Un

639 42 7
                                    

D'aussi loin que je me souvienne, écrire à toujours été un échappatoire pour moi. Ce n'est pas que je n'aimais pas le monde qui m'entourait, c'est juste que... j'ai toujours su qu'il y avait quelque chose de plus grand, de plus beau, qui faisait notre existence mais cela nous était caché par un voile invisible :

"Le jour où nous aurons conscience de notre véritable raison d'exister sur cette Terre, nous n'aurons plus besoin de livre pour imaginer la beauté du monde à notre place. Nous nous contenterons de l'expérimenter, tout simplement."

C'est beau hein ? C'est de moi ! 

Malheureusement cette conviction à évoluer à mesure que je devenais adulte. Surtout lorsque j'ai véritablement commencée à écrire.

C'est toujours compliqué de débuter, mais on essaye malgré tout. Dans ce milieu, si on ne connait personne et si on n'écrit pas les bonnes choses au bon moment, on finit par être découragé ou pire, par être exploité. J'ai choisi la deuxième option. Bien que choisir ne soit pas le verbe approprier dans ce cas ce figure. Disons qu'après avoir envoyé mon premier manuscrit à peu près partout où je le pouvais, je me suis retrouvée à être utilisée par la seule maison d'édition qui ai répondu favorablement à mes sollicitations.

Je me souviens encore de cette matinée ensoleillée d'avril, comme-ci c'était hier...

Je portais mon chemiser vert fétiche et j'avais lissé mes cheveux à la perfection ! Ce qui en soit, constituait un véritable exploit pour la constitution métisse de mes boucles indisciplinées. Je portais même une jupe pour l'occasion, alors que j'ai toujours préférée le confort des pantalons. C'est donc pleine de confiance et d'espoir que je me suis rendu aux Éditions Cassandre. Je n'en avais jamais entendu parler avant et je ne me souvenais même pas avoir envoyé mon livre chez eux, mais étant donné qu'ils étaient les seuls à avoir émis le souhait de me rencontrer, je ne pouvais pas refuser.

En m'asseyant pour la première fois dans le bureau de celui qui allait devenir mon éditeur et ami Léonard Ponti, une sorte de connivence immédiate s'installa entre nous. De taille moyenne, les cheveux poivre et sel, les yeux noisettes avec une paire de lunette pour les habiller, c'est ainsi que se présente cet homme d'une grande intelligence, mais aussi très distrait.

Stone Heart... Je dois admettre mademoiselle Lasso, que c'est la première fois que je lis ce genre de chose. À vrai dire, à la fin je n'ai pas su comment le répertorier. Je ne sais pas si c'est un thriller, une oeuvre fantastique ou une romance ? Disait-il lors de notre premier entretient.

— Disons que c'est tout cela à la fois. Je n'ai jamais aimé choisir, alors pourquoi ne pas tout mélanger ? Répondis-je amusée par son désarroi.

— Cela aurait pu être déroutant et pourtant, j'ai été captivé du début jusqu'à la fin. Vous avez un style, c'est indéniable. Cependant ce genre de livre ne peut se vendre que si c'est un auteur solide qui le porte. Vous comprenez ?

— Je suis ici pour ça, non ? Pour que vous fassiez le nécessaire pour je sois un auteur...

— Non... enfin... oui, disons que pour le moment, tout ce que je peux vous proposer c'est de travailler pour nous.

Je fronça franchement les sourcils essayant de traduire ce qu'il voulu me dire, car je n'étais pas sûr de saisir sa pensée.

— Je ne comprends pas très bien ce que vous attendez de moi monsieur Ponti. Rétorquais-je déroutée par toutes ces tergiversations.

— Disons que nous avons des auteurs dans notre écurie qui n'ont pas écrit de choses aussi exaltantes que celles-ci depuis un certain temps. Si vous consentiez à partager votre talent avec eux, pour qu'il puisse renouer avec le succès, ce serait inespéré.  Vous voyez ce que je veux dire.

The Shadow WriterOù les histoires vivent. Découvrez maintenant