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Mathieu avait longuement hésité à venir. Il avait essayé plusieurs tenues et avait mis tellement de déodorant qu'il sentait à plusieurs mètres. Mais finalement, malgré une anxiété grandissante, il avait décidé d'y aller, au moins pour voir la brune. Il n'avait pas forcément l'intention de la récupérer, même si cette idée lui allait. Non, il voulait juste la voir, lui sourire, peut-être même lui parler.

Néanmoins, lorsqu'il arriva et qu'il la vit, riante, un verre à la main et une robe détaillant ses formes, il crut tomber sur ses genoux tant ses jambes étaient flageolantes. Il s'arrêta net dans l'entrée.

Il fallut plusieurs secondes à Olivia pour le remarquer. Et, sans surprise, sa réaction fut la même. Toutefois, elle, elle se laissa trahir par son regard. Elle baissa les yeux avant de s'isoler dans la cuisine. Il la suivit sans réfléchir, inconsciemment aimanté. La confrontation allait être bien plus précoce que prévue. Il en fut soulagé, l'idée de s'ignorer toute une soirée tout en sentant la présence de l'autre n'avait rien d'attractif et de plaisant.


« Salut. » La brune était appuyée contre le plan de travail, les bras croisés comme pour se protéger. « Je... si tu ne veux pas me voir, si tu veux que je parte, je le ferai, t'as juste à me le demander. »

« Ne sois pas stupide. J'savais que t'allais venir. »

« T'as coupé tes cheveux. »

« J'me demandais si t'allais remarquer. » Elle y toucha instantanément, coinçant une mèche derrière son oreille.

« Tu me manques. » Il fixa ses chaussures, prêt à ce que son cœur se fasse écraser. « J'croyais pouvoir t'oublier mais j'y arrive pas. J'ai plus envie de faire semblant. J'aurai jamais dû te laisser partir. »

« Mathieu... » Elle secoua la tête, son propre battant au bord des lèvres.

« Je m'en voulais tellement. » Il s'approcha d'elle. Ils n'étaient plus qu'à un mètre l'un de l'autre. Olivia s'en retrouva le souffle coupé. « Je m'en voulais de ne pas avoir su te protéger de tout ça, de tout ce bordel, putain, je pouvais plus te regarder souffrir. » Il tendit son bras vers elle. Son manque de refus ou de recul, le fit avancer encore une fois, jusqu'à ce que ses doigts touchent tendrement sa joue. « Mais j'aurai dû être là au lieu de me barrer. »


La brune ferma ses paupières, profitant de son contact un instant avant de lui attraper la main pour entrelacer leurs doigts. Elle le tira un peu plus vers elle mais Mathieu ne fit aucun mouvement, attendant qu'elle s'ouvre à son tour, qu'elle lui laisse cette chance. Son souffle lourd s'écrasait contre le front d'Olivia.


« Dis quelque chose. Insulte-moi, comme tu veux mais dis-moi quelque chose. »

« Toi et moi, ça marchera jamais. » Mathieu sentit ses mots désintégrer son cœur. Il tenta de s'éloigner, de relâcher sa main mais elle garda sa poigne. Il aurait préféré des insultes. « Mais je veux pas être sans toi. »

« Alors quoi ? » Il ria jaune. Cette fois, il se retira, le besoin de distance était bien plus important. « On est censé faire quoi ? Être amis ? Liv' on a jamais été amis ! »

Elle haussa les épaules. « Et tu penses que c'est impossible ? On a des amis en commun maintenant. On va se croiser, tout le temps ! »

« C'est mort ! »


Il secoua la tête, incapable de l'entendre parler. Finalement, il s'éloigna à reculons jusqu'à claquer la porte de la cuisine derrière lui. Il attrapa une bouteille avant de s'enfuir sur la terrasse. Il s'attendait à tout, une crise de colère, d'injure, une ignorance complète. Il avait même espéré un baiser, voire plus, tout, sauf, devenir ami. C'était l'idée la plus stupide qu'il ait jamais entendu.

Olivia entra dans le salon pour s'asseoir sur le canapé en face de la baie vitrée. Elle le regarda, enchaîner gorgée sur gorgée tout en injuriant le ciel. Elle put apercevoir Lisko le rejoindre, tapant sur son épaule comme signe d'encouragement.


« J'pensais que vous alliez vous prendre la tête après quelques verres, pas dès le début de la soirée. »

« On s'est même pas pris la tête. » Il s'alluma une cigarette puis regarda vers l'intérieur pour rechercher la brune. « Elle veut qu'on soit amis. Elle dit que nous deux, ça marchera jamais. »

« Qu'est-ce qu'elle en sait ? » Il resta silencieux. « Et si tu acceptais ? »

« Non, c'est ridicule. »

« Tu peux être potes pour l'instant et peut-être plus après ? » Il haussa les épaules, nonchalamment. « Qui sait comment ça tournera ? »


Le blond resta pensif tandis que son ami l'abandonnait encore une fois dans sa solitude. Peut-être que l'idée n'était pas si mauvaise mais pourtant, il ne voulait pas y croire. La musique interrompit ses pensées lorsque quelqu'un entra. Olivia tenait deux gobelets. Son sourire timide le fit fondre.


« Un verre ? »

« J'ai déjà une bouteille. » Il la secoua devant elle avant de prendre une longue gorgée. Elle attrapa la vodka et but. « Ça te dérange pas de boire après moi ? Tu risques d'échanger nos salives, ça serait pas très amis. »

« Ferme-la. T'es vraiment chiant.»

« J'aurai le droit de t'avoir dans mes bras ? » Il plongea son regard dans le sien. Il abandonna rapidement pour détailler ses lèvres. Elles étaient rouges et rêches à cause de la tristesse et de la douleur dont elle avait fait face ces derniers mois.

« Ça dépend où tu mets tes mains. » Il ria sincèrement pour la première depuis son arrivée. Elle ne put cacher son sourire. « On peut essayer. »


Elle se leva de son siège et il ouvrit les bras. Sa main libre la guida sur ses cuisses tandis que l'autre jetait son mégot au-dessus de la rambarde. Habitude qu'Olivia détestait, elle aurait aimé le sermonner mais la sensation des doigts du blond contre sa peau la rendit muette. Il la serra contre lui, sa petite taille étant parfaite excuse pour la rapprocher au plus près de lui. Finalement, elle se détendit et posa sa tête contre son épaule. Elle inspira profondément son parfum.


« Tu m'as manqué aussi. » Il passa une main dans ses cheveux mais elle ne rétorqua pas devant son geste, loin d'être seulement amicale. Il resta surpris de sentir qu'ils s'arrêtaient à ses épaules, lui qui avait tant joué avec ses longs cheveux. « Promets-moi qu'on ne s'abandonnera plus. »

« Je te promets. » Elle embrassa sa joue avant de se lever, le manque de contact frigorifiant ses os.

« Amis ? » Elle tendit sa main pour qu'il la serre mais il essaya d'y déposer ses lèvres. Elle claqua l'arrière de sa tête. « Amis ? »

« Ouais ouais. » Cette fois, ils se serrèrent la main, un sourire bête et tendre. « Amis. »


Elle se balança sur ses pieds, gênée par le silence qui s'imposaient entre eux. Mathieu, lui, appréciait ce moment de calme, la regardant. Il aurait pu rester des heures ainsi tant il en avait eu envie pendant des semaines. Toutefois, retenir son envie de la toucher ou de l'embrasser allait être plus difficile qu'il n'osait l'imaginer. Sauf si sa culpabilité refaisait surface.

Malivia [PLK]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant