#39 SAGESSE

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Nous sommes assis côte à côte dans le hall d'attente des urgences. Nos regards s'entrecroisent entre deux claquements de porte. Peli tente d'étouffer son impatience en jouant à candycrush sur son smartphone et Mathieu écoute les conversations autour de nous au cas où une information fuiterait. Les parents de Mathieu sont en route pour nous rejoindre. C'est pas ce que j'imaginais pour une première rencontre.  C'est pas le meilleur moment non plus pour lui parler d'Anaïs. L'amour et le respect que je porte à sa grand- mère prend le dessus sur mon sentiment de trahison. Je finis par me lever pour aller faire un tour. 

J'ai reçu de nombreux messages d'inquiétude de la part de ses amis. Elle est vivante et stable, c'est tout ce qu'on sait. Mais dans quel état va t-on la récupérer ? Mathieu ne veut pas qu'ils débarquent tous, aussi, je lui ai promis de m'occuper de communiquer les nouvelles. Cela fait deux heures qu'on attend, je me prends donc un double expresso à la cafétéria. Les hôpitaux sont badants. Je surprends des infirmières, visiblement en pause, en train de rigoler et je me dis qu'elles ont bien raison de garder le sourire. On a besoin qu'ils supportent toute cette angoisse qu'on a du mal nous à gérer.

Je récupère ma boisson et je sors du bâtiment. Il fait hyper beau aujourd'hui. Je reste au soleil et je laisse les rayons m'apporter un peu de réconfort. Mon portable vibre. Je le déverrouille. C'est un texto d'un numéro inconnu. Ma respiration se bloque à la lecture celui- ci.

"Depuis que tu es dans sa vie, il n'est plus lui- même, il se force"

Et maintenant, elle a mon numéro...Mais au lieu de me faire trembler de peur, elle me fait trembler de rage. Je décide lui répondre. 

"Ça commence à bien faire tes gamineries. J'ai pas le temps pour ça. On a des choses bien plus grave à gérer et je peux te dire qu'il s'en fou complètement de toi à cette heure- ci"

Je lui fais sous entendre que j'ai lâché le morceau à Mathieu et que je suis détachée de son existence. Elle n'a pas l'air d'être au courant de ce qu'il passe, donc il ne parle pas avec elle. Une groupie qui tente de foutre la merde et qui a du fabriquer des photos pour me faire croire n'importe quoi. Et elle doit écrire à tous ses potes constamment pour attirer l'attention. Connasse ! Comment puis- je douter de lui...Je me sens ridicule.

Je retourne dans la salle d'attente énervée. En fait, ce message a ravivé mon âme combative. Je reprends ma place à côté de mon homme. J'attrape sa main qui agrippe nerveusement son genoux et entrelace mes doigts aux siens. 

- Ça va aller...promis... Elle est forte. (Il cherche l'espoir au fond de mes yeux)

- Merci d'être là.

- C'est normal, tu n'as pas à me remercier. (Une larme coule instantanément le long de sa joue. Je ne m'y attendais pas, si bien que je ne sais pas comment réagir. Il encaisse tout depuis le début et je crois ne l'avoir jamais vu aussi vulnérable).

Il se lève et fuit la pièce. Il a besoin de prendre l'air aussi. Peli ne sait pas s'il doit le rattraper. Il le connait par coeur alors il reste avec moi.

- C'est chaud...

- On va la ramener à la maison. (Je tente de le rassurer aussi. Il faut bien que quelqu'un garde le navire en dehors de l'eau)

- Et si tu te trompes ?

- Et bien, on fera tout pour que la vie continue et qu'il la rende fière.

- ...il a eu raison...

- de quoi ? 

- de te faire confiance...

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