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Olivia avait pris plusieurs heures à ranger sa chambre, parce qu'il y avait un bazar monstre mais aussi, et surtout, parce qu'elle avait pleuré entre deux vêtements pliés. Finalement, elle avait réussi à rendre cette pièce présentable.

Après l'avoir déposée, Mathieu s'était réfugié dans son studio. Toutefois, il ne fallut pas plus de quelques heures pour que ses amis le rejoignent, cherchant discrètement à apaiser ses tourments. On toqua à sa porte et il coupa l'instru qu'il écoutait sans inspiration.


« Ouais ? »

Lisko entra, deux bières dans la main et deux cigarettes sur les oreilles. Mathieu essaya de sourire mais seule une grimace put s'afficher sous ses cernes. « Putain, tu pètes la forme. » Il haussa les épaules nonchalamment, attrapant une bouteille pour en boire quelques gorgées. « Qu'est-ce que t'as ? »

« Rien. » Lisko avait l'habitude de ne pas poser plus de questions, s'il voulait parler, il le ferait. Néanmoins, il lui laissa une dernière chance, en prenant place à côté de lui dans un silence de plomb. Il ne fallut pas plus de quelques minutes pour qu'il craque. « Je pensais pas qu'elle serait dans ma tête comme ça. Putain, je la connais pas et il y a encore quelques mois, j'étais avec Claire et... »

« ... T'as le droit de tourner la page. »

« Pas aussi vite. » Il secoua la tête, incapable de comprendre ses propres sentiments. « J'sais pas ce qui me prend. »

« Tu peux toujours t'éloigner d'elle. »


Il acquiesça avant de prendre une gorgée de sa bière qui fut étrangement plus amère. Il prit son conseil mais pas comme son ami l'imaginait. S'il devait s'éloigner, c'était de Claire, et personne d'autre.

Lisko le sollicita pour venir rejoindre les autres et il accepta, prêt à passer à autre chose. Il se força à sourire tandis que tout le monde acclamait son arrivée. On lui laissa une place et il ne fut pas étonné de se retrouver à côté de son ex petite amie. Il passa à de l'alcool plus fort pour faire passer ses maux et enfila joint sur joint. La discussion animée ne l'intéressa pas et il vit défiler des invités jusqu'à ce qu'il ne reste plus que Claire. Dans la soirée, elle avait préféré se déplacer, ne supportant pas son mutisme.


« Qu'est-ce que t'as ? »

« Qu'est-ce que ça peut faire ? » Il était penché en avant, les avant-bras contre ses cuisses, les yeux vitreux dans le vide. Mais, s'il l'avait regardé, elle y aurait vu une furieuse colère.

« J'suis venue pour toi ce soir. » Il secoua la tête, refusant d'entendre ses mots. « Pour arranger les choses. On se connait depuis trop longtemps pour arrêter, tu crois pas ? Pardonne-moi. Tu le regretteras pas. »

Il ne put retenir son rire jaune. « Claire... »

«... Tu m'aimes encore. »


Il se leva subitement pour lui ouvrir la porte. Sans un mot, il l'invita à sortir et de par son seul regard, elle ne négocia pas, embrassant à la volée sa joue qu'il essuya avant de verrouiller. Il laissa sa frustration s'échapper et frappa de sa main le mur, faisant trembler ses récompenses musicales. Sans réfléchir, il attrapa son téléphone et appela la seule personne qu'il souhaitait voir.

Assise sur un muret devant une boîte de nuit, Olivia bailla pour la énième fois. La fatigue tirait si fort ses traits qu'elle peinait à garder les yeux ouverts. Le gobelet de café lui réchauffait les mains mais n'était pas suffisant pour la maintenir éveillée. Pourtant, elle restait là, observant la foule sortir. C'était sa dernière chance. Un groupe de filles éméchées étaient en train de retirer leurs talons pour partir et la brune pensa qu'elles étaient les cibles parfaites pour terminer la soirée. Elle serra fortement le plastique dans sa poche pour se donner du courage, sentant chaque pilule à l'intérieur lui donner la nausée.

Elles échangèrent un instant mais Olivia fut interrompu par son portable qui sonnait. Elle le regarda, prête à refuser l'appel. Néanmoins, le nom du polonais s'affichait et elle s'éloigna, fourrant le petit sachet dans son sac à main.


« Allo ? »

« Tu fais quoi ? »

Olivia fronça les sourcils, évaluant son environnement pour trouver un mensonge. « Chez moi. Et toi ? »

« Au studio. » Il souffla, prenant son courage à deux mains. « Je viens te chercher ? J'pourrai te faire écouter des trucs ? »

La panique fit battre son cœur à la chamade. Elle regarda une nouvelle fois la rue maintenant vide. « Non t'inquiète, j'vais venir. Envoie moi l'adresse. »

« T'es sûr ? Il est tard, tu devais sûrement dormir. » Mathieu commença à faire les cent pas, regrettant presque son impulsivité. « On peut faire ça une autre fois sinon. »

« Mathieu ! Envoie-moi l'adresse. » Elle se força à rire et ce fut suffisant pour apaiser la tension.

« Ok ok ! »


Elle courra jusqu'à sa voiture puis attrapa le pochon de son sac. Elle joua un instant avec du bout des doigts, comptant les dernières pilules. Elle le cacha au fond de sa boîte à gant en même temps que l'enveloppe de billets qu'elle avait gagné dans la soirée. A ce rythme, il lui restait encore quelques semaines à endurer cette illégalité avant de rembourser les dettes de son frère.

Elle avait décidé un jour, au café du quartier, tandis qu'un gars qu'elle commençait à connaître sortait une liasse si épaisse qu'elle n'avait pu la quitter des yeux jusqu'à ce qu'elle soit rangée. Elle avait alors cédé à la tentation mais seulement pour résoudre les problèmes d'Alessio.


Lorsqu'elle arriva, Mathieu était déjà dehors, une énième cigarette entre les doigts. Il lui fit signe, un sourire accentuant ses fossettes. Il ne la quitta pas des yeux au moment où elle descendit de sa voiture, observant ses cheveux prendre le vent. Il pensa qu'elle prenait beaucoup trop de temps pour le rejoindre mais ne fit aucun commentaire sur sa lenteur, préférant la fixer. Elle déposa ses lèvres contre sa joue et il regretta ne pas pouvoir y déposer à son tour les siennes contre sa pommette.


« Tu sens la vodka et l'herbe. »

« Un vrai polonais ! » Elle lui frappa le bras tout en riant. « Allez, rentre. »


Il déposa une main sur ses reins pour la guider jusqu'à son studio. Il l'invita à s'asseoir sur un fauteuil devant l'ordinateur tandis qu'il prenait un tabouret tournant. Elle scruta les environs, un regard ébahi ne la lâchant pas. Mathieu ne put retenir un rictus de fierté. Il retint sa chaise par l'accoudoir pour l'empêcher de tournoyer encore une fois.


« Alors, t'en penses quoi ? » Elle se perdit dans ses yeux.

« C'est magnifique. » Le silence se fit tendre pendant qu'elle continuait d'observer les néons. « Tu me fais écouter un truc ? »


Il hocha seulement la tête et profita de sa demande pour mettre, du bout des doigts, ses cheveux derrière ses oreilles avant d'enfiler le casque audio. Elle retira ses baskets pour se recroqueviller dans le fauteuil tandis qu'il pianotait sur l'ordinateur. Il hésita, essayant de trouver un son adapté à la situation. Mais il n'eut le temps de choisir qu'Olivia attrapait la souris pour cliquer sur le premier de la liste. Il se retenu de rétorquer au moment où elle ferma les yeux pour écouter.

Il n'y avait plus de retour en arrière.

Malivia [PLK]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant