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Mathieu n'avait pas revu Olivia depuis plusieurs jours et était persuadé qu'il avait réussi à la dissuader de revenir dans le quartier. Il en était presque à avoir oublié cette mésaventure. Du moins, si ce n'était pas toutes les fois où il scrutait le parking à la recherche de sa voiture ou  de son frère. Ils s'étaient croisés plusieurs fois mais n'avaient échangé que quelques regards belliqueux. Il ne pouvait trouver les mots pour exprimer la haine qu'il avait contre lui mais son regard en disait long.

Il salua rapidement ses amis devant le pmu, déjà installés depuis deux bonnes heures autour d'un café tandis qu'il avait encore la tête ensommeillée de sa nuit au studio. Il enfonça un peu plus sa casquette avant de rentrer à l'intérieur.


« Un café et deux paquets de malboro. » Il leva seulement le nez et resta bouche bée. « T'es pas sérieuse. »

« Bonjour à toi aussi. » Elle lui fit son plus beau sourire pendant qu'elle démarrait la machine à café. « Terrasse ou intérieur ? »

« Intérieur du coup. » Il attrapa un tabouret pour se coller au comptoir et elle lui déposa son café et ses cigarettes. Il se frotta le visage, espérant retirer d'un geste sa fatigue. « Qu'est-ce que tu fous là, Olivia ? »

Elle haussa les épaules tout en lui faisant un clin d'œil. « Je travaille, tu vois bien ? C'est ce que les gens font....travailler. »


Elle s'éloigna le laissant fixer dans le vide son café. Elle continua à prendre les commandes tandis qu'il sortit pour fumer une cigarette. Même si ses amis essayaient de l'inclure dans la conversation, il préféra rester dans son coin, ne se préoccupant que d'une oreille les ragots du quartier. Une énième cigarette entre les lèvres, il aperçut Olivia sortir pour sa pause, un café dans les mains. Elle s'était attachés les cheveux et il fut surpris de s'attarder devant sa nuque. Mathieu souffla avant de se rapprocher.


« Pourquoi t'insistes ? »

« Et toi, pourquoi t'insistes ? » Il hésita et elle en profita pour s'engouffrer dans la brèche. « Pourquoi tu te préoccupes de ça ? »

« J'en ai marre de voir des drames en bas de mon immeuble. »


Et il la laissa là, hébétée.


Il fallut plusieurs jours avant que Mathieu ne retrouve le courage de l'affronter. Toutefois, son ego avait suffisamment refait surface pour y aller d'un pas certain. Du moins, son manque de cigarettes l'avait poussé ce matin-là à y retourner. Hors de question de faire plusieurs kilomètres, après avoir passé la nuit au studio, pour des clopes.


« Salut. » Il hocha seulement la tête et Olivia put sentir ses muscles se tendre face à ce froid. « Un café et deux paquets ? »

« Non, une cartouche. » Il attrapa lentement son portefeuille et fouilla dedans pour ne pas croiser son regard. Certes, il avait été serein en rentrant mais se trouver là, devant elle, n'était pas aussi simple que prévu. « J'ai pas vraiment envie de venir ici, maintenant. »


Elle ne prit pas la peine de lui demander où il voulait prendre son café avant de lui en donner un à emporter. Elle ne lui laissa pas le temps de ranger sa carte bancaire qu'elle prenait la commande suivante. Il souffla bruyamment avant de décaler ses affaires sur le côté. Il aperçut la brune sourire sournoisement .


« Salut Olive ! »

« Ça va les gars ? » En entendant son air joyeux, il ne put que lever la tête vers elle et ses interlocuteurs. Son agacement fut si visible qu'il interpella Olivia quelques secondes. « Comme d'habitude ? »


Elle les servit tandis que Mathieu restait au bar, semblant prendre son temps à ouvrir sa cartouche et ranger ses affaires alors qu'il voulait juste entendre leur conversation. Néanmoins, il dut sortir de sa rêverie lorsqu'une main lui tendit un petit sachet de bonbons. Il l'attrapa tout en scrutant le sourire timide de la brune. Face à sa mine renfrognée, elle se pinça les lèvres et il crut sentir ses propres joues rougir.


« On est le matin. »

« C'est pour m'excuser. » Elle haussa les épaules avant de se retourner, trouvant soudainement son idée très stupide. « Je suis désolée pour la dernière fois... »

« Cool. »


Elle n'eut le temps de répondre qu'il avait pris la fuite. Il s'installa sur le trottoir, assis sur le rebord de fenêtre d'une maison. Elle l'observa jouer avec le sachet quelques instants avant de l'ouvrir tout en secouant la tête. Elle ne put se retenir de pouffer. Elle se dépêcha de servir les clients pour sortir, un café dans la main.


« Finalement, tu les as mangés. » Elle prit une gorgé de son gobelet et grimaça. Comment Mathieu pouvait-il boire régulièrement ce café ? « T'as l'air fatigué. »

« J'ai passé la nuit au studio. » Pour appuyer ses mots, il se frotta les yeux. Mais, son sarcasme fut si cinglant qu'elle se moquait bien de voir ses traits épuisés. « T'as l'air d'avoir déjà de superbes relations avec les gars. Des infos ? »

« Rien que je ne sache déjà. »

« Bon, c'est à toi de me dire pourquoi. » Il s'alluma une cigarette tandis qu'elle le questionnait du regard. « Pourquoi tu insistes ? »

« C'est mon frère, à quoi tu t'attends ? Tu ne ferais pas pareil pour ta famille ? »

« J'sais pas moi. Mais t'es loin d'être une meuf qui essaye de s'introduire dans un gang de quartier pour sauver son frère qui doit des milliers d'euros. » Sa nonchalance fit monter les larmes aux yeux d'Olivia.

« Comment tu sais ce qu'il doit ? »

« J'ai des relations. » Il la chahuta gentiment par l'épaule, espérant chasser sa tristesse. « Il n'a qu'à travailler dur, les rembourser et ça sera terminé. Vous pourrez tourner la page. C'est pas à toi de subir tout ça. »


Mathieu avait sûrement raison. Toutefois, il n'avait pas tous les éléments de l'histoire. Parce que, s'il avait su, il aurait tout fait pour éloigner Olivia. Il jeta son mégot au loin et si elle n'avait pas eu un sanglot coincé dans sa gorge, elle lui aurait ordonné de le ramasser. A la place, elle leva les yeux au ciel tandis qu'il se levait pour partir.


« Ça va aller, Liv. »

« Liv ? »

« Hmhm. » Il haussa les épaules et elle ria. « C'est toujours mieux qu'Olive, non ? Si eux te donnent un surnom, j'y ai le droit. »

Et il s'éloigna, un sourire fixé sur le visage.

Malivia [PLK]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant