ce moment, sous les yeux moqueurs de mon ami. 

"C'est bon", grogné-je. 

Je sais qu'il comprend mais il aime bien être sarcastique. Il aime m'embêter, me taquiner et après tout ce qu'il a fait pour moi je ne peux pas lui en vouloir. Je recolle ma tête sur la vitre toujours aussi froid du wagon sans faire attention aux rires qu'il a du mal à contenir. Je ne dois pas ressembler à grand chose dans cet apparat et si j'en avais la force j'en rirais moi aussi. Je regarde par la fenêtre et toutes ces images les unes à la suite des autres me rendent joyeux. J'ai l'impression de voir une pluie de feuilles vertes, de différentes teintes et j'aurais aimé pouvoir mettre toute cette beauté dans un dessin. 

Et la vérité s'envolera avec moiOù les histoires vivent. Découvrez maintenant