Et la vérité s'envolera avec moi

Chapitre 19

Sans avoir pris la peine de réfléchir, Alexander s'enfuit. Je le vois ouvrir la grande porte, bousculer le reste du groupe et j'entends ces pas dans l'escalier, rapides, vifs. Je descends et me lance à sa poursuite. "Reste là ! Arrête !", lui crié-je. Rien n'y fait. Je le suis jusque devant sa chambre et le vois entrer dedans de manière mécanique. Il prend ses affaires et en ressort. Stéfany nous a suivi et je capte une certaine incompréhension dans son regard. Je lui crie mon numéro de téléphone haut et fort et j'espère instinctivement qu'elle est en train de le noter. 

"Ne nous attendez pas. On se reverra. D'ailleurs, n'attendez jamais. Adieu, m'exclamé-je en courant dans le couloir menant à ma chambre. 

- Vous partez ?, me demande un homme dont je n'ai pas eu la chance de connaître le nom. 

- Je ne sais pas si nous partons mais une chose est sûre nous le faisons. Je soutiens Alexander dans sa démarche et où qu'il ira il devra pouvoir compter sur moi. Je suis désolé mais si c'est la dernière fois alors j'en suis désolé. Je n'ai pas le temps de faire d'embrassades, dis-je en rentrant dans ma chambre. Prenez soin de vous, retrouvez une vie normale, essayez d'être heureux ! N'oubliez jamais d'être heureux. 

- Mais le monde est si mo.. 

- Je sais mon enfant, dis-je en me mettant au niveau de la petite fille qui se trouve devant moi. Le monde est si moche mais essayez d'en tirer le meilleur. Je sais ce que j'ai dit mais il ne tient qu'aux cons de ne pas changer d'avis !" 

Je prends mes affaires et essaye de ne rien oublier. Je ne veux rien laisser dans cet endroit dont je ne suis pas sûr de la sûreté. Méfions nous de tous et méfions nous de nous. Je jette un coup d'œil partout et en entrant dans la salle de bain, me regard furtivement puis me recoiffe dans un petit élan narcissique. Je pousse la petite fille en dehors et cela me fait mal de devoir le faire. Elle avait l'air si gentille. Je sors et claque la porte si bien que tout le monde doit avoir entendu ce bruit infernal caractérisé par l'excitation d'un homme. 

Je passe entre toutes les nouvelles connaissances que je viens de me faire et ne fais même pas attention à eux. Nous n'avons pas eu ce que nous méritions, nous n'avons pas réussi à nous aimer, ni à nous entendre et le temps n'est pas infini. L'horloge tourne. Nous courons à quelque chose qui est autre que notre perte désormais, Alexander et moi. 

Je le rejoins au bout du couloir et j'ai l'impression qu'il ne me veut pas avec lui. IL N'A PAS LE CHOIX. Il commence à protester et je le plaque contre une porte se trouvant derrière lui :

"Je viens. Tu n'as pas le choix." 

J'espère qu'il a compris que je fais ça pour son bien. J'ai besoin de lui et j'ai l'impression que nous sommes les seules personnes sur qui nous pouvons réellement compter. Il baisse les yeux et mes desseins semblent lui paraître d'autant plus clairs. J'espère qu'il ne m'en veut pas d'avoir fait tout cela. J'espère que je lui laisse assez d'espace. Je sais comme je peux être ennuyant, embarrassant, gênant voire lourd dans certaines situations mais je ne fais jamais de mal à ceux que j'apprécie et ce n'est pas parce que j'ai souvent fait du mal aux gens avant que je ne suis pas capable d'être gentil. 

Nous nous enfuyons, nos sacs sur le dos, la deuxième bretelles à peine mise et adressons de grands signes d'au revoir qui nous paraissent à peine nécessaires. On ne manque pas de ce qu'on ne connaît pas et c'est exactement ce qui me vient à l'esprit quand je vois toutes ces têtes qui me deviennent de plus en plus inconnues au fur et à mesure que nous nous éloignons. La vieille dame est ressortie sur le seuil de la porte et nous fait son plus beau sourire. Il sonne faux et je crois avoir eu raison en croyant que cette femme n'était pas quelqu'un de très recommandable. Je ne saurais pas dire pourquoi je la trouve dangereuse ou même si je la trouve vraiment dangereuse mais je ne ressens que de l'antipathie pour elle malgré ses airs de gentille bonne femme.