Malivia [PLK]

[18]

Olivia ouvrit la porte le plus lentement possible. La lumière matinale passant à travers les rideaux lui permit de se guider. Elle se dirigea vers le deuxième lit où Lisko dormait. Elle le secoua légèrement et il se réveilla dans un sursaut.

« Putain Olive ! » Il enfonça sa tête dans l'oreiller, le cœur battant la chamade de stupeur. « Tu te trompes de mec là. »

Elle frappa son épaule, levant les yeux au ciel. « Combien pour dormir autre part ? » Il pouffa à sa demande. « J'suis sérieuse ! »

« Rien du tout. » Il se leva, prenant le temps de s'étirer. « C'est mon meilleur pote et il t'aime. » Il lui fit un clin d'œil avant de partir de la chambre.

Elle souffla un coup pour se donner du courage. Sur le ventre, Mathieu semblait dormir profondément. Elle s'approcha doucement, l'appréhension rendant ses mouvements maladroits. Elle déposa sa main sur son bras tout en se penchant. L'hésitation sut s'éteindre et elle déposa ses lèvres contre son dos dénudé. La chaire de poule s'y dessinant lui indiqua qu'il se réveillait. Il ouvrit un œil pour vérifier la provenance de ses tendresses avant de tourner la tête à son opposée.

« Qu'est-ce que tu fais ? » Malgré sa froideur, elle le poussa un peu pour s'allonger à ses côtés. Elle s'installa de profil et laissa ses doigts esquisser des arabesques sur sa peau. Ses muscles se contractant pour retenir des frissons. « Liv, sérieux.»

Elle se pencha à son oreille, comme si le dire à haute voix serait trop réelle et effrayant. « C'est suffisant. T'es suffisant. » Ses ongles rencontrèrent sa nuque et la naissance de ses cheveux. « Et j'veux prendre le risque. » Cette fois, il ne put retenir ses frémissements. « Dis quelque chose. »

« Et si ça marche pas ? » Il tourna la tête pour lui faire face. La fatigue sur les deux visages se lisaient, la nuit avait été riche en ruminations.

« Et si ça marchait ? » Son pouce traça des cercles contre sa joue et il se détendit. « Allez, Mat, depuis quand t'es frileux ? »

« Moi non plus, j'ai pas envie de tout gâcher. » Il se pinça les lèvres, scrutant le visage de la brune comme une œuvre d'art.

« Ok, comme tu veux. »

Olivia se leva, espérant qu'il la retienne. Et c'est ce qu'il fit, son bras englobant son bassin pour la refaire tomber dans le lit. Il la coinça sous son propre corps mais elle se laissa faire, profitant de son parfum et de sa chaleur. Elle l'encercla à son tour pour le rapprocher un peu plus. Et malgré la température ambiante, ils restèrent là, collé l'un à l'autre, le silence seulement troublé par leurs respirations.

« Dis. » Mathieu marmonna, tombant dans le sommeil. « Tu me feras écouter tes sons ?... J'veux les écouter avec toi. » Malgré la fatigue, il se leva pour attraper ses écouteurs. « Maintenant ? » Elle pouffa tandis que l'excitation du blond était visible. Elle se redressa dans le lit et il s'installa en face d'elle.

« Prête ? » Elle hocha la tête, tout sourire pendant qu'il pianotait sur son téléphone. « Ok, c'est bon. »

Le premier son se lança et Olivia ferma les yeux. Elle avait déjà entendu celui-ci mais le besoin de lui montrer son intérêt profond était indispensable alors elle ne pipa aucun mot. De plus, cela lui permettait de ne pas tomber sur le regard inquisiteur du blond.

Elle resta si immobile que Mathieu sentit son cerveau bouillir de stress. Lorsque la deuxième musique se lança, il attrapa les pieds d'Olivia pour déplier ses jambes. Le contact de sa peau lui permit de se détendre alors qu'elle essayait, elle, de rester concentrer sur ce qu'elle entendait.

« Il faut que tu le clipes ! »

« Ouais ? » Elle hocha la tête vivement.

« Tu vas tout défoncer ! »

Pour seule réponse, il baissa la tête, se pinçant sa lèvre pour retenir son sourire. Il tira doucement sur ses chevilles, ne lui laissant pas le choix de s'approcher encore de lui. Ses mains glissèrent dorénavant sur ses cuisses, les massant pour se distraire. Il apprécia son mini-short qui lui laissait un accès libre sur sa peau. Lorsqu'il glissa ses doigts sous l'ourlet, Olivia attrapa ses mains.

« J'aimerais me concentrer. »

Elle ouvrit les yeux, le regard désireux mais surtout impatiente. Elle entrelaça leurs doigts puis se recentra sur l'album tandis qu'il souriait, s'approchant de son oreille pour murmurer quelques paroles. « J'ai un petit ange sur l'épaule qui me répète que je les baise sans arrêt, que ça kicke comme jamais...»

Il embrassa sa joue avant de s'éloigner légèrement. Les sons s'enchaînèrent tandis qu'elle restait immobile, concentrée sur les paroles et les instrus. Toutefois, avant qu'un autre commence, le blond mit sur pause sous la mine renfrognée de l'Olivia.

« Quoi ? »

« Je l'ai écrit il y a longtemps. » Il avait rougie et elle manqua de glousser.

« Allez, vas y, mets. » Il appuya sur lecture et Pourtant se lança. Elle se concentra sur les paroles et entendit le cœur de Mathieu être brisé en quelques rimes. Les yeux d'Olivia s'écarquillèrent. « Oh Mat, c'est magnifique. » Elle embrassa sa joue et il haussa les épaules. Ils avaient déjà parlé de Claire, de son premier amour, de sa première peine. Il lui avait confié son manque de confiance dans la gente féminine depuis qu'il avait été trompé et elle en avait eu plusieurs aperçus.

« C'est du passé. »

Olivia scruta Mathieu lorsque le neuvième son se lança, la mélodie l'interpellant. Il fronça les sourcils, l'émotion envahissant ses traits. La bouche de la brune forma un o tandis que les paroles défilaient. Elle ferma ses paupières, tentant de chasser le regard nerveux du blond. Néanmoins, elle ne sut retenir son propre émoi et une larmes s'échoua sur la commissure de ses lèvres. Le pouce du polonais essuya sa joue et s'arrêta sur sa bouche, l'envie d'y déposer la sienne devenant pressant. Il lui retira les écouteurs.

« T'arrives à me faire braire sur du rap, putain ! » Il pouffa au moment où elle reniflait bruyamment. Il s'abstenait lui-même de fondre tant il était submergé. Il la tira vers lui, ses mains se posant sous ses fesses pour la glisser sur ses cuisses. « Tu devrais dire plus souvent ce que tu ressens et ce que tu as vécu. Les gens vont adorer te connaître un peu plus. Moi qui t'aime, j'aime te connaître et t'écouter. » Elle insista pour croiser son regard et il se plongea dans ses larmes. « J'suis fière de toi. Et tu devrais être fier de qui t'as été et encore plus  de qui t'es aujourd'hui. »

« Arrête, sinon c'est moi qui vais chialer. »

Elle passa ses mains dans les cheveux du blond, insistant sur ses tempes. Lui, gardait les siennes pendantes le long de son corps. Il laissa sa tête se reposer sur la brune lorsque les doigts d'Olivia glissèrent le long de sa nuque. Elle s'y attarda un instant avant de rejoindre ses épaules. Il frissonna sans pudeur lorsqu'elle prit en coupe son visage pour embrasser son front, son nez puis sa mâchoire. Instinctivement, il ferma les yeux, imprégnant chaque sensation au fond de son crâne pour toutes les fois où il se sentirait seul. Mathieu ne put s'empêcher d'installer ses mains dans le bas du dos d'Olivia et dans un geste, il la glissa vers lui pour l'avoir un peu plus proche.

Ils restèrent ainsi quelques minutes, les corps enlacés, les yeux clos. Un souffle d'apaisement s'échappa de Mathieu qui fut étouffé par les lèvres de la brune.

Ils n'avaient jamais su être amis.