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Le dernier barbecue du quartier était tout aussi important que le premier. Les dernières journées estivales étaient les premiers signes pour son organisation. Les jeunes installaient alors des tables et des chaises en plastique sur le terrain de foot. C'était un événement convivial que leur groupe appréciait depuis leurs tendres enfances. Toutefois, Mathieu avait, pour la première fois, hésité. L'idée qu'Olivia se retrouve devant le probable meurtrier de son frère n'avait rien de tentant. Cependant, lorsque Maeva en avait parlé devant tout le monde, elle avait accepté, sous la surprise générale.

Pourtant, alors qu'il était à sa troisième vodka, son deuxième joint et son dixième coup d'œil sur le parking, il douta. Il lui écrivit un énième message acharné, l'inquiétude et l'impatience le rendant désagréable. Néanmoins, la chance fut de son côté car la voiture se garant l'interpella avant qu'il n'envoie son mécontentement.

« C'est pas trop tôt. » Il ne perdit pas de temps pour se lever et la rejoindre.

La brune jeta son second téléphone à l'arrière. Elle se regarda dans son rétroviseur central pour essuyer son maquillage dégoulinant et recoiffer ses cheveux en pagaille. Elle n'eut le temps de souffler qu'un grand blond ouvrait sa portière pour l'aider à sortir. Elle se força à tirer ses traits dans un air joyeux.

« T'es en retard. » Elle put sentir l'alcool sur ses lèvres lorsqu'il l'embrassa. « T'as de la chance d'être trop belle. »

« J'suis désolée, le boulot, tu sais. »

En réalité, elle avait dû faire des centaines de kilomètres en voiture pour livrer un sac pour le gérant. Elle n'avait eut le courage de l'ouvrir, préférant se faire les pires scénarios sur la route, passant d'un paquet d'argent à un corps coupé en morceau. Elle avait perdu du temps sur le retour, incapable de regarder la route à cause de la chute d'adrénaline qui floutait sa vue de larmes.

« Ils vont finir par te tuer avec toutes ses heures. » Elle haussa les épaules tout en pensant qu'il était bien plus proche de la réalité qu'il ne pouvait imaginer. « Allez, viens, tu as quelques shooters à rattraper. »

Il attrapa sa main, entrelaçant ses doigts pour ne pas qu'elle s'échappe. Elle salua timidement les nombreux présents avant de s'installer à côté du blond, tirant sa chaise jusqu'à ce que leurs genoux se touchent. Il attrapa une assiette cartonnée qu'il remplit jusqu'à ce qu'elle se plie. Il lui déposa et elle grimaça devant, la nausée soudainement envahissante. Elle le remercia malgré tout pour son attention et tritura de longues minutes une des saucisses froides et brûlées. Il s'était vanté de ne pas l'avoir fait au vu de la qualité et elle en avait ri.
Il se concentra sur ses amis, discutant dans un grand brouhaha si assourdissant qu'Olivia ne faisait l'effort que de se concentrer sur son genou se secouant frénétiquement contre le sien et de ses doigts tatoués jouant avec un filtre en morceau sur la table.

« Bébé. » Il utilisa sa voix la plus douce comme si sa demande était d'un enjeu majeur. « J'vais faire un petit foot. » Elle pouffa doucement alors qu'il faisait la moue. « Genre pas longtemps, tu vois. »

« Vas y ! »

Elle le poussa gentiment et il l'embrassa chastement avant de s'éloigner. Elle profita d'être seule pour jeter son assiette dans la poubelle la plus proche. Ses jambes étaient encore flageolantes. Elle resta un instant devant les ordures comme si elles représentaient des œuvres d'art qu'on admirait. Seulement, elle était juste épuisée, éreintée, au bout de sa vie en somme. L'anxiété et les kilomètres avaient eu fin d'elle.

Elle se retourna pour regarder les garçons jouer au foot, ou du moins, se disputer entre mauvais joueurs. Elle aurait aimé avoir le cœur à en rire.

« Ça a été le trajet ? »

Olivia sursauta, la main sur le cœur. « Putain ! T'es obligé de toujours apparaître dans mon dos. » Sam haussa les épaules et elle fut étonnée qu'il ne se moque pas d'elle. Lui non plus n'avait pas le cœur à la fête. « Ça a été. »

« Tant mieux. » Sam hocha la tête plus pour lui même que pour elle. Les mains dans les poches et les épaules voûtées, elle aurait pu croire qu'il voulait disparaître de la Terre. « Il a encore besoin de tes services. » La brune ferma les yeux, le menton tremblant seul signe de détresse. « J'suis désolé. Il faut que tu ailles en Espagne. » Elle ria nerveusement pour se réveiller de son cauchemar. « Ne traîne pas, Olivia. Tout est dans ta voiture. T'as juste à faire le trajet. » Et c'est ainsi qu'il s'éloigna. « Bon courage, Olive. »

« Génial. »

La brune souffla frénétiquement, tentant par tous les moyens de se calmer avant de retrouver la foule. Le sentiment de déjà vu lui donna la nausée, elle, anxieuse, s'apprêtant à interpeller Claire pour défendre son frère mais surtout à rencontrer Mathieu. Son premier amour. Le regret s'effaça net au moment où le blond courut vers elle, un sourire béa et les joues rosées du match. Il s'arrêta devant elle, les poings sur le côtés, achevé.

« Quel sportif. » Elle se força à glousser et il ne remarqua pas le faux tintement.

« C'est pas ce que tu dis quand on est tous les deux. » Elle frappa son épaule tout en levant les yeux au ciel. « Faut que j'arrête de fumer putain. » Elle acquiesça, sachant très bien que ce n'étaient que des paroles en l'air. Elle profita de ce moment de silence pour s'enfoncer dans ses bras. Elle ignora son t-shirt moite et son odeur. « Je schlingue à mort. » Elle affirma une nouvelle fois ses propos sans parler. « J'ai envie de rentrer. »

« Il faut que je te dise un truc. » Il voulut s'éloigner pour la regarder mais elle resserra leur étreinte, incapable de l'affronter. « Promets-moi de m'écouter jusqu'au bout, de pas t'énerver ou de pas le prendre pour toi. Promets-moi de pas crier, de pas... »

«... Liv. » Il embrassa ses cheveux tendrement, marchant en crabe jusque derrière le bâtiment, là où il l'avait cachée, où il l'avait protégée pour la première fois. Olivia eut un pincement au cœur. « Dis-moi. »

« J'aimerais partir un week-end... » Le silence était pesant, Mathieu se sentait désaouler à vu d'œil. « toute seule... »

« Toute seule ? Où ça ? » Cette fois, il l'éloigna et elle le laissa faire. Son regard devenait distant et inquisiteur, passant du chaud au froid. Elle savait qu'il se sentait bafouer. « Pourquoi seule ? J'peux me rendre disponible ou Mae. »

Elle ne s'était pas imaginée mentir aussi facilement devant lui. Elle s'était promise à l'époque de ne pas le tromper, non seulement avec un autre homme mais aussi en mensonge. Et là voilà, déblatérant des excuses, utilisant même la mort d'Alessio et les ressentiments de Mathieu. Toutefois, la culpabilité ne faisait pas surface. Elle était prête à se piétiner le cœur si cela permettait à Mathieu d'être en vie et de vivre ses rêves. Après tout, elle, elle n'en avait plus depuis longtemps.

Pendant son monologue, il hochait la tête,essayant d'intégrer tout ce qu'elle disait, essayant de trouver une faille pour refuser.

« T'en penses quoi ? » Elle baissa le regard en attendant le verdict. « Ça sera que deux jours. Et tu seras occupée avec tes interviews. »

« J'en sais rien. » Il s'alluma une cigarette. « Je peux poser des conditions ? » Elle haussa les épaules, les attendant. La peur de devoir rompre lui monta les larmes aux yeux. « Je demande juste d'avoir de tes nouvelles régulièrement. » Ce fut à son tour de fermer ses paupières pour cacher sa contrariété. « Et reviens. »

Elle se précipita dans ses bras pour y abandonner ses émotions. « Promis. » Il caressait ses cheveux, essayant maladroitement de l'apaiser alors que lui même avait l'impression que son cœur était en feu. « Je t'aime. »

« Moi aussi. Moi aussi, Liv. »

Malivia [PLK]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant