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Olivia fixa longuement sa porte d'entrée. Ses doigts restèrent autour de la clé comme si l'absence de retour en arrière lui semblait effrayant. Finalement, elle reverrouilla puis se retourna.

« Hors de question que j'abandonne. » Elle secoua sa tête pour appuyer ses mots, les larmes s'échouant grossièrement sur ses joues. « Pas après tout ça, pas après tout ce que j'ai vécu, tout ce qu'on a vécu. »

« T'avais promis de plus mentir. » Il était assis sur le canapé, la tête entre les mains, incapable de la regarder au risque de céder ou pire, de s'effondrer. « Tu sais que je supporte pas qu'on me mente. Tu sais comment j'suis. J't'ai toujours dit la vérité moi. »

« J'ai fait ça pour te protéger. » Il ria jaune et ce fut comme un coup de poing dans le cœur d'Olivia. « Pourquoi est-ce que tu me crois pas ? » Sa voix craqua dans un sanglot hideux. « Moi je suis amoureuse de toi, j't'ai dit que j'te ferai jamais de mal ! »

« Et bah t'as complètement merdé. »

Le silence s'imposa entre eux. Mathieu s'alluma une cigarette au milieu du salon, se moquant bien de l'agacer ou d'embaumer ses meubles.
Il attendait une réaction ou une pic sarcastique mais elle pleurait beaucoup trop pour prendre en compte la fumée volant dans les airs.

Il se leva pour ouvrir la fenêtre et s'y asseoir.

« Tu sais que peu importe les raisons de tes mensonges ou ce qu'il s'est passé, ça change pas que j'sais plus quand te croire. »

« J'avais toujours de bonnes raisons ! »

« Peut-être pour pas que je casse la gueule à ton frère à l'époque mais là, c'est différent. »

Il jeta son mégot pour s'allumer une autre cigarette. Toutefois, il n'eut le temps de prendre une taffe qu'Olivia l'attrapait. Elle la mit proche de ses lèvres mais Mathieu tenta de lui reprendre. Elle la garda en l'air comme s'il ne pouvait pas l'attraper si seulement il tendait légèrement le bras.

« Arrête de fumer. Si tu fumes, je fume. » Elle écrasa la clope contre le bord de la fenêtre avant de la jeter. « La soirée va être longue et j'ai pas fait tout ça pour que tu te détruises devant mes yeux. »

« J'ai jamais eu besoin que tu fasses quoi que ce soit. » Cette fois, ce fut au tour d'Olivia de ricaner. « Tu trouves ça drôle ? » 

« Un peu. » Elle haussa les épaules nonchalamment. « Tu sais le gars qui est mort, celui pour qui tu travaillais ? » Il haussa les sourcils, attendant une réponse. « Il avait des dossiers contre toi. Il a utilisé mes sentiments pour me faire travailler pour lui. Si je te disais quoi que ce soit, tout aurait été dévoilé et ta vie est bien plus importante à mes yeux que tout le reste. » Elle ria à contre cœur. « J'ai tout fait pour te protéger, j'ai risqué ma propre vie pour toi ! J'suis allée en Espagne pour faire un deal putain ! »

« Quoi ? » Il s'était redressé sous la surprise. « De quoi tu parles ? »

« Les appels, c'était Sam. Il m'a emmené voir ce gars effrayant. Il t'a menacé. » Une énième vague de larmes cassa sa voix. « J'savais pas quoi faire. Le week-end en solo, c'était pour faire cet échange en Espagne mais en arrivant, je l'ai menacé à mon tour pour arrêter, pour ne plus avoir à te mentir et être loin de toi. »

« Liv. » C'était comme pour la prévenir que la prochaine bombe allait faire exploser son propre palpitant et ses sentiments. Il avait envie de pleurer ou de tout foutre en l'air dans cet appartement qui semblait rétrécir à vu d'œil.

« Tu veux la vérité alors je te la donne. » Elle essuya ses pommettes dans son pull et Mathieu eut envie de les lui sécher. « Le truc c'est qu'on menace pas un mec comme ça, pas vrai ? T'as toujours dit que je me mettais dans les problèmes et t'as raison. Il m'a frappée. » Il se pinça les lèvres tout en fermant les yeux. « Et j'ai cru qu'il... mais Sam... Sam a tiré sur lui. J'pensais que c'était terminé mais l'autre, il a répondu aussi et...Sam m'a dit de partir. J'me suis enfuie. »

« Et t'a appelé Maeva. Pas moi, le mec que tu dis aimer, le mec qui ferait tout pour toi. Non, t'as appelé Maeva. »

« Parce que j'savais que tu me pardonnerais jamais. » Elle souffla. « Et j'avais raison, non ? »

Il sortit son paquet de cigarettes. « Tu me permets ? J'pense que ça mérite de digérer. » Elle leva les yeux au ciel face à son sarcasme. « Je m'attendais à tout mais pas à ça. » Il fourragea ses cheveux comme si la vérité piquait son crâne. « T'es témoin de meurtres, Olivia. »

Elle partit du salon sans un mot comme si l'entente de son jugement avait creusé un fossé entre les deux. De ses jambes flageolantes, elle rejoignit la cuisine pour chauffer de l'eau, préférant agir de ses mains plutôt que réfléchir au reflet qu'elle renvoyait à l'homme qu'elle aimait. L'eau eut le temps de bouillir et de brûler la main d'Olivia avant que le blond ne décide à faire un pas vers elle. Elle passa sa main sous le robinet tandis qu'il se retenait d'intervenir. Son absence d'aide la brisa un peu plus. Toutefois, lorsqu'elle retenta de verser la casserole dans son mug, il ne sut se retenir de le faire à sa place.

Elle s'appuya contre la cuisine, se réchauffant les mains contre sa tasse, scrutant discrètement Mathieu qui semblait digérer au mieux les informations.

« Mathieu. » Il quitta le sol pour la regarder. « Qu'est-ce qu'on fait ? »

« J'en sais rien. »

« Qu'est-ce que t'aurais fait à ma place ? »

« C'est différent. »

« Oui, parce que moi j'ai plus rien à perdre. Même toi, je suis en train de te perdre. » Il eut envie de rétorquer mais elle ne lui laissa pas le temps. « Mais imagine que quelqu'un me menace, imagine qu'on te dise qu'on risque... j'en sais rien de me tuer, de me faire du mal, de... T'aurais pris le risque de me le dire ou t'aurais tout fait pour me protéger ? J'ai pas choisi d'être témoin... Je...»

« Je t'aurais menti. » Il haussa les épaules. « J'aurais tout fait pour te protéger. Même tirer moi-même si j'avais pu. »

« Mais si c'est moi, c'est inacceptable. »

« C'est pas aussi simple. »

Elle acquiesça, reposant sa tasse contre le plan de travail. « J'suis fatiguée. J'devrais me coucher. »

« Olivia. » Elle se positionna sur la pointe des pieds pour embrasser sa joue.

« Bonne nuit Mathieu. »

« Arrête, fais pas ça. » Il la suivit jusqu'au salon alors qu'elle s'enveloppait d'un plaid.

« J'vais juste dormir. La nuit nous fera du bien. On se parle plus tard. » Elle s'éloigna tandis qu'il sentait ses pieds se coller au sol. « Si tu pars, claque la porte. »

Il se laissa tomber contre le canapé, retirant ses chaussures pour s'allonger. L'envie de crier lui brûlait les poumons et il voulait frapper les murs pour inhiber les picotements dans ses membres. Il se concentra sur le silence, espérant qu'il soit interrompu par des pas le rejoignant. Toutefois, la pénombre et le calme le rendirent rapidement anxieux. Il tendit l'oreille toute la nuit, la peur de l'entendre pleurer ou cauchemarder rongeant son crâne.

Malivia [PLK]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant