CHAPITRE 6.

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- J'ai une minute de retard monsieur Grenelle.

- Et bien à coût d'une minute de retard à la fin de l'année vous me faites perdre plusieurs heures que je paye alors que vous vous trémoussez ailleurs que dans ce bar !

- Je vous prie de bien vouloir accepter mes plus plates excuses, dis-je avec une pointe de sarcasme.

Je me force à conserver mon sang froid et à rester au maximum professionnelle. Mais tous deux savons que nous ne tiendrons pas encore longtemps avant que nos caractères prennent le dessus sur nos courtoisies et retenues. C'est un vrai supplice à chaque fois.

- Cessez vos excuses et mettez-vous au travail.

Je sens mes palpitations s'accélérer anarchiquement et la chaleur emparer très rapidement mon corps. Mes dents mordent doucement mes joues afin de faire paraitre le moins mon humeur. Voilà le début des répercussions que me provoque ce type à force de vouloir contenir ma colère. L'extériorisation des sentiments est tellement primordiale pour se sentir apaiser, je n'ai pas pour habitude de tenir ma langue dans ma poche pour cette même raison.

À force d'avoir tendance à se faire des courtoisies, nous en venons à ressasser inlassablement les mêmes choses, les mêmes scènes en se blâmant de n'avoir pas agi de telle manière à un instant bien précis. À vouloir se répéter le scénario en y changeant notre réaction, nous vivons dans un lot de regrets constant nous empêchant d'avancer.

Et actuellement j'étais dans cette situation. Celle que je m'évertue d'éviter et de condamner. Cela dit, l'honnêteté ne paye pas toujours et surtout lorsque l'on ne possède pas beaucoup. Plus l'on est dominant moins l'on se met en danger à faire preuve de franchise.

Ainsi, le doigt d'honneur que j'aimerais tendre sous le nez de mon patron restera simplement un désir. Sans compter qu'il est déjà parti traquer un autre de mes collègues, Quentin.

Je laisse échapper un soupir bruyant que je retenais depuis quelques minutes.

- Excusez-moi, madame ! Une voix m'interpelle.

Je me retourne vers une table où sont assiégés deux enfants et deux femmes d'une quarantaine d'années. Le sourire contagieux de la dame qui vient de m'appeler m'apaise immédiatement. Mon pouls se décélère et mon rythme cardiaque redevient normal.

- Bonjour, que puis-je vous servir ?

- Nous prendrons deux sirops de grenadine, un perrier et un Orangina s'il vous plait complète la deuxième femme présente à table.

- Très bien, je vous apporte tout ça dis-je.

- Merci répondent-elles en cœur.

Ça y est je suis de nouveau concentrée, mon service commence déjà fort vu le nombre de tables prises et les clients qui n'ont pas encore commandé.

Je fais des allers-retours entre le bar et les différentes tables que je gère.

- Jade, tu tombes bien !

Alors que j'allais prendre mon plateau chargé de boissons en tout genre, je suis dérangée dans ma course par Magalie.

Je tourne la tête vers Sélène qui me lance un petit regard, l'air de dire « qu'est-ce qu'elle te veut celle-là ». Il faut dire que tout le monde sait pertinemment que toutes les deux nous ne nous entendons pas, et les nombreuses disputes qui ont éclaté entre elle et moi à fini par qu'on ne veuille plus du tout nous adresser la parole. Et tant mieux, moins je la vois, mieux je me porte et ce n'est pas seulement mon cas.

Tout avait commencé lorsque Magalie passait son temps de service à se reposer et pianoter sur son téléphone plutôt que de nous aider et faire son travail. Nous nous faisions bien évidemment toujours réprimander parce que notre service était minable et que la rentabilité n'était pas au rendez-vous.

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