Chapitre 17

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Chapitre 17 ~ La raison des vêtements blancs

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Itona me remet une mèche de cheveux derrière l'oreille, me faisant frissonner et le regarder. Je m'écarte de lui, tout en gardant nos mains entrelacées.

- Itona ?

Itona- Hm ?

- J'ai envie... j'ai envie de t'expliquer pourquoi je ne porte que des vêtements blancs...

Il me regarde et serre doucement ma main dans la sienne, se mettant juste devant moi. Je plonge mon regard dans le sien, ce qui me permet d'oublier mon environnement. Il n'y a qu'Itona et moi. Seulement lui et moi. Personne d'autre.

Itona- Prends ton temps...

Je hoche doucement la tête et lève une main pour caresser la joue du blanc avec mon pouce. Il tourne la tête et je frémis en sentant ses lèvres contre ma paume. Il me regarde du coin de l'oeil en faisant un bisou sur la paume de ma main.

J'inspire... expire... et une larme roule le long de ma joue, scintille sous la lumière de la lune et s'écrase sur nos mains jointes.

- C'était en Arabie saoudite, j'avais cinq ans. Shiro voulait faire à ce que je résiste à la peur et pour que ça fonctionne, il m'a fait regarder des dizaines et des dizaines de films d'horreur. Que ce soit en anglais, français, japonais, espagnol... Un soir, c'était le film de trop... En pleine nuit, j'ai entendu du bruit dans le couloir... Paniquée, j'ai attrapé le couteau que j'avais volé à un garde et suis sortie de ma chambre. Et j'ai tué. J'ai tué tout le monde. J'étais devenue folle, prise de pulsions meurtrières...

Je m'arrête et une larme roule le long de ma joue. Itona lève la main et essuie ma joue avant que la perle d'eau salée n'aille plus loin.
Mon coeur bat rapidement, stimulé par tout ce que mon corps capte ou par tous les souvenirs qui reviennent en tête.

Itona- Tout va bien... tu es avec moi... tout va bien...

Je souris faiblement à Itona qui me remet une mèche de cheveux blancs derrière l'oreille en me faisant un sourire rassurant.

- Lorsque j'ai pris conscience de ce que j'avais fait, je suis sortie du laboratoire. Mes vêtements blancs étaient couverts de sang. Ma vision était rouge, mes doigts étaient rouges, mes cheveux étaient rouges. Le rouge était partout. Je ne pouvais pas lui échapper. Lorsque Lovro m'a découverte, j'avais trouvé des vêtements blancs. Un blanc pur. Un blanc innocent. Un blanc lumineux. Ces vêtements blancs allaient pouvoir cacher mon crime. Mes crimes plutôt...

Je me tais et passe mes doigts fins dans les cheveux blancs d'Itona qui me fixe du regard, rapprochant ses mains de ma taille. Je rougis légèrement, tandis qu'Itona regarde ailleurs, gêné.

- Mes vêtements sont blancs pour cacher toute la noirceur de mon âme et de mes actes. Pour cacher que je suis un monstre. Un monstre assassin.

Itona- Tu n'es pas un monstre, Blanche. Tu ne me seras jamais. Un monstre n'aurait pas de scrupules. Il ne sentirait pas coupable. Toi, tu es un ange.

Je rougis et fixe le blanc du regard, captant un mouvement au bout du couloir. Un mouvement jaune. Koro-senseï a tout entendu. Et je suis sûre qu'il n'est pas seul à être caché au coin du couloir.

Itona- Tu es un ange qui est tombé en enfer, non par choix, mais par obligation. Certes, tu as tué des gens, mais tu en as sauvés aussi. J'en suis la preuve vivante.

Mes yeux se remplissent de larmes et je me penche en avant pour me cacher dans le cou de mon bébé poulpe. Il m'entoure avec ses bras, ne disant rien. Mes larmes trempent le pyjama d'Itona qui a l'air de s'en foutre. Je l'entends murmurer quelque chose, mais il le dit tellement bas que je n'arrive pas à comprendre.

Après un moment, je ne pleure plus et me redresse en souriant faiblement. Itona rougit légèrement et pose ses mains sur mes joues, essuyant les traces de larmes avec ses pouces. Je rougis légèrement et le fixe du regard. Aucun de nous deux n'arrive à regarder ailleurs.

J'entends des bruits de froissements de tissus au bout du couloir. Je regarde Itona qui hoche doucement la tête. Je descends de l'appui de fenêtre et sors discrètement un couteau de ma manche, pareil pour mon ami.

Soudain, c'est la débandade dans l'ombre du couloir. Des bruits de courses et des portes qui se referment se font entendre. Il ne reste que le poulpe avec son appareil de photo.

Koro- Oh, hum... Salut les enfants ! Belle nuit, n'est-ce pas ?

On le regarde, blasés. Puis nous essayons de l'attaquer, en vain, car il s'enfuit dans sa chambre à Mach20 avec son appareil photo et je ne sais combien de clichés d'Itona et moi.

Je range mon couteau et mets mes mains dans mes poches en regardant le plafond. Je jette un regard à Itona qui regarde l'heure sur son portable. Il est minuit.

- Ito-kun ?

Il relève la tête et me regarde avec son air neutre.

Itona- Quoi ?

- C'est quoi que tu as murmuré quand j'étais dans tes bras ?

Son regard doré s'assombrit, tandis que ma question flotte dans l'air. Je mords ma lèvre inférieure, me demandant si je viens de faire naître, pour la première fois, de la gêne entre nous.

Itona- C'est rien, c'était un truc con.

- Tu mens. Sinon ton regard ne serait pas aussi sombre depuis que je t'ai posé la question.

Itona- C'est rien, je te dis. Un truc con, pas important. C'est pas utile que je le répète...

Je tends la main pour essuyer les larmes qui menacent de couler sur son visage blessé, fermé à la discussion. Il recule et je laisse mon bras retomber le long de mon corps.
Itona me lance un sourire légèrement triste, tandis que son regard semble vide.

Itona- Bonne nuit, Blanche. Dors bien.

- Toi aussi, Ito-kun... Dors bien...

Il me regarde une dernière fois, avant de partir se coucher dans son dortoir.

Je pose une main sur mon coeur et serre fort mon pull, ouvrant la bouche comme pour le rappeler ou comme si j'avais oublier comment respirer.

Pourquoi ça me fait mal ? Pourquoi son sourire triste me donne l'impression d'avoir foiré quelque part ?

Pourquoi mon coeur se disloque-t-il ainsi ?

Une larme coule le long de ma joue et arrive à mes lèvres, leur donnant un goût salé.

J'aime Itona.

J'aime Itona.

J'aime Itona.

Ça fait mal l'amour...

Blanche || AcOù les histoires vivent. Découvrez maintenant