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« Tu sais que je t'aime hein. » Mathieu conduisait, une main sur le volant et l'autre écrasée par la poigne de la brune. « Mais là, j'suis en train de perdre mes doigts. »

« Arrête ! J'suis morte de trouille et tu m'aides pas ! »

Elle lâcha brusquement sa main pour plisser sa robe, ses mains moites laissant des traces humides sur le tissu. Elle s'acharna un peu plus comme si le frottement frénétique pourrait effacer les tâches. Mathieu se gara dans l'allée, prenant son temps pour éteindre le moteur. Olivia scruta la maison comme si elle pouvait disparaître si elle la quittait des yeux.

« Il te connait. » Elle acquiesça tout en se détachant. « Et il t'aime. T'es sa fille. » Il sortit du véhicule pour lui ouvrir la portière, un homme attendait déjà sur le pallier. « Allez, viens, bébé, montre lui quelle superbe femme t'es devenue. »

Elle attrapa sa main pour sortir et il embrassa sa tempe avant de l'accompagner jusqu'à son père. Son visage était sans aucun doute plus ridé que la dernière fois mais surtout, il semblait tinté d'une tristesse, celle d'un parent qui a perdu ses enfants. Son sourire semblait impossible à apparaître malgré la présence de sa fille.Il essaya tant bien que mal d'être accueillant mais seuls ses yeux s'embrumèrent à la vue de sa propre chaire.

« Olivia. » Il se frotta la crâne. « Tu...t'as grandi. »

« Bonjour papa. » Elle resta à quelques mètres de lui, ne sachant comment l'appréhender. Mathieu s'avança pour lui serrer la main.

« Bonjour, j'suis Mathieu, le petit ami d'Olivia. » Sa poigne était faible et fatiguée. Il ne quittait pas des yeux la petite brune.

« Vous...vous voulez peut-être rentrer ? »

Ils hochèrent la tête en le suivant. Mathieu se positionna derrière Olivia, la poussant gentiment à franchir le palier tandis qu'elle semblait gelée sur place. Il observa le couloir où des cadres de photos cachaient une vieille tapisserie. Le lieu semblait abandonné, presque hanté. Il reconnut sa petite amie sur certaines, souriante et encore une simple enfant. Son père était toujours à ses côtés, joyeux et satisfait d'être son paternel. Ils avancèrent jusqu'au salon.

« Rien n'a changé. » La voix d'Olivia était cassée par l'émotion. Tout semblait encore en place comme lorsqu'elle était partie.

« Ma vie s'est arrêtée le jour où t'es partie. » Il baissa la tête, se balançant sur ses pieds.

« Où nous sommes partis. T'as un fils aussi, papa. » Le regard d'Olivia était noir. Mathieu posa sa main dans le bas de son dos pour tenter de l'apaiser.

« Vous voulez boire quelque chose ? »

« Un café, s'il te plaît. » Il fut surpris, elle n'avait plus l'âge de prendre un chocolat, bien entendu.

Le blond leva la main timidement. « Moi aussi. »

Le père s'éloigna dans la cuisine, laissant le couple livré à eux-mêmes. Mathieu déambula dans la pièce, recherchant toutes traces de l'enfance de la brune. Il s'arrêtait à chaque photo, posant son index sur ses traits innocents. Elle attrapa son bras pour l'interpeller.

« J'veux partir. »

« On vient d'arriver. » Il se retourna vers elle pour se plonger dans ses yeux abîmés par la réalité. « Bébé, laisse lui une chance. Il est maladroit mais il veut faire les choses bien, j'en suis sûr. » Il attrapa sa tête pour embrasser son front et ses lèvres. « Si ça ne va pas dans quinze minutes, on partira. Ok ? » Elle acquiesça et il dériva vers les cadres. « T'as toujours été magnifique, c'est pas possible ! J'aurai eu aucune chance à l'époque. »

Il ne tarda pas à revenir. Ils prirent place sur le canapé et Olivia prit instinctivement la place qu'elle prenait depuis toujours. Son père ne put se retenir de sourire timidement tandis qu'elle restait impassible. Le silence se fit lourd et gênant. Chacun était dans sa tête, à la recherche d'une accroche pour discuter et passer le temps.

« Je reviens, il faut que j'aille aux toilettes. »

La brune déposa maladroitement sa tasse contre le table basse. Les deux hommes la regardèrent se faufiler dans le couloir. Mathieu jura entre ses dents. Il avait espéré de belles retrouvailles dignes d'un film. Elle avait fini par être heureuse du courrier, après tout. Toutefois, c'était plutôt une série chaotique dont les scènes étaient plus absurdes les unes que les autres.

« Qu'est-ce que tu fais dans la vie ? » Il leva les yeux vers le père de la brune, ils se ressemblaient, c'était évident. Il lui était impossible de le détester en voyant les mêmes traits qu'Olivia en face de lui.

« J'suis dans l'industrie de la musique. » Il se frappa intérieurement, incapable de représenter les clichés dans l'instant. « Enfin, j'suis...rappeur ? » C'était presque une interrogation, il était prêt à nuancer si ça permettait de sauver le naufrage.

« Et t'en vie ? » Il acquiesça tout en regardant le couloir, priant pour qu'une petite brune vienne le sauver de l'interrogatoire rapidement. « J'aime pas trop le rap, encore moins que ma fille soit avec ce genre de... »

Mathieu se leva, posant si brusquement sa tasse qu'elle aurait pu se briser. «...J'suis désolé, Monsieur, sans vouloir vous manquer de respect, j'ai toujours été là pour Olivia dans, sûrement, les pires moments de sa vie. Peu importe mon propre parcours, je ne l'ai pas abandonnée avec un manipulateur drogué...et elle sait que quoi qu'il arrive, je serai jamais comme vous. » Il souffla, regrettant déjà ses propos. Il voulait être là pour qu'Olivia retrouve son père, pas pour mettre fin à leur relation. « La famille, c'est important pour moi. Elle fait partie de ma famille et donc vous aussi. Elle vous laisse une chance grâce à moi alors ne la bousillait pas. »

« Je ne veux pas qu'elle retombe dans les travers d'un autre homme. »

« Ça n'arrivera pas. » Le blond s'éloigna pour rejoindre sa petite amie. « Pas avec moi. »

Mathieu s'aventura dans les couloirs à la recherche d'Olivia.Il entendit du bruit dans une pièce et fut étonner de tomber dans une chambre d'adolescente. Elle releva la tête vers lui, un cadre dans ses mains et les larmes au coin des yeux.

« C'est pas vraiment un endroit pour pisser. » Elle lui lança un regard noir et il leva les mains en l'air, innocemment. « Juste pour être sûr. » Il prit place à côté d'elle. « Tu m'as abandonné pour mon interrogatoire père-beau fils, c'était pas cool. »

« Regarde. »

« Vous étiez encore super jeune. » Alessio enlaçait Olivia sur une terrasse. Ils semblaient proches, presque inséparables. Il joua avec les mèches brunes tombant sur son visage pour se distraire. « Vous avez toujours été proche. »

« C'était mon meilleur ami. » Elle haussa les épaules. « Il était tout. »

« J'suis désolé. » Il embrassa ses cheveux, la serrant un peu plus contre lui.

« T'as pas à l'être. »

« J'aurai aimé faire plus pour l'aider. Je regrette de ne pas avoir vu clair plus tôt. »

Elle voulut le rassurer mais son père entra dans la chambre. Ils se levèrent tout dos subitement comme prit en flagrant délit.

« On peut parler, Olivia ? » Elle entrelaça ses doigts avec ceux du blond à ses côtés. « Rien que nous deux. »

Malivia [PLK]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant