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Mathieu n'avait pas eu de nouvelles d'Olivia depuis quelques semaines. Lui-même n'avait pas essayé de la joindre après la froideur de la brune pour leurs aux-revoir. Alors, il était juste parti en séminaire, préférant se noyer dans la musique plutôt que l'alcool.

Toutefois, il était temps de revenir à la réalité.

Il n'avait jamais cru au destin. Néanmoins, lorsqu'il la vit sur le terrain, une casquette et une capuche tentant de cacher son identité, il sut que leur relation n'était pas une simple coïncidence. Il n'alla pas la voir, restant appuyé contre sa voiture, observant ses faits et gestes.


Olivia avait les mains moites dans son sweater. La fin du calvaire était aujourd'hui. Sam arriva nonchalamment, comme s'il ne risquait pas sa vie à chaque instant. Elle sortit de son sac à dos une enveloppe épaisse.


« Le compte est là. »

« Ton frère n'a plus de dettes Olive. » Il haussa les épaules, un sourire malicieux sur les lèvres. « Garde ton argent, c'est bien mérité. J'ai jamais vu quelqu'un vendre aussi rapidement, tu es douée. »

Olivia grimaça en entendant son compliment, Mathieu s'affichant dans son crâne. « C'est impossible qu'il ait remboursé sa dette... »

« Tourne la page. T'es libre. »


Il lui tapota l'épaule et elle resta bouche bée tout en rangeant son enveloppe dans son sac. Elle s'éloigna sans un au revoir, la tête prise dans une réflexion intense. Elle ne remarqua pas le blond qui pourtant, malgré son bronzage, portait un teint délavé de surprise. Il attrapa son avant-bras pour la retenir.


« Alors c'est ça... » Elle retira sa capuche et leva les yeux vers lui. Son cœur eut un raté, il lui avait manqué bien plus qu'elle n'osait l'avouer. « Ça aurait pu mal finir. » Elle hocha la tête, silencieuse.


Mathieu ne put retenir sa main de retirer sa casquette pour toucher ses cheveux. Ils avaient poussé et il adorait beaucoup trop. Il glissa ses mèches derrière son oreille mais celles-ci retombèrent immédiatement lorsqu'elle se jeta dans ses bras.


« Où est-ce que t'étais ? »

« J'avais besoin de partir. » Il embrassa son crâne, inhalant son shampoing. « J'suis désolé. Si j'avais su, je ne t'aurai pas laissé prendre ces risques. »

Elle s'éloigna légèrement, chancelant sur ses pieds. « C'est rien. » Ses yeux fixèrent le béton. « Est-ce que tu veux venir à la maison ? »

« Oui. » Il hocha la tête, pris d'une soudaine énergie envahissante. « Je dois déposer mes affaires et dire bonjour à ma grand-mère. Je te rejoins dans quelques heures. »

« Ok. Parfait. »


Elle se retourna pour rejoindre sa voiture mais il l'arrêta en chemin pour déposer un baiser rapide sur les lèvres. Elle esquissa un sourire timide tandis que le sien était fier. Il la laissa partir, attendant qu'elle regagne sa voiture pour monter les escaliers par quatre jusqu'à l'appartement. Il jeta son sac de voyage dans sa chambre avant de se précipiter sous la douche. Ses mouvements furent rapides, tout ce qu'il voulait, c'était retrouvé Olivia.

Néanmoins, il dut s'arrêter par la cuisine où sa grand-mère faisait du café. Il l'enlaça rapidement, tentant de refuser sa tasse tendue. Finalement, il la prit. On ne lui refusait jamais rien.


« J'dois partir après mamie. »

« Si tu n'avais pas ce sourire bête sur le visage, je t'aurai empêché. Mais qui que ce soit qui te fasse avoir ce sourire, je l'adore déjà. » Ses joues rougirent. Rien n'était plus gênant qu'être confronté à ses propres émotions. Surtout pour Mathieu. « Qui est-ce ? Tu t'es rabiboché avec Claire ? »

Il manqua de s'étouffer dans son mug. « Quoi ? Nan ! Elle et moi, c'était terminé depuis un moment, j'me voilais juste la face. Je l'ai ignorée depuis des semaines. » Il haussa les épaules nonchalamment, le manque de peine dans son cœur l'étonna. Il avait tourné la page et l'avait pardonnée. Plus aucun sentiment n'émanait à son prénom, ni amour, ni haine.

« Donc ? » Elle haussa les sourcils, un rictus narquois sur les lèvres.

« Elle s'appelle Olivia. Elle est... j'en sais rien. Je l'aime bien. » Il déposa son café dans l'évier, parfaite distraction pour éviter le regard chargé d'amour de sa mamie. « Je l'aime vraiment bien. »

« Alors, qu'est-ce que tu fais encore ici ? Va la voir. »

« Ouais, j'y vais. » Il embrassa sa joue.


Il enfila sa veste et attrapa ses clés puis dévala les escaliers. Il ne put se retenir de prendre quelques secondes pour s'allumer une cigarette tout en scrutant le soleil qui disparaissait derrière les bâtiments. Malgré la soirée plaisante et les mots tendres de sa grand-mère, à la vue du terrain, il eut une montée d'angoisse inexplicable. Le malaise envahissait chaque muscle tant bien qu'il frissonna. Il jeta sa clope dans les égouts, incapable de la terminer.

Dans la voiture, il regarda son téléphone vide de notifications. Son anxiété augmenta d'un niveau, Olivia lui envoyait toujours un message pour le prévenir de son arrivée. Il essaya de l'appeler mais fut accueillie par sa messagerie. Le cœur aux bords des lèvres, il revit la brune remettre l'enveloppe pleine d'argent dans son sac.

Pourquoi est-ce qu'il ne l'avait pas pris ?

Il était improbable que son frère ait réussi en quelques semaines à rembourser.

Et Mathieu savait ce qu'on faisait aux personnes qui ne remboursaient pas.

Il démarra en trombe, dépassant les limites de vitesse pour rejoindre au plus vite le quartier d'Olivia. Il sentit une sueur froide glisser dans son dos lorsqu'il vit toutes les lumières bleues éclairant la rue.

Lorsqu'il sortit de sa voiture, ses jambes semblèrent se figer dans le sol. Il dut prendre une longue inspiration pour pouvoir décoller ses pieds. La porte était fermée devant lui, il hésita un instant à l'ouvrir sans permission mais l'espoir d'avoir tort lui fit toquer et attendre derrière la porte.


« Allez, Olivia, ouvre-moi. »


Il sonna encore et encore. Enfin, la porte s'ouvrit.

Toutefois, ce n'était pas la brune mais un policier en uniforme, un calepin à la main et le visage déformé par l'horreur. Il n'eut le temps de dire un mot qu'il se faisait pousser par deux autres personnes. Il essaya de se débattre tandis qu'un brancard passait. Il espérait y trouver un visage connu mais tout ce qu'il vit était un corps dans un sac mortuaire. Soudainement, il arrêta tout mouvement.


« Monsieur, vous ne pouvez pas être ici. » Il suivit du regard la victime jusqu'à ce qu'elle disparaisse dans l'ascenseur. « Monsieur, partez avant que je vous arrête. »

« Nan, nan. » Il fourragea ses cheveux. « Je les connais. Je connais les gens qui vivent ici. »

« Et vous êtes ? »

« Mathieu. Mathieu Pruski. » Il souffla, se retenant de le frapper pour passer. « Le mec d'Olivia. » Qu'est-ce que ça aurait pu sonner beau dans d'autres circonstances. « Je vous en supplie, laissez-moi passer. »


Mathieu ne sut si c'étaient les larmes dans ses yeux ou son instance qui fut suffisant mais il le laissa passer. Toutefois, il s'arrêta net dans l'entée en voyant le linoléum auparavant blanc, couvert de rouge.

Malivia [PLK]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant