Chapitre 21

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Chapitre 21.

Dix-sept ans plus tôt...

Haru était en train de s'entraîner avec son katana de bois. Il voulait devenir aussi fort que son père, mais sa mère le traitait comme s'il était un bibelot fragile : il ne pouvait même pas prendre un véritable katana ! Pas plus qu'on ne le laissait fréquenter d'autres enfants de son âge.

Mais aujourd'hui était un jour différent. Si Haru s'entraînait autant, c'était parce qu'ils allaient recevoir des invités très spéciaux au palais et qu'il voulait les impressionner. L'Empereur chinois lui-même était en chemin pour leur rendre visite avec sa délégation de diplomates et d'interprètes. Le garçon était très excité à l'idée de voir l'Empereur. Son précepteur lui avait longuement parlé de la Chine en prévision de cette rencontre et ses descriptions d'un si grand Empire avait laissé Haru rêveur. Ce n'était pas souvent qu'ils recevaient des visiteurs étrangers. Il avait même appris quelques mots de mandarin pour l'occasion !

En se mordant la lèvre, une expression très sérieuse sur le visage, il continua de donner des coups de katana dans l'air, travaillant sa posture. Soudain, lorsqu'il se retourna pour trancher le vide, le bois de son arme entra en collision avec le métal tranchant d'un dāo, un sabre chinois. Surpris, les yeux d'Haru s'écarquillèrent.

En face de lui se tenait un garçon d'environ son âge aux longs cheveux noirs tressés. Il portait des vêtements qu'Haru n'avait jamais vus. Tout de suite, il comprit qu'il devait forcément être avec la délégation chinoise. L'Empereur était donc déjà arrivé ? Haru voulait tellement le rencontrer. Après tout ce qu'on lui avait raconté, il était très curieux.

Mais en cet instant, il était fasciné par l'autre garçon qui possédait une véritable arme malgré son jeune âge. Il remarqua tout de suite ses yeux qui étaient d'un noir profond.

— Les filles ne devraient pas manier les armes... mais si tu le fais, tu devrais au moins le faire correctement.

L'inconnu parlait mandarin et même si Haru avait eu des leçons, il ne comprit pas tout à fait ce que son interlocuteur lui disait. L'enfant chinois rangea son dāo dans le fourreau à sa ceinture, puis se déplaça derrière lui. Il étira le bras pour fermer ses doigts sur ceux d'Haru qui tenait le katana. Le jeune Japonais se figea d'étonnement, mais se laissa faire sans protester. Son compagnon de jeu lui montra comment mieux tenir le katana et comment faire de meilleurs déplacements.

— Tu dois faire comme cela... et parce que tu n'es pas mauvaise, je vais te montrer mon coup spécial...

Le garçon lui montra alors un mouvement particulièrement compliqué, mais qui permettait, avec beaucoup de pratique, de toucher l'ennemi au visage en le prenant par surprise. C'était une technique dangereuse et très compliquée qui demandait énormément de coordination, inspirée du kung-fu ancestral.

Haru était très impressionné par ce garçon qui, sorti de nulle part, connaissait tant de choses. Il deviendrait sans doute un combattant redoutable. Il se promit de répéter ce mouvement qu'il lui avait appris jusqu'à le maîtriser parfaitement.

Le Chinois s'éloigna ensuite de quelques pas, l'air satisfait de la petite leçon qu'il venait de donner. Puis, il fit signe à Haru d'approcher, alors qu'il grimpait sur une statue pour atteindre le toit du pavillon.

— Viens. Amusons-nous.

Le Japonais l'observa avec curiosité. Il n'avait jamais été particulièrement casse-cou et l'idée de monter tout en haut sur les toits du palais ne lui avait jamais traversé l'esprit, mais c'était la première fois qu'il avait un camarade de jeu, alors il suivit le garçon de peine et de misère. Ce dernier lui tendit la main pour l'aider à atteindre le sommet.

Une fois tout en haut, le Chinois se mit à courir de toit en toit, on aurait presque dit qu'il volait. Haru l'observa, les yeux remplis d'admiration. On aurait vraiment dit qu'il pouvait voler. Son précepteur lui avait déjà parlé de cet art, le Qinggong, mais Haru n'avait jamais eu la chance de le voir en action avant. Le Chi intérieur de ce garçon était très puissant.

Haru ne pouvait pas le suivre, alors il se contenta de l'observer jusqu'à ce que le garçon, voyant qu'il ne venait pas, revint près de lui, une lueur fière au fond du regard.

— Tu es très jolie. Quand je serai Empereur, je t'épouserai.

Même s'il n'avait qu'une dizaine d'années, le Japonais se sentit frissonner des orteils à la tête sous le regard infiniment sérieux de son vis-à-vis. Son cœur battait plus fort qu'il n'avait jamais battu. Il ne pouvait pas comprendre ce que l'inconnu avait dit, mais il avait la sensation que c'était quelque chose de très important.

Soudain, une femme sortit dans la cour, l'air de chercher quelque chose. En la voyant, le petit garçon chinois fronça les sourcils, puis grimaça.

— Je dois y aller, mais nous nous reverrons, promit-il avant de redescendre en bas pour rejoindre la femme qui parut le gronder en le retrouvant.

En baissant la tête, le garçon la suivit à regret, jetant un dernier regard en haut pour apercevoir Haru une dernière fois avant de disparaître à l'intérieur des murs du palais. 

Fleur d'OrientOù les histoires vivent. Découvrez maintenant