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La main d'Olivia serra un peu plus fort la poignée en cuir de son sac à main au moment où des larmes se débattaient contre ses cils. Elle prit une inspiration si forte que sa cage thoracique se releva en un soubresaut. Comme elle, la nuit était perturbée, par les lumières de la ville et l'ivresse de la foule.

Elle se murmura quelques encouragements entre ses dents avant de s'approcher d'un groupe bien distincte par leur nombre et leurs éclats de voix. Elle attrapa fermement le bras d'une femme qui n'eut le choix que de se retourner. Toutefois, l'inconnu se libéra si violemment que la brune manqua de chuter, perdant sa contenance à la fois.


« T'es qui, toi ? » Sa voix glaciale affirma sa supériorité et Olivia baissa les yeux en réponse.

« J'suis la sœur d'Alessio. » Claire profita de son malaise pour se rapprocher d'elle, s'imposant par sa taille et sa bande derrière elle. « J'aimerais... » La brune souffla, s'abandonnant. « Je veux que tu le laisses tranquille. J'sais que c'est toi qui l'a présenté à ces gars. »

« Et alors ? » Elle ricana si fortement que les gens aux alentours s'étaient arrêtés dans leurs discussions pour suivre la scène. Olivia essaya de s'en protéger en refermant son bomber contre elle, ses phalanges en blanchissant. « Il est assez grand pour savoir ce qu'il fait. C'est pas mon problème ! »

« S'il te plaît, écoute, j'ferai n'importe quoi, dis-lui simplement qu'ils ne veulent plus de lui. »


Elle espéra que les nombreuses larmes sur ses joues stimuleraient son empathie. Toutefois, lorsqu'elle sentit le bitume écorcher ses mains et genoux, elle comprit qu'il n'y avait plus rien à faire.

Claire l'avait poussée si fort qu'elle n'avait pu retenir sa cheville de se tordre contre le trottoir. Une douleur lancinante la fit pousser un gémissement tandis qu'elle entendait des insultes sortir à profusion de la blonde. Un homme la reteint par le bras pour l'empêcher de lui assainir un coup de pied.


« Putain Claire arrête ! » Enragée, elle se débattit tandis qu'Olivia restait au sol, une main sur sa cheville pendant que tout le monde restait spectateurs. « Calme-toi ! Qu'est-ce qui te prend putain ? »

Claire se retourna pour l'enlacer, imitant une sorte de sanglots qui le fit grimacer. « Elle a été horrible avec moi ! J'me suis juste défendue ! » Elle tenta d'embrasser ses lèvres mais il se libéra, les yeux incapables de se détacher de la brune au sol. « Polak, hé, c'est pas ma faute, j'te jure. »


Il hocha seulement la tête, une mine fermée et froide imprimée sur le visage, avant de s'approcher d'Olivia, toujours au sol qui se pinçait fortement les lèvres pour retenir ses émotions. Il souffla bruyamment au moment où elle refusa son aide. Toutefois, il n'abandonna pas et se mit à sa hauteur. Et, il quitta enfin son regard pour évaluer sa blessure, tâtonnant du bout des doigts sa peau déjà gonflée.


« Tu arrives à la bouger ? » Elle hocha seulement la tête. « Tu es venue comment ? »

« J'vais prendre un uber. »


Olivia essaya de se relever mais sa perte d'équilibre ne la fit que tomber dans les bras de Mathieu qui la rattrapa fermement. Il ne put retenir un ricanement tandis que des phrases plus que douteuses souhaitaient sortir de ses lèvres. Elle murmura un remerciement à peine audible qu'il répondit par un sourire.


« Polak ? » Un homme derrière lui s'écria, les faisant sursauter. « Tu viens ? On va rentrer ! »

D'un simple regard inquiet, il la questionna sur son état. « J'vais bien, merci, tu peux y aller. »

« Bon courage. »


Mathieu s'éloigna pour rejoindre son groupe, non sans regarder une dernière fois en sa direction. Il s'alluma une cigarette avant de rejoindre Claire qui était dans tous ses états dans les bras de ses amies. Il la força à s'arrêter tout en faisant signe aux autres d'avancer dans la ruelle. La blonde crut pouvoir se faufiler dans ses bras mais il recula.


« C'était quoi ça ? » Mathieu commença les cent pas tout en réajustant sa casquette. « Hein ? Putain, Claire, c'est qui elle ? »

« J'sais pas moi. Elle est complètement folle cette fille ! » Le blond lui fit les grands yeux. « J'te jure, je la connaissais pas avant ce soir. Son frère est toujours au quartier, c'est tout ce que je sais! » Il secoua la tête, peu convaincu par ses propos. Seulement, les larmes abondantes sur ses joues le firent céder et il la prit dans ses bras. « J'ai eu peur, j'me suis juste défendue. »

« C'est bon, c'est rien, oublie ça. »

« Tu viens à l'appart ce soir ? »

« Non, j'peux pas. »


Elle hocha seulement la tête, s'enfonçant un peu plus dans son cou pour profiter de son attention devenue rare. Néanmoins, il ne fallut pas plus de quelques secondes pour qu'il s'éloigne.

Un de ses amis l'avait attendu au coin de la rue et il le rejoignit à grands pas. Ils marchèrent silencieusement côte à côte mais le jugement qu'il pouvait ressentir l'agaçait beaucoup trop pour ne pas intervenir.


« Vas y balance ce que tu penses. »

« C'était une grande scène. » Il ricana mais reprit vite son sérieux face au regard de Mathieu.          « Elle s'est mise dans quel merdier encore ? »

« J'en sais rien, j'vais passer quelques coups de fil pour savoir. » Il secoua la tête, inspirant une dernière bouffée de sa cigarette avant de la jeter sur la route. Le sol sembla plus intéressant que les yeux inquiets de son ami. « J'crois pas à son histoire. »

« T'es sûr de vouloir creuser ? C'est ton ex maintenant, c'est plus ton problème. »

Il haussa les épaules, ses sourcils se fronçant en revoyant la scène. « J'fais pas ça pour elle. »


Devant le café, la foule s'était dissipée et Olivia put attendre seule son Uber, tout en exprimant toute sa détresse par des sanglots bruyants. Elle massa sa cheville jusque chez elle tandis que le chauffeur sifflait sur les musiques de la radio.

Lorsqu'elle arriva, les lumières de l'appartement étaient encore allumées et elle ne put retenir un juron en pensant que son frère n'était pas encore couché. Elle s'efforça de ne pas boiter tandis qu'elle déambulait dans les pièces à la recherche d'Alessio. Elle le trouva finalement allongé sur le canapé, un sachet de petits pois sur sa pommette. Elle prit place à ses côtés malgré ses lamentations.


« Salut. »

« Qu'est-ce qu'il s'est passé ? »

Alessio se redressa pour embrasser la joue de la brune et se faufiler dans sa chambre. « C'est rien sœurette, j'vais dormir, j'attendais juste que tu rentres ! »


A sa réponse, les larmes d'Olivia remontèrent à flot. Subitement, alors que la culpabilité la rongeait jusqu'au cœur, elle se précipita dans la salle de bain. Elle ouvrit si violemment le tiroir qu'il manqua de sortir du meuble. Ses doigts tremblants fouillèrent jusqu'à tomber sur un sachet plastique qu'elle connaissait que trop bien. De colère, elle les vida dans les toilettes avant de tirer la chasse d'eau. Le bruit ne fut pas suffisant pour camoufler son sanglot et Alessio arriva en trombe pour la prendre dans ses bras.


« Tout va bien Olivia. » Il la berça, assis sur le carrelage gelé de la salle de bain. « Tout ira tant qu'on est tous les deux, tu te rappelles ? » Elle resta silencieuse à ses mots tandis qu'il attrapait le pochon de ses mains moites. Elle n'eut besoin que de fermer les yeux pour se retrouver plusieurs années auparavant, à la rue, son grand frère enlacé contre elle, réalisant cette même promesse. « Ça va aller. »

« J'suis désolée. »

« Moi aussi. »

Malivia [PLK]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant