Chapitre 7

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Chapitre 7.

Le lendemain, une cérémonie religieuse présidée par l'Empereur en personne devait avoir lieu et toutes les concubines du harem y était conviées. Haru s'obstina à porter un hanfu d'une coupe garçonne malgré les protestations de Fu-Hsi qui finit par abandonner un combat qu'il savait déjà perdu d'avance.

Durant la cérémonie où des statues de divinités étaient promenées en grandes pompes dans toute la Cité interdite, Haru se tint tranquille, observant son premier contact direct avec les divinités chinoises d'un œil intrigué. Au bout de presque une heure de parade, l'Empereur finit par faire son apparition, assis sur un char porté par quelques eunuques impériaux. Il portait une tenue de cérémonie sertie de bijoux et de broderies dispendieuses. Une longue tresse partait du sommet de son crâne et descendant librement jusqu'au bas de son dos.

Leur regard se croisèrent pendant quelques secondes, quelques longues secondes. Le Japonais avait la certitude que l'Empereur l'avait regardé, lui, et scanné des pieds à la tête. Nul ne pouvait savoir ce à quoi il pouvait bien avoir pensé à ce moment-là. Haru remarqua la mâchoire de Xiong Li se tendre, il déglutit, puis l'Empereur poursuivit sa route. Le Japonais avait l'impression d'être devenu livide. Les yeux de Xiong Li étaient perçants. C'était comme si l'homme avait vu jusqu'au fond de son âme en un seul coup d'œil.

— Vous allez bien ? lui demanda Fu-Hsi. Un malaise ?

Haru secoua lentement la tête.

— Ce n'est rien.

— Vous en êtes sûr ? Si vous ne vous sentez pas bien, nous pouvons rentrer, ce n'est pas un problème. Ils comprendront.

— Ce ne sera pas nécessaire, Fu-Hsi, puisque je me sens bien.

— Si vous le dites. C'est que vous êtes devenu très pâle d'un seul coup.

— Ce doit être le stress, mentit-il. C'est ma première cérémonie de ce genre.

— Ah, je vois. C'est normal d'être nerveux alors, mais vous vous en sortez bien. Il aurait été préférable que vous acceptiez de mettre la robe, mais bon... de toute évidence, ce n'est pas votre tasse de thé.

— Non, ce ne l'est pas.

Même si les traits de son visage pouvaient laisser penser le contraire, il était bien un homme. Il refuserait donc encore et toujours de vêtir des tenues réservées aux femmes. Il existait des hanfu faits pour être portés par les femmes – il avait vu Sue en revêtir quelques fois – mais il s'obstinait à conserver des vêtements aux coupes plus masculines. Il se fichait de ce que pouvaient bien en penser les autres. De vilaines rumeurs couraient déjà à son sujet. Au fil des jours, Haru avait rapidement apprit que les nouvelles venues au sein du harem étaient rarement la bienvenue. À l'image de Ming, les autres concubines n'aimaient pas beaucoup la concurrence et chaque nouvelle arrivante était une rivale potentielle pour gagner les faveurs de l'Empereur et tenter de grimper la hiérarchie stricte du harem impérial. Haru avait eu de la chance que Sue le prenne sous son aile.

Une fois la célébration terminée, il retourna dans le quartier des concubines, mais en rentrant à son pavillon, il eut une surprise. Une servante impériale se tenait devant chez-lui, accompagnée d'un eunuque qu'il ne connaissait pas. Fu-Hsi, qui avait poussé son fauteuil jusque-là, lui glissa à l'oreille qu'il s'agissait d'un eunuque du département interne.

— Je suis ravie de pouvoir vous annoncer une bonne nouvelle, dit l'homme qu'il ne connaissait pas. La servante impériale Liu vous expliquera tout ce que vous devez savoir.

Le cœur battant la chamade, Haru parcourut toute la scène du regard, puis ses yeux s'arrêtèrent sur les mains de la jeune servante : elle tenait un grand jeton (de la grosseur d'une paume environ) décoré entre ses doigts.

Fleur d'OrientOù les histoires vivent. Découvrez maintenant