12.

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Le lundi suivant a été difficile et éprouvant. J'ai passé mon temps à me cacher ou à essayer d'esquiver les groupes d'élèves qui ne parlaient que de cette soirée de malheur.

J'ai retrouvé Maddy, enfin. Elle était simplement en train de vider le contenu de son estomac dans les toilettes luxueuses et rageusement grandes de chez Alan, mais elle va bien, apparemment.

Je lui ai raconté l'intégralité de ce qu'elle a manqué et même si elle a juré un peu entre ses dents, elle a su garder un calme remarquable au vu de la situation. Je n'ai pas réussi à en faire autant. À être aussi robuste. Je me suis tue à bien des moments, j'ai passé le peu de temps libre que j'avais entre les cours à m'enfuir pour aller pleurer et une fois de plus, j'ai échoué à résister.

Quant à Arès, il ne s'est pas pointé. Ni lundi, ni mardi, ni mercredi. Je commence à perdre espoir de le revoir un jour et me demande même ce qui a pu le pousser à déserter le lycée.

Mais pour l'heure, je reste concentrée. Monsieur Salto nous a laissés quelques journées de plus pour finir notre disserte. Je m'applique donc à rédiger les derniers mots de celle-ci avant de la rendre quand une voix suscite mon intérêt plus que les autres.

Surprise, je me retourne brusquement et atterrit sur un groupe d'élève qui entre dans la bibliothèque.

Dans son sweat noir et son jean couleur ciel, Arès est à tomber. Au début, il ne fait pas attention à moi, trop occupé à débattre avec Alan sur un sujet à l'apparence fâcheuse. Mais quelques minutes plus tard, son regard bleu se pose dans le mien et mes lèvres esquissent un sourire presque naturellement à son encontre.

Seulement, alors que je m'attends à n'importe quoi venant de lui, rien ne se passe. Ses yeux quittent les miens pour s'appuyer dans les deux billes sombres de son ami et il entame une nouvelle conversation, sans se soucier de moi ou de mon visage au teint soudainement blafard.

Je fais mine de me concentrer pour échapper à ce qui s'insère doucement en moi et finit ma disserte quelques minutes avant de déserter la bibliothèque pour aller déjeuner.

À la fin de la journée, je suis épuisée. Je rentre chez moi et retrouve ma mère endormie dans le fauteuil. Je suis surprise de la voir à la maison si tôt alors je prends un peu de temps pour venir m'asseoir près d'elle et la contempler. Ses — trop — longs cheveux bruns et sa mine désastreuse. Son visage aux traits tirés et aux cernes assombris. Ce que mon père a fait d'elle et qui me renvoie ce que je vis moi-même en pleine figure.

Je ne suis pas la seule à souffrir. Elle est abîmée, autant que moi, si ce n'est plus. Mais aucune d'entre nous n'est assez forte pour l'avouer à l'autre. Aucune d'entre nous n'est assez courageuse pour se l'avouer, elle-même. Alors nous ne faisons rien de plus que de se murer dans le silence. Un silence pesant, recelé et même pas un petit peu apaisant.

Il nous a tout pris. Absolument tout. Et très franchement, ce soir, je n'arrive pas à saisir pourquoi.





***





— Mademoiselle Parker.

Je déteste que les gens connaissent mon nom avant même que je ne le prononce. Cela signifie durement qu'ils savent. Ils maitrisent mon père et l'affreuse histoire qu'il s'est écrite. Qu'il nous a tracé également.

Présumée Coupable (terminé) [en réecriture]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant