Lorsqu'Auguste reprit ses esprits, sa tête s'élançait, broyée par une effroyable céphalée. Heureusement qu'il était assis, sans quoi il se serait effondré tant il avait l'impression que son monde tournait.
Ses pensées arrivaient selon un rythme saccadé, mais plus les minutes s'écoulaient, plus il constatait que sa réflexion se fluidifiait. Plongé dans le noir, le jeune homme sentit tout d'abord la texture rapeuse d'un sac de jute puant l'ognon et l'urine sur son visage. Dans un deuxième temps, il remarqua que le sol sous ses pieds tremblait. Ensuite, ses oreilles se débouchèrent et il entendit le klaxon de plusieurs automobiles, mais aussi un carillon et derrière le vacarme de la circulation, le courant du fleuve.
Il se trouvait dans un véhicule et selon toute évidence, il passait sur un pont au-dessus du fleuve Tingleden qui traversait la ville. Mais quel pouvait bien être ce pont ? Il réfléchit un instant, pendant quelques secondes, il crut qu'il était définitivement incapable de réfléchir tant ses données refusaient de s'imbriquer. Ce carillon... C'était le beffroi de Last End. Il était donc à l'extrémité Sud de la ville.
Il reçut un coup de coude dans les côtes. Des rires gras éclatèrent en réponse, Auguste compta alors six personnes à côté de lui. Au bilan de ce réveil, il pouvait donc établir qu'il se trouvait selon toutes probabilités dans une camionnette, avec six gendarmes, sans oublier le conducteur, et qu'ils quittaient la ville.
Il tourna un peu ses poignets afin de s'étirer, mais immédiatement les liens qui les entouraient l'en empêchèrent. Il chercha alors à écarter les jambes malheureusement cette fois-ci encore, une chaîne tinta aussitôt.
- N'essaye même pas, grinça une voix sur sa gauche.
Auguste n'eut pas le temps d'arrêter sa tentative car déjà un coup de matraque s'abattit sur sa tête. Il percuta la paroi métallique de la camionnette et vit trente-six chandelles. Sans lui laisser le temps de se reprendre, ce coup sembla encourager les autres gendarmes qui lui tombèrent dessus à bras raccourcis. Une pluie de bâtons s'abattit sur son dos, ses bras, ses jambes, son visage...
Le jeune homme fut jeté contre le sol, piétiné, battu jusqu'au sang. Mais cela, il aurait pu le supporter, il aurait pu l'encaisser si avant de tomber dans une semi-inconscience, il n'avait entendu :
- On va te faire la peau, ordure de Stanhope.
Son sang se glaça aussitôt dans ses veines tandis que son visage devenait blême. Même au sein de leur famille, ce nom était rarement prononcé dans la crainte qu'il ne soit découvert. Sa pire angoisse dans cette affaire était de mourir sans achever sa mission, ce qu'il s'était déjà produit. Il pensait que ce ne pouvait être pire, pourtant il se trompait.
L'homme avait prononcé cela sur le ton de l'évidence. Auguste sentait au plus profond de lui que ce n'était pas du bluff. Le mensonge, il savait le sentir. Ce n'était pas un mensonge. Comment cela se faisait qu'il ne mente pas ? Son ravisseur était persuadé qu'il était bien un Stanhope.
Comment était-ce possible que ses hommes sachent qui ils étaient ? Même les anarchistes avec qui ils travaillaient ignoraient leur véritable identité, il n'y avait que son oncle et sa sœur pour pouvoir divulguer pareille information. Pourtant aucun des deux n'auraient fait une chose pareille sans perdre leur propre tête !
Tonnerre : ces gendarmes savaient où et quand aurait lieu l'attentat du parlement, un traître dans leur rang, il pouvait concevoir l'idée, mais comment pouvaient-ils savoir pour les Stanhope ? Impossible !
Et pourtant...
Par Atalante, qui les avait dénoncés ? Lucretia ne l'aurait jamais trahi... Son oncle ? Voilà belle lurette qu'il désirait voir son neveu disparaître, mais pour quelle raison irait-il faire voler en éclat leur couverture ? Cela n'avait aucun sens !
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En un tour de cadran
ParanormalLa Famille Stanhope n'est plus que l'ombre d'elle-même. Exilée dans le royaume de Blanchecombe et menacée de mort, elle vit dans le vain espoir de retrouver son âge d'or. Sa seule richesse : une énigmatique montre qui n'indique pas l'heure, mais qui...