.23h23.

896 110 44
                                    

Musiques d'inspiration : 

Hearing - Sleeping At Last
Saturn - Sleeping At Last

_____________________

La nuit est propice à la réflexion, au silence, à la peur aussi. C'est dans l'obscurité qu'on dort, qu'on se tait, qu'on voit les fantômes.
(Les noces de Sarah - Simone Piuze.) 

____________

Du fond de son lit, les yeux parfaitement ouverts malgré la fatigue qui burinait son front quelques heures auparavant, Katsuki cligne des paupières sur le noir complet de sa chambre. 
Le visage tourné vers le plafond, les bras le long de son corps affalé, sa respiration discrète rythme l'ambiance de la pièce sombre et silencieuse. 
Le poids monumental de ses cils épuisés pèsent sur ses cernes naissantes, celles qu'il se trimballera à coup sûr demain matin, et le désagréable début de migraine qui vient lui cogner les tempes n'allège en rien son état vaseux. 

Son oreiller, habituellement si confortable, semble ce soir lui cogner la tête comme un tas de briques dans du tissu,  et la mousse de son matelas parait s'être changée en bloc de ciment tout à fait inhospitalier.
La raideur de ses muscles lessivés l'empêchent de se tourner et de se retourner, quand bien même ses jambes fourmillent d'une pénible impatience et, en guise de cerise sur le gâteau, son estomac vide commence progressivement à se plaindre. 

L'obscurité pour unique compagne, les vagues froissements de draps à chacune de ses inspirations comme seule animation, son souffle s'éparpille dans l'air sans se faire voir, accentuant le sentiment ignoble de sa soudaine solitude. 

Katsuki vivait seul depuis des années, et il n'en a jamais souffert. 
Mais ce soir, alors même qu'il ne se trouve plus seul dans sa maison, une oppression soudaine et invasive griffe l'intérieur de ses côtes, soulevant l'angoisse insidieuse à sa poitrine. 
De l'autre côté de la porte, quelques pas plus loin, il devine la chambre fermée de Deku, et son corps allongé tranquillement dans son lit. 
Probablement dort il profondément à l'heure qu'il est, enfoui dans sa couverture et dans un rêve quelconque, les paupières et la nuque détendues. 

Sous sa couette épaisse, Katsuki soupire lourdement à travers le silence, les jambes bouillonnantes d'un besoin urgent de mouvement, alors que la détresse fébrile fait vibrer sa gorge. 
Lentement, parce que ses muscles pèsent sur ses os comme autant d'enclumes, il fait glisser son corps ramolli sur son matelas, s'extirpant de la couverture tel un animal rampant, avant de poser ses deux pieds sur le sol frais. 

Couvert d'un unique boxer, il se redresse d'abord sur ses jambes cotonneuses de fatigue, trainant sa carcasse jusqu'à son armoire à vêtements pour y piocher de quoi s'habiller un peu. 
Sans vraiment réfléchir, il tire un jogging au hasard de la pile de fringues parfaitement pliées, ainsi qu'un marcel qui a plus que fait son temps. 
Enfilant les tissus plus ou moins délavés sur sa peau, il se permet un dernier soupir avant de quitter la pièce, passant sa main dans ses cheveux pour aplatir les mèches frivoles sur son crâne. 

Puis, en s'efforçant de faire le moins de bruit possible, il se faufile dans le couloir silencieux, allumant la lumière sans taper trop fort sur l'interrupteur pour ne pas risquer de réveiller Izuku. 

Pourtant, au milieu du silence du couloir, un curieux écho attire son attention. 

S'immobilisant sur place, les oreilles à l'affût, il fronce les sourcils en tournant son regard vers la porte fermée de la chambre d'Izuku, fixant la poignée inanimée comme si elle pouvait l'aiguiller. 
Ecoutant les sons légers qui lui parviennent, reconnaissant le frottement d'un morceau de draps et le bruissement lourd et répétitif d'une respiration menacée, il avale nerveusement sa salive en mordant l'intérieur de ses joues. 

Quatre ans et six mois. [KatsuDeku]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant